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Congrès AGPB

Les céréaliers s’opposent aux sirènes de la décroissance


TNC le 26/05/2023 à 15:20
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Le ministre Marc Fesneau, entouré d'Arnaud Rousseau de la FNSEA et du président de l'AGPB Eric Thirouin, débat de la feuille de route sur la décarbonation de la filière céréalière (©TNC)

Le congrès de l’AGPB s’est tenu à Paris le 25 mai au terme d’une année hors norme pour le secteur, marquée par les bouleversements de la guerre en Ukraine et les effets de la crise climatique. Face à ces nouveaux défis, la réponse des céréaliers tient dans la formule consacrée, « produire plus et mieux »

Le congrès des céréaliers organisé jeudi 25 mai 2023 à l’Institut du Monde arabe était placé sous le signe de « l’ambition d’une compétitivité responsable ». Dans un contexte de crise géopolitique, inflationniste et environnementale, l’AGPB entend augmenter sa production, dans un souci de préseervation de la souveraineté alimentaire.

Ce rendez-vous annuel a été l’occasion de repenser l’avenir de la filière à l’aune de l’impératif de décarbonation. L’AGPB avait carte blanche pour présenter sa feuille de route sur cette thématique et adresser ses doléances au ministre de l’agriculture, présent pour la clôture de l’évènement. Quelques jours après la présentation du plan climat du gouvernement du 22 mai, fixant un objectif de réduction des émissions de GES de 50 % d’ici 2030 par rapport à 1990, l’interprofession a tenu à rappeler la spécificité de l’agriculture, seule capable de produire de la biomasse.

Produire plus et mieux

« La culture des céréales est une chance pour la France, rares sont les pays autosuffisants, plus rares encore sont ceux qui peuvent exporter une partie de leur récolte vers d’autres pays grâce à des terroirs favorables cultivés par le savoir-faire unique des céréaliers français », déclare Eric Thirouin, président de l’AGPB.

Le secteur céréalier a connu une année exceptionnelle en 2022 avec une production agricole en hausse de 17,4 % à 95,8 milliards d’euros selon l’Insee. Du côté des exportations, la filière a exporté 34 millions de tonnes vers l’Europe et le reste du monde avec un excédent commercial en hausse de 55 % par rapport à 2021, selon l’interprofessionnelle.

En dépit de ces résultats particulièrement favorables, les céréaliers redoutent la perspective d’un effet ciseau, sur un marché en tension et la montée des contraintes environnementales et réglementaires.

« L’avenir ce n’est pas la disparition des paysans parce que la décroissance, c’est ça que ça veut dire », insiste le président de l’AGPB, avant d’ajouter, « il faut continuer à avoir une agriculture de production en ayant un impact inférieur en termes de carbone. Les produits importés émettent deux fois plus de carbone que les aliments produits chez nous. » 

L’enjeu de la biomasse agricole

« Les solutions apportées par le monde agricole sont incontournables. Le monde agricole est le seul secteur à avoir cette capacité de stocker du carbone grâce à la production de biomasse », martèle Olivier Dauger, vice-président de l’AGPB. Hors forêt guyanaise, les écosystèmes agricoles et forestiers représentant 75 % du territoire français stockeraient actuellement 4 à 5 Gt de carbone (soit 15 à 18 Gt de CO2.) selon le document de travail de 2021 du groupe de réflexion France Stratégie.

Cette contribution est d’autant plus cruciale pour un secteur agricole qui représente 19 % des émissions de GES de la France, selon le rapport Secten de 2020 de la Citepa. Cette pollution regroupe notamment les émissions de méthane de l’élevage et du protoxyde d’azote lié à la fertilisation des sols.

De ce fait, l’interprofession est consciente de la nécessité d’augmenter la production de biomasse afin de compenser les émissions de carbone de la filière. « Il faut réduire les émissions que l’on peut et augmenter les puits de carbone », confirme Thierry Caquet, directeur scientifique de l’Inrae. Selon l’institut, les grandes cultures représentent le plus gros potentiel de stockage de carbone, estimé à 86 %.

Face à ce chantier, il est nécessaire d’avoir une politique publique qui accompagne ces efforts, selon Christophe Buren, président du groupe Vivescia, confronté aux demandes de ses clients en matière de décarbonation. Il en est de même pour l’investissement dans la recherche d’alternatives réellement viables aux phytosanitaires de l’avis des céréaliers. Interpellé sur la question du financement de la transition agroécologique, le ministre de l’agriculture admet que les moyens de l’état sont « limités et à crédit » tout en rappelant l’importance de la planification sur le long terme au travers de la la loi d’orientation agricole.