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Alimentation, climat

Le PDG de Danone souhaite des états généraux « tous les ans »


AFP le 08/10/2020 à 10:00

Le PDG de Danone Emmanuel Faber souhaite la tenue d'états généraux de l'alimentation « tous les ans » pour faire évoluer les relations commerciales tendues entre producteurs et distributeurs, tout en affrontant la transition alimentaire, écologique et climatique.

Alors que se préparent les difficiles négociations commerciales annuelles entre producteurs agroalimentaires et grandes centrales d’achat de la distribution fixant les prix des produits pour l’année à venir, le PDG de Danone s’est déclaré mardi favorable à une « révision annuelle » des états généraux (Égalim), qui avaient débouché sur la loi Alimentation promulguée le 1er novembre 2018.

En France, malgré cette loi, « il est très difficile de valoriser nos produits dans la grande distribution », a-t-il fait valoir lors d’une audition devant la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale.

Malgré un encadrement des promotions et une interdiction de la revente à perte inscrites dans la loi dite Égalim, la distribution, également sous pression avec la crise sociale liée à l’épidémie de Covid-19, mise plus que jamais sur les prix bas. Mais elle est accusée de ne pas tenir compte des coûts de production des agriculteurs, certaines filières, notamment dans l’élevage, continuant de travailler à perte. Le ministre de l’agriculture Julien Denormandie avait admis début septembre que deux ans après son adoption, la loi n’avait « pas encore atteint » son objectif d’améliorer les revenus des producteurs.

Le PDG de Danone, partisan affiché d’une montée en gamme de l’agriculture et de l’alimentation, souhaiterait notamment « plus de transparence » sur les « contrats uniques avec la grande distribution » dont les centrales d’achat ne sont pas basées sur le sol français.

Prenant l’exemple de la crise laitière de 2015, il s’est réjoui que les industriels se soient alignés sur le prix plus généreux payé par Danone avant les États généraux, pour acheter leur lait aux quelque 2 000 éleveurs qui travaillent avec lui. « Mais je ne considère pas qu’on soit au bout du chemin », a-t-il souligné.

Danone représente 4 % de la collecte de lait en France.

« Choix de société »

 « D’une manière générale, nous ne payons pas en moyenne le véritable coût de l’alimentation en France, en Europe. Et aux États-Unis encore moins », a-t-il martelé. « En remettant les citoyens et les parties prenantes autour de la table pour déterminer ce qu’est le projet alimentaire, on va finir par s’apercevoir que 350 euros la tonne de lait, ce n’est peut-être pas assez pour prévoir l’avenir. »

« La vraie question, c’est un choix de société », a-t-il lancé devant les députés : « Est-ce qu’on veut de la junk food – et on est bien contents, on va remplir nos caddies et changer d’iPhone tous les deux ans – ou est-ce qu’on veut manger correctement ? »

Il plaide aussi pour la mise en place d’une agriculture « régénératrice des sols », qui permette aussi bien d’améliorer la qualité des aliments que de s’adapter au changement climatique.

« Il faut absolument qu’à l’intérieur du plan de relance, on aille au bout de la monétisation du carbone dans le sol » pour les agriculteurs, a-t-il lancé. Les agriculteurs, qui améliorent la capacité du sol à absorber le carbone, devraient ainsi pouvoir être rémunérés et revendre des droits carbone, par exemple aux compagnies aériennes qui en ont besoin.

Si l’agriculture émet « autant » de carbone que l’industrie, elle peut aussi faire « rentrer le carbone dans le sol », a-t-il relevé. À condition d’avoir des réformes de fond, et pas seulement des aides ponctuelles aux filières en difficulté.

« Si on ne touche pas aux éléments de long terme, il n’y aura de toutes façons plus de betteraves dans le nord de la France pour des raisons pédoclimatiques (liées au climat interne du sol NDLR) dans 30 ans, comme il n’y aura plus de maïs au sud d’une ligne entre La Rochelle et Valence » a-t-il dit.

« Sans la santé des sols, il n’y aura plus d’agriculture dans 30 ans, et 30 ans c’est l’échelle à laquelle aujourd’hui s’endettent les jeunes agriculteurs quand ils s’installent, donc c’est maintenant qu’il faut repenser ces modèles-là. »

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