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Repères

Pac : les dossiers clés au cœur des négociations


AFP le 26/05/2021 à 18:25

Primes environnementales, mesures pour la biodiversité, mécanismes redistributifs, droits des travailleurs... Voici les principaux points d'achoppement de la nouvelle Politique agricole commune (Pac) en négociation à Bruxelles.

Ecorégimes

C’est l’outil-phare de la nouvelle Pac, destinée à « verdir » l’agriculture européenne à partir de 2023 : des primes accordées aux agriculteurs participant à des programmes environnementaux plus exigeants ou recourant à des techniques plus vertueuses. Le Parlement européen réclame que les Etats y consacrent au moins 30 % des paiements directs de l’UE aux exploitants, tandis que les Vingt-Sept préconisent un seuil de 20 %.

Sur leur contenu, la marge d’appréciation des Etats, qui réclament une grande flexibilité et de nombreuses dérogations, pose également question. Les eurodéputés souhaitant qu’elle soit davantage encadrée.

Les écorégimes seront-ils accordés en échange d’une réduction de produits phytosanitaires, de l’établissement de cultures biologiques, d’une rotation des cultures ? Des exploitants français en bio se sont déjà inquiétés de toucher moins avec le nouveau système. Même si la Pac  ne fixe pas d’objectif chiffré, la Commission européenne avait dit vouloir réserver un quart des terres aux cultures biologiques dans le cadre de sa stratégie « De la Ferme à la fourchette ».

Les eurodéputés souhaitent que la Commission –qui contrôle le versement des fonds– puisse « rejeter » un plan agricole national qui ne serait pas aligné avec les objectifs environnementaux et climatiques (Pacte vert) décidés par Bruxelles. Les Etats s’y opposent.

Redistribution

Autre question cruciale : la nécessité d’éviter que la plus grosse part des fonds européens bénéficient aux exploitations géantes, voire qu’ils soient détournés par des agriculteurs « fictifs » ou la fraude, au détriment des petits agriculteurs et fermes de taille moyenne. Eurodéputés et Commission proposaient de plafonner à 100 000 euros annuels les aides directes aux grandes exploitations, mais les Etats sont contre.

En revanche, une part minimale du total des versements effectués par chaque Etat pourrait être réservée aux petits agriculteurs : ce seuil (entre 7,5 % et 12 %) fait débat. Là encore, les eurodéputés s’inquiètent d’un contrôle insuffisant des bénéficiaires, et des disparités des subventions à l’hectare d’un pays à l’autre.

Biodiversité 

Les eurodéputés souhaitent que, sur l’ensemble des surfaces agricoles utiles, un pourcentage soit réservé à la biodiversité, avec des terres non cultivées rendues à la nature. Certains Etats sont hostiles à ce principe. Le pourcentage fait aussi débat (les eurodéputés veulent 5 % des terres arables, les Etats 3 %), tout comme la méthode du calcul.

Autre combat du Parlement : faire de la rotation des cultures un critère strict de la Pac, afin d’éviter les monocultures restreignant la biodiversité — au grand dam des grandes exploitations céréalières. Nombre de pays sont circonspects : ils proposent d’exempter les exploitations de moins de 10 hectares de toute obligation et que la diversification (deux cultures différentes sur la même exploitation, par exemple) soit considérée comme équivalente à la rotation. Un assouplissement hors de question pour les eurodéputés.

Droits des travailleurs

Les eurodéputés réclament de conditionner les versements aux agriculteurs au respect d’un socle commun de normes sociales minimales protégeant les droits des travailleurs, avec la possibilité de sanctions en cas d’infractions répétées.

Les parlementaires sociaux-démocrates en font une ligne rouge, soucieux de combattre l’exploitation de saisonniers immigrés ou l’abus de contrats courts et mal rémunérés. Treize Etats, emmenés par l’Autriche, y sont farouchement opposés : ils proposent simplement de nouvelles recommandations, avec une évaluation au bout de trois ans. Lisbonne, qui occupe la présidence tournante de l’UE, propose comme alternative la possibilité d’aides pour accompagner certains investissements (des locaux pour le personnel par exemple).

Importations

Soucieux que les produits agricoles importés respectent les mêmes standards environnementaux que la production européenne, le Parlement réclame un durcissement des contrôles et l’interdiction des produits présentant des traces de produits phytosanitaires bannis par Bruxelles d’ici quelques années. Les Etats, eux, s’inquiètent de contrevenir aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).