En amont du Sommet de l’élevage

Le Modef exhorte l’État à agir pour sauver l’élevage, renouveler les éleveurs


TNC le 02/10/2023 à 14:44
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« Il faut redonner à l’élevage la place qu’il doit occuper, ou il disparaîtra au détriment du consommateur et du citoyen », insiste le syndicat. (©Natalja, Adobe Stock)

Pour le Sommet de l’élevage, le syndicat des exploitants familiaux dresse un constat alarmant de la situation de l’élevage en France et appelle le gouvernement à prendre les mesures qui s’imposent et qu’il propose en faveur du renouvellement des générations d’éleveurs.

Avant le Sommet de l’élevage 2023, qui s’ouvre mardi 3 octobre, le Modef alerte, une nouvelle fois, les pouvoirs publics sur « la crise grave et longue » que traverse depuis de nombreuses années l’élevage français, et qui touche toutes les productions, en particulier les filières bovins lait et viande, avec une très forte décapitalisation des cheptels.

Redonner à la filière sa place

« En 10 ans, nous avons perdu 100 000 vaches allaitantes et 80 000 vaches laitières, rappelle-t-il en ouverture de la conférence organisée par le syndicat en amont du salon. D’où une dépendance encore accrue de notre pays aux imports, de viande bovine notamment. »

Les exploitants familiaux exhortent donc à la reconquête de notre indépendance et souveraineté alimentaire, nécessaire pour redresser la situation des productions animales. Et, par conséquent, désapprouvent les traités de libre-échange, au premier rang desquels celui entre l’UE et la Nouvelle-Zélande.

Non à trop d’importations et aux traités de libre-échange.

« Il faut redonner à l’élevage en France la dimension qu’il doit occuper, sinon il disparaîtra au détriment du consommateur et du citoyen, insistent-ils. N’oublions pas qu’il est indispensable pour nourrir la population et lutter contre le changement climatique. Le pâturage est vertueux pour l’environnement : un hectare de prairie capte plus de carbone qu’un hectare de forêt. Trop d’importations, en revanche, polluent la planète. »

Agir sur les prix et le revenu

Le nerf de la guerre est bien sûr le revenu des éleveurs, et donc les prix du lait et de la viande qui leur sont payés. Et c’est encore plus vrai pour « les fermes familiales, souvent de taille petite à moyenne », appuie le Modef qui juge qu’ils sont encore insuffisants, malgré les augmentations observées, par rapport aux coûts de production toujours très élevés.

« On ne rentrera pas dans ce jeu macabre, qui consiste à faire croire que comme les prix se sont améliorés, les éleveurs ne sont plus en difficulté. Venez sur le terrain voir combien vivent en dessous du Smic ! », lance-t-il.

Des hausses de prix qui ne compensent pas l’augmentation des coûts de production.

« L’alimentation animale a augmenté de 25 % et le carburant de près de 60 %, sans parler des hausses du prix de l’électricité, de l’indice du fermage, de la taxe foncière, etc. C’est pourquoi nous nous opposons à la fin de la défiscalisation du GNR. Malheureusement, nous sommes un peu seuls à manifester notre désapprobation. » Le syndicat demande aussi un prix garanti aux 10 000 l.

Ralentir le vieillissement des producteurs

Quant aux prix payés aux producteurs, ils doivent « prendre en compte les coûts de production et le travail des éleveurs, au lieu d’être imposés par l’industrie agroalimentaire et les GMS ». « Il faut une nouvelle loi agricole qui fixe des prix planchers par production et mette en place des coefficients multiplicateurs au niveau des grandes surfaces », ajoute le Modef.

« Le gouvernement reste attentiste. Or la politique agricole conduite à l’échelle française et européenne – la répartition des fonds alloués entre autres – est destructrice en termes d’emplois », déplore-t-il, citant encore une fois « le chiffre alarmant de 100 000 paysans en moins en 10 ans ». Le vieillissement des éleveurs bovins est inquiétant, selon le Modef, en particulier dans le Massif central. 52 % des producteurs allaitants et 49,5 % des laitiers ont plus de 50 ans. Un éleveur de bovins viande sur six, cessant son activité, n’est pas remplacé.

Prêts à taux 0 et retraite à 1 Smic

Alors en plus des demandes déjà mentionnées, les exploitants familiaux appellent l’État à mener des actions concrètes pour favoriser le renouvellement des générations en élevage, auprès :

  • des futurs agriculteurs

– prêts à taux 0 plafonnés à 30 000 €

– limite d’âge de 45 ans pour une installation aidée

(d’où l’emploi du terme « nouvel installé » à la place de « jeune agriculteur »)

– contrôle des structures dès le premier hectare

– parrainage renforcé entre agriculteurs entrants et sortants

Améliorer les conditions de travail et de vie.

« Si l’on veut attirer des jeunes vers l’élevage, il faut également améliorer les conditions de travail et de vie, pour suivre les évolutions en cours dans le reste de la société. Par exemple, en facilitant le remplacement sur les exploitations et redéveloppant des services publics en milieu rural », ajoute le Modef.

  • des cédants : pension de retraite à 1 Smic net minimum

Une pension correspondant aux richesses produites.

Retrouver le respect

Ainsi, les futurs retraités chercheraient peut-être moins à compenser les faibles montants perçus, ce qui pourrait « limiter le prix des reprises de ferme ». Ces derniers doivent cependant « rester maîtres » dans la fixation de ce prix, estime le syndicat qui suggère par ailleurs, pour davantage d’équité avec les autres secteurs, de supprimer le régime spécifique agricole au profit du régime général.

« Le niveau de retraite doit correspondre à la richesse que les paysans ont créée pour leur pays pendant leur carrière. Ce serait une reconnaissance de leur travail », résume-t-il.

Retrouver la reconnaissance et respect des concitoyens est enfin primordial, pour les éleveurs en place comme ceux qui reprendront le flambeau. « ll y en a assez d’être traînés dans la boue », martèlent les exploitants familiaux.

Autant de points sur lesquels, ils réclament « l’engagement des politiques, pour les producteurs comme les consommateurs » et ils sauront le leur rappeler, à partir de demain, à Cournon-d’Auvergne. « Qu’est-ce qui coûtera le plus cher, ces mesures ou importer toujours plus ? », conclut le Modef.