L’interprofession du miscanthus sur les rails pour amplifier les débouchés


TNC le 11/06/2025 à 14:08
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Le débouché local va offrir une rentabilité au miscanthus, estime le président de l'interprofession nouvellement créée. (© Adobe Stock, @S. Leitenberger)

Fraîchement reconnue, l’interprofession du miscanthus devrait permettre à la filière de poursuivre sa croissance déjà bien amorcée depuis une quinzaine d’années. Les débouchés sont multiples, que ce soit pour la litière animale, la combustion, mais aussi le paillage ou les matériaux, mais ils méritent d’être mieux connus et développés pour convaincre les agriculteurs de la rentabilité de cette culture, idéale pour diversifier leur assolement.

Reconnue en mars 2025 par le ministère de l’agriculture, l’Interprofession française du miscanthus aura pour mission d’améliorer la connaissance de la filière, renforcer la communication et la promotion, soutenir les recherches sur la culture et développer la connaissance de la gestion des sous-produits. « Arrivé en France il y a quelques années, le miscanthus a besoin de se structurer un peu mieux, c’est important d’être visible, organisé et représentatif », explique Alain Jeanroy, président de l’association France Miscanthus depuis sa création.

Avec un taux de croissance de 12 % sur les cinq dernières années, les surfaces cultivées ont atteint 11 500 ha en 2024, pour 2 650 exploitations. En 2025, ce sont 12 600 ha qui devraient être cultivés. Si, historiquement, les surfaces de miscanthus sont plus présentes dans le nord et une partie de l’ouest de l’Hexagone, chaque région peut développer la production à condition qu’il y ait un débouché local, car le miscanthus s’avère difficilement transportable. Il a néanmoins l’avantage de ne pas nécessiter de teillage ni de chambrière, et d’être consommable en l’état. Il est également facilement implantable. « Il faut, en fait, des terres à maïs », résume Alain Jeanroy.

Une plante plébiscitée pour la litière animale

Aujourd’hui, c’est la litière animale qui constitue le principal débouché du miscanthus (52 % des utilisations) alors qu’elle ne représentait que 30 % des usages en 2014. Le miscanthus est notamment reconnu par ses qualités d’absorption, puisqu’il peut absorber jusqu’à trois fois son poids, avec un moindre besoin de renouvellement que la paille. Dans les élevages avicoles, il permet également de réduire les maladies de patte.

Une fois récolté, le miscanthus peut être utilisé en sortie de champ (paillage avec copeaux) ou déshydraté puis granulé avant d’être valorisé sous forme de farine pour la litière animale. La granulation permet de faciliter le stockage et d’augmenter l’absorption de la farine, explique Samuel Maignan, directeur de Déshyouest. Il peut également être valorisé en alimentation animale pour les bovins laitiers.

La combustion, un débouché prometteur

Alors qu’elle constituait 60 % des débouchés du miscanthus en 2014, la combustion ne représente désormais plus que 20 % des utilisations (en 2021). Pourtant, la plante possède beaucoup d’avantages en la matière : 1 hectare de miscanthus équivaut à 6 200-7 500 litres de fioul (pour un rendement de 12 à 15 tMS/ha), son pouvoir calorifique est comparable à celui du bois, et il produit 40 fois moins de CO2 par kWh (6 g) que le gaz naturel, et 50 fois moins que le fioul, indique France Miscanthus.

Ces atouts, Philipe Logeay, agriculteur dans l’Oise, en est un fervent convaincu. Elu dans sa communauté de communes, il a eu l’idée d’implanter du miscanthus dans le cadre d’un projet de qualité de l’eau et de rénovation du chauffage de la piscine et du gymnase. Dans les faits, la réalisation se heurte à des contraintes juridiques. « On ne peut pas demander à des agriculteurs de planter du miscanthus pour 20-25 ans avec des appels d’offres qui se renouvellent tous les quatre ans », explique-t-il. Finalement, la solution trouvée a été de contacter les agriculteurs propriétaires de leurs terres. « On leur a loué les terres sur 18 ans, et on les indemnise sur la base d’une ORE, une obligation réelle environnementale ». Les agriculteurs touchent ainsi 1 500 €/ha en ORE (le montant ne peut plus être modifié ensuite), en plus de leur loyer classique. Six producteurs ont ainsi rejoint le projet, pour 40 ha de miscanthus dans un rayon de 10 km. « Il y a un débouché énorme auprès des collectivités, on divise par trois le prix du chauffage de la piscine. Mais il faut une sécurisation juridique », témoigne Philippe Logeay, qui déplore avoir perdu deux ans pour trouver une solution satisfaisante.

Pour Cyril Cogniard, agriculteur dans la Marne et désormais président de l’interprofession française du miscanthus, « le débouché local va offrir des rentabilités », c’est ce que qui va permettre de convaincre les agriculteurs d’intégrer cette culture dans leurs assolements. Le miscanthus permet d’accéder aux écorégimes de la Pac via la voie des pratiques agronomiques des exploitations.

Le miscanthus se commercialise entre 150 € et 250 € la tonne de matière sèche en fonction des débouchés, indique Alain Jeanroy, le paillage horticole étant le mieux rémunéré. Le coût d’implantation de la culture s’élève en moyenne à 3 000 – 3 500 €/ha. « Mais la première étape pour que ça fonctionne, c’est de savoir ce qu’est le miscanthus. On a un savoir-faire, il faut maintenant le faire savoir », insiste Cyril Cogniard.