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Aléas climatiques

L’assurance récolte : trop peu d’assurés, dans l’attente de la réforme de 2023


AFP le 07/06/2022 à 14:52
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Les accidents climatiques sont de plus en plus violents et fréquents, et pourtant, seuls 30 % des céréaliers, 20 % des viticulteurs et moins de 5 % des arboriculteurs sont assurés, relève la FNSEA. (©Olivier Coste/Twitter)

« C'est trop cher », « ça ne couvre pas toutes mes pertes » : les agriculteurs, en première ligne face aux aléas climatiques, rechignent encore à s'assurer contre la perte de leurs récoltes, alors que de nouveaux dispositifs mieux adaptés entreront en vigueur début 2023.

Une vigne hachée, un blé plié par des grêlons de la taille de balles de ping-pong : après un nouvel épisode climatique d’une extrême violence samedi dernier, certains agriculteurs ont perdu le travail d’un an en quelques minutes.

Les accidents climatiques – sécheresse, gel ou grêle – sont de plus en plus violents et fréquents, et pourtant, seuls 30 % des céréaliers, 20 % des viticulteurs et moins de 5 % des arboriculteurs sont assurés, relève le syndicat majoritaire, la FNSEA.

Pourquoi si peu d’assurés ?

Actuellement deux dispositifs complémentaires s’appliquent : le régime de calamité agricole et le régime assurantiel. Le régime public de calamité, en vigueur depuis les années 1960 et cofinancé par l’Etat et la profession, peut être déclenché après un épisode climatique sévère. Mais il exclut certains pans de l’agriculture (viticulture et grandes cultures) et ses délais d’indemnisation sont jugés trop lents.

« Pour bénéficier de la calamité, il faut justifier 30 % de pertes de production et une perte au moins équivalente du produit brut d’exploitation, calculé sur l’ensemble de l’exploitation : ce qui est très compliqué quand on a plusieurs activités et des cultures touchées différemment », explique Joël Limouzin, en charge des urgences à la FNSEA.

Quant au système assurantiel, privé mais subventionné à 65 % par l’Etat, il est encore peu souscrit par les agriculteurs. Il est jugé « trop cher » au regard de la couverture potentielle des pertes, qui est estimée trop basse.

« L’assurance souscrite par un viticulteur de Gascogne, touché par la grêle ce week-end, a permis de garantir 40 hectolitres à l’hectare, pour une production estimée à 90 c’est très faible », explique Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA.

Que prévoit la réforme ?

« La loi assurance-récolte, opérationnelle en 2023, permettra à plus d’agriculteurs de s’assurer pour couvrir mieux leurs besoins, avec 300 millions d’euros de solidarité nationale en plus par an », doublant le budget, a annoncé le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, au chevet des viticulteurs girondins et gersois ces derniers jours.

Face à un système unanimement considéré comme « à bout de souffle », le Parlement a adopté en février dernier une réforme de l’assurance récolte, qui entrera en vigueur le 1 er janvier 2023.

Ce texte remplace les deux dispositifs actuels, et crée « un régime universel d’indemnisation » à trois étages : un premier niveau relève de l’agriculteur, qui assumera seul les pertes jusqu’à un seuil de franchise (fixé à 20 %) ; un deuxième niveau relève de l’assureur privé (jusqu’à 50 %, avec une prise en charge d’une large partie des souscriptions via les aides de la Politique agricole commune), et un troisième niveau, qui mobilise la solidarité nationale, avec des fonds publics pour répondre à des situations de catastrophe.

Un guichet unique est créé pour simplifier les démarches. Et le texte prévoit la création d’un pool d’assureurs. Y adhérer serait obligatoire pour les assureurs du secteur, permettant ainsi un partage de données et une mutualisation des risques, pour établir une prime d’assurance la plus juste possible.

Mesures immédiates

Ce dispositif est plébiscité par la FNSEA, avec toutefois une réserve de taille. « Actuellement, les indemnisations seront calculées selon une « moyenne olympique », c’est-à-dire sur le rendement de l’exploitation des cinq dernières années. Or la succession des calamités a fait baisser les prises en charge », explique Jérôme Despey.

« Nous demandons au gouvernement de revoir ce système de « moyenne olympique », qui doit être modifié au niveau communautaire. Si on ne le fait pas, on perdra une large partie du bénéfice de la réforme actuelle », estime-t-il.

En attendant l’entrée en vigueur de la nouvelle assurance récolte, Marc Fesneau s’est engagé à « travailler sur les prêts garantis par l’État (PGE) », qui devraient être prolongés, et a promis du « cas par cas » pour tenir compte de toutes les situations, avec ou sans assurance. La FNSEA demande, elle, un effort avec une baisse des impôts fonciers et des cotisations sociales, pour sortir de ce « cauchemar ».