Pourquoi la proposition de budget de l’UE inquiète le monde agricole
TNC le 19/08/2025 à 11:15
Le 16 juillet dernier, la Commission européenne a dévoilé sa très attendue proposition de budget pour 2028-2034, un budget qui inclut les soutiens de la politique agricole commune. Malgré les efforts de Bruxelles pour ménager les agriculteurs après les importantes mobilisations de 2024, elle a reçu un accueil très négatif côté agricole.
Avec 2 000 milliards d’euros, le budget 2028-2034 proposé par la Commission européenne serait en nette hausse, les moyens supplémentaires étant fléchés sur la compétitivité et la défense. Quant à l’agriculture, 300 milliards d’euros devraient y être consacrés.
Si ce montant constitue « un minimum », pour Bruxelles, il reste inférieur au précédent budget de la Pac qui représentait 387 milliards d’euros de 2021 à 2027, dont 270 milliards d’aides directes aux exploitations agricoles.
Fonds de partenariat national et régional
Cette différence de budget s’expliquerait, selon la Commission, par la mise en place d’un grand fonds de « partenariat national et régional », à laquelle la Pac serait intégrée. Certains financements seraient transférés à la politique de cohésion des territoires, notamment ce qui concerne le soutien aux régions rurales défavorisées et à l’innovation agricole.
Ce point inquiète particulièrement les syndicats agricoles qui craignent des disparités entre États membres, puisqu’il reviendrait aux gouvernements de décider si les sommes supplémentaires seront affectées aux agriculteurs.
Mieux cibler les bénéficiaires et limiter les aides à l’hectare
Si, pour Bruxelles, la Pac continuera à fonctionner avec des règles propres et des moyens financiers fléchés, une révision du mode de calcul des paiements est envisagée. La Commission souhaite limiter les soutiens aux plus grandes exploitations, en plafonnant les aides à l’hectare à 100 000 euros, en parallèle d’une dégressivité.
Bruxelles envisage également de simplifier le conditionnement des versements Pac liés aux exigences environnementales, en transformant une partie de ces soutiens en incitations destinées à encourager les comportements vertueux.
Une proposition qui alarme ministre et syndicats
Pour la FNSEA, ces propositions constituent « un désengagement clair de l’UE vis-à-vis de sa seule véritable politique commune », sans « ambition économique pour l’agriculture européenne ». Le syndicat s’alarme notamment de la possible fusion des deux piliers de la Pac dans un fonds unique.
La Coordination rurale redoute de son côté un nouveau « vecteur d’agricide », avec la mise en place de « nouvelles conditions techniques et environnementales ».
La Confédération paysanne fustige quant à elle le manque d’objectifs communs qui risque d’aggraver les distorsions de concurrence. « Cette manœuvre conduira inexorablement au nivellement des ambitions environnementales et sociales par le bas entre États membres », estime le syndicat.
La ministre de l’agriculture Annie Genevard s’est elle aussi indignée de cette proposition, rappelant l’importance d’une politique agricole réellement commune, dans un contexte « où il n’aura sans doute jamais été aussi impérieux de s’unir pour faire front face aux menaces ». « La négociation s’ouvre pour de longs mois. J’y jetterai personnellement toutes mes forces », a-t-elle également indiqué.