Accéder au contenu principal
Impact du Covid-19

Les agriculteurs-restaurateurs oubliés des aides


TNC le 25/02/2021 à 15:17
fiches_tableFerme

Si les restaurants ont accès à un certain nombre d’aides pour leur permettre de surmonter les fermetures forcées et prolongées liées à la crise sanitaire, les agriculteurs qui ont une activité de restauration à la ferme, sans que cette activité ne soit séparée juridiquement de l’activité agricole, ne sont pour le moment éligibles à aucun des dispositifs existants.

« Agriculteur-restaurateur en détresse », c’est le titre d’un reportage d’Édouard Bergeon, réalisateur du film Au nom de la Terre, chez Maud et Benoit Millet, deux agriculteurs du Cher. Installé à Mornay-sur-Allier, le couple, qui a connu plusieurs années de galère, avait réussi à équilibrer les comptes grâce à une activité de restauration ouverte trois jours par semaine sur la ferme.

Malheureusement, la crise sanitaire et la fermeture des restaurants qui s’en est suivi a entraîné l’arrêt forcé de cette activité qui générait des bénéfices. Et si les restaurateurs peuvent aujourd’hui bénéficier d’un accompagnement financier dans le cadre du plan de relance, Maud et Benoit, dont l’activité de restauration n’est pas juridiquement séparée du Gaec, ne peuvent pas y prétendre puisque l’activité agricole, principale, n’a pas connu de baisse de chiffre d’affaires assez significative.

Une réponse « au cas par cas »

Cette difficulté est commune à un certain nombre d’entreprises en multi-activités et qui ont « une activité ouverte qui génère du chiffre d’affaires mais peu de résultat pendant que celle qui les faisait vivre a été fermée administrativement », résume Loïc Kervan, député du Cher (Agir Ensemble). Interpellé par le reportage d’Édouard Bergeon, l’élu a porté cette question auprès du gouvernement le 9 février dernier.

Pour le ministre délégué en charge des Comptes publics, Olivier Dussopt, la multi-activité pose en effet « une difficulté en matière de droit », car soit les activités sont confondues au sein d’une même structure, soit l’activité principale ne relève pas du champ de l’éligibilité. Néanmoins, des adaptations sont possibles, a-t-il assuré dans sa réponse à Loïc Kervan. Ainsi, 15 % des entreprises aidées aujourd’hui ne seraient normalement pas éligibles si l’on s’en tient à leur seul code APE, précise-t-il. La DGFIP aurait ainsi reçu pour consigne de considérer l’activité principale, quel que soit le code juridique.  

Cependant, « il reste des cas comme celui que vous évoquez », a reconnu le ministre. Aucun dispositif supplémentaire ne sera mis en place pour y répondre, par crainte « d’effet d’aubaine pour d’autres secteurs », explique-t-il, en revanche les dossiers seront étudiés « au cas par cas » pour permettre aux entreprises comme l’exploitation agricole de Maud et Benoit Millet de bénéficier d’un accompagnement financier. 

Du « cas par cas » qui doit obliger les agriculteurs concernés à se rapprocher d’un interlocuteur du service des impôts. Même pour ceux qui ont fiscalement séparé leurs activités. En témoigne Isabelle Bonnard, agricultrice gérant la ferme auberge de la p’tite poule rousse, à Doizieux dans la Loire : En ayant l’activité d’auberge fiscalement déclarée en BIC (Bénéfices industriels et commerciaux) mais juridiquement rattachée à l’activité agricole principale, elle a dû défendre sa situation auprès de son inspecteur des impôts pour finalement bénéficier d’aides.

Entreprendre la démarche peut en valoir la chandelle : les quelques milliers d’euros obtenus permettront de compenser partiellement l’absence de chiffre d’affaires depuis la fermeture de l’établissement.