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Europe

Le Pacte vert, enjeu de tractations post-électorales au Parlement européen


AFP le 13/06/2024 à 10:15
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Quel sera l'avenir du Pacte vert ? (© Dušan Cvetanović de Pixabay)

L'avenir du « Pacte vert » est une pierre d'achoppement dans les tractations pour reconstituer au Parlement européen la coalition entre les socialistes, les libéraux et des conservateurs devenus rétifs aux politiques environnementales sous la pression d'une extrême droite renforcée.

Les groupes PPE (droite), Renew (libéraux) et S&D (sociaux-démocrates) ont conservé à eux trois la majorité absolue mais ils doivent s’entendre sur un « pacte de coalition » en vue de valider ensemble, probablement mi-juillet, le nom de la personnalité politique qui sera à la tête de la nouvelle Commission européenne -Ursula von der Leyen, issue du PPE, étant candidate à un deuxième mandat.

Si les coalitions alternatives seront ensuite possibles au cas par cas selon les textes, notamment avec l’extrême droite qui a réalisé une forte poussée, cet accord doit faire figure de feuille de route pour les cinq ans à venir.

Les socialistes font du climat un enjeu crucial. « Nous travaillerons à façonner le prochain mandat sur la base de notre manifeste : pas de pause du « Green Deal » », un tentaculaire paquet de législations environnementales resté inachevé, a averti l’Espagnol Pedro Marques, vice-président de S&D.

« Pas de blanc-seing »

« On ne va pas donner un blanc-seing à une candidate PPE qui n’aurait pas pris des engagements sur un certain nombre de nos priorités, plusieurs thèmes autour du « Green Deal » devront être sur la table des discussions », renchérit Pascal Canfin, le président (Renew) de la commission Environnement sortante.

Fin de la vente des voitures thermiques neuves en 2035, déforestation, marché du CO2, taxe carbone aux frontières… après avoir soutenu des avancées majeures, le PPE s’est ensuite employé à édulcorer, voire rejeter, plusieurs textes, notamment liés à l’agriculture, dénonçant le « fardeau » des règles pesant sur les entreprises.

Le renforcement des conservateurs et de l’extrême droite « pourrait compliquer un programme vert ambitieux et, pire, engager une déréglementation », après le détricotage ces derniers mois des conditions en matière de protection de l’environnement posées à l’octroi des aides agricoles, s’alarme Anaïs Berthier, de l’ONG ClientEarth.

Plusieurs législations déjà votées comprennent des clauses de révision, l’objectif climatique 2040 doit être négocié et une nouvelle politique agricole définie.

Le PPE, pour l’heure, insiste sur la mise en oeuvre des politiques déjà adoptées et sur le souci de compétitivité des entreprises.

« Nous programme contient un engagement très clair (…) sur l’objectif de neutralité climatique. La question est comment y parvenir : de manière pragmatique, ouverte aux technologies, avec des investissements et des innovations », a insisté Ursula von der Leyen lundi.

Elle avait ouvert la porte à l’autorisation après 2035 de « carburants de synthèse » automobiles réclamés par Berlin, au grand dam de Renew et de S&D.

« Nous sommes le parti des agriculteurs », avait également proclamé le président du PPE Manfred Weber face aux rassemblements de tracteurs, appelant à « tenir compte des préoccupations des gens ».

Défections

« Si l’Europe ralentit sur le Pacte vert, on est certain de perdre la compétition lancée par la Chine et les Etats-Unis sur les technologies décarbonées (…). Le monde de l’industrie est totalement sur cette ligne, une partie très significative du PPE aussi », observe M. Canfin.

Sur l’agriculture, une pomme de discorde persistante, « il faut assurer l’équité des règles commerciales (pour les importations agricoles) et faire en sorte que la contrainte soit partagée par toute la chaîne de valeur et l’industrie agroalimentaire pour ne pas peser sur les seuls agriculteurs (…). Je pense que le PPE peut être d’accord », plaide-t-il. Il prévoit néanmoins « des discussions serrées, dont on ne peut préjuger de l’issue ».

Le PPE évoque de possibles « compromis », d’autant qu’Ursula von der Leyen n’est pas certaine d’obtenir au moment du vote – à bulletins secrets – le soutien de l’ensemble des eurodéputés PPE, Renew et S&D.

Pour compenser ces défections et garantir sa majorité, elle pourrait s’assurer le soutien du groupe des Verts, en dépit de leur déroute électorale, voire miser sur l’appui du parti post-fasciste de la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni, que Mme von der Leyen avait érigée en partenaire potentiel. Un scénario risqué, puisque socialistes, libéraux et écologistes rejettent tout rapprochement avec l’extrême droite.

« Si vous recherchez la stabilité et des politiques responsables, chercher parmi les multiples courants de l’extrême droite n’est pas une option » a averti dimanche le président des Verts Philippe Lamberts. Pour lui, les écologistes sont « prêts à prendre leurs responsabilité »… si la future Commission promet d’« approfondir le Green Deal ».