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Volontariat, acquisition de parts sociales…

Les Cuma veulent renouveler les générations d’agriculteurs et d’adhérents


TNC le 24/04/2024 à 16:00
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Les Cuma cherchent à susciter des vocations agricoles chez les jeunes. (© Budimir Jevtic, Adobe Stock)

Fin 2022, Cuma France a lancé le service civique dans les coopératives d’utilisation de matériel agricole, afin de favoriser le renouvellement générationnel dans les exploitations et les entreprises de son réseau. Expérimentée dans l’Aveyron, l’expérience semble aussi profitable aux jeunes volontaires, qu’aux structures qui les ont accueillis. En Mayenne, c’est l’acquisition de parts sociales qui est facilitée pour les jeunes installés. L’objectif de ces deux dispositifs est aussi de simplifier l’intégration dans les territoires, à l’image du projet « Décloisonnons » qui vise également, comme le volontariat, à renouer des liens avec les citoyens.

Nous vous en parlions il y a un an : depuis fin 2022, Cuma France incite les structures de son réseau à accueillir des jeunes pour six mois de volontariat, un peu comme le service civique. Objectif : faire découvrir l’agriculture et susciter des vocations, pour renouveler les générations d’agriculteurs dans les exploitations et au sein des coopératives d’utilisation de matériel agricole, de manière un peu différente des stages à la ferme.

Les résultats d’un premier test dans l’Aveyron, dans le cadre de l’expérimentation nationale lancée par la Fédération nationale des Cuma, en partenariat avec l’association InSite, viennent d’être dévoilés. Les volontaires, deux jeunes filles (Élodie, 22 ans et Rébecca, 25 ans) ont vécu une vraie immersion dans deux coopératives du département, avec la collaboration des collectivités territoriales.

Après leur volontariat, Élodie et Rébecca envisagent un métier agricole

Expérience concluante : non issus du milieu agricole, elles disent avoir compris « les réalités du terrain » et pourraient envisager un métier dans l’agriculture. Elles témoignent, en vidéo, sur la chaîne Youtube Cuma France lors d’une journée de restitution organisée en mars :

Élodie et Rebecca ont notamment réalisé une enquête qualitative, sous forme d’entretiens, auprès d’une vingtaine d’agriculteurs adhérents du sud du département. En études d’agronomie, Rebecca connaissait déjà le réseau Cuma. Quant à Élodie, étudiante en sciences humaines et sociales, elle a de la famille dans le secteur et s’intéresse, dans le cadre de sa formation, aux questions agricoles. Toutes deux voulaient « être au contact des agriculteurs et agricultrices d’aujourd’hui dans tous les types de fermes que l’on peut observer dans le monde agricole ».

Des observations sur l’accès aux Cuma, leur rôle et la place des femmes

Elles se sont rendu compte, d’une part, que « tout le monde n’avait pas accès aux Cuma de la même façon, selon les productions, du matériel spécifique n’étant pas toujours disponible, et le milieu d’origine, agricole ou non, qui peut expliquer la méconnaissance du réseau et des services proposés ». « La coopération, ce sont des rencontres mais surtout de la mise en commun de savoirs et des échanges de pratiques », relève Rebecca. « Dans les Cuma, les gens sont plutôt ouverts pour tester de nouvelles choses » : voilà ce qu’elle retient de son volontariat.

Les gens sont ouverts pour tester de nouvelles choses !

Élodie, elle, met en avant le côté asyndical qui peut permettre de « pousser plus loin la coopération et toucher plus de personnes ». « Certains exploitants, n’en faisant pas partie, assimilent les Cuma à l’agriculture industrielle. S’il ne faut pas ignorer ces « clivages », il faut montrer que ces coopératives sont des espaces de dialogue, et y favoriser le débat. Ce n’est pas parce que les producteurs n’ont pas la même vision de leur métier qu’ils ne peuvent pas travailler ensemble ! »

Des espaces de dialogue, qui favorisent le débat.

La place des femmes dans les Cuma, et le milieu agricole en général, a interpellé les deux jeunes volontaires. « Plusieurs de celles, que nous avons rencontrées, pensent ne pas être crédibles auprès des hommes. Par exemple, ils ne croient pas qu’elles puissent conduire un tracteur ! », pointent-elles avant d’ajouter : « elles ont du mal à se faire entendre dans les réunions de Cuma et ne se sentent pas légitimes pour parler de matériel. Quelques-unes ont même entendu des commentaires machos ! »

Les femmes ne se sentent pas légitimes pour parler de matériel.

« Leur manière de raisonner est différente, et elles ne vouent pas la même passion aux machines agricoles que leurs homologues masculins. Si elles étaient plus nombreuses, elles se sentiraient plus à l’aise, poursuivent Rebecca et Élodie qui concluent : « Cela ferait du bien aux Cuma d’être plus accueillantes envers les femmes. Ça aurait du sens : il y a quand même de plus en plus de femmes qui s’installent et sont cheffes d’exploitation. » À l’issue de leur service civique, les deux volontaires ont formulé des recommandations et pistes de travail, exposées sur des panneaux explicatifs associés à des verbatims.

Ce volontariat agricole en Cuma permet de recréer du lien entre l’agriculture, les territoires et la société, pour une meilleure compréhension mutuelle et intégration locale de chacun, soulignent de leur côté les coopératives et leurs fédérations nationale et aveyronnaise. Cuma France souhaiterait que l’État soutienne le volontariat agricole, lui qui veut favoriser les stages et tous dispositifs immersifs dans le secteur, et l’intègre dans le projet de loi d’orientation agricole (PLOAA).

Toujours pour rapprocher agriculteurs et citoyens, et renouer le dialogue entre eux et avec les territoires, la fédération, lauréate de l’appel à projets Animera (animation nationale et interrégionale pour mêler enjeux ruraux et agricoles) du Réseau national agriculture et ruralité, va mener jusqu’au 28 février 2025 l’opération « Décloisonnons » avec, comme partenaires, Terre de liens, Accueil paysan, l’Union nationale des CPIE, RED, Renata, le MRJC, Sol et Civilisation.

Le but est le « partage d’approches, d’expériences et de méthodes » entre ces coopératives agricoles, et des organisations de l’économie solidaire et de l’éducation populaire. Parmi les thématiques abordées : l’alimentation, l’énergie, le foncier. « Seront testées des modalités de décloisonnement entre exploitant(e) s agricoles et grand public, pour lesquelles la construction de solutions territoriales est possible », précise la FNCuma qui espère, derrière, une plus grande ouverture des coopératives de son réseau à la société. Un budget de 282 000 € est dédié à cette initiative.