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Sécheresse, engrais, assurance

L’AGPB soulagée pour la récolte 2022 mais inquiète pour 2023


TNC le 08/09/2022 à 17:52
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Éric Thirouin et Philippe Heusele, président et secrétaire général de l'AGPB, ont fait le tour des sujets d'actualité pour les céréaliers ce 8 septembre. (©TNC)

Si les cultures d’hiver ont eu des rendements globalement satisfaisants malgré la sécheresse, l’AGPB alerte sur la hausse du prix des intrants qui fait craindre un effet ciseau, avec des coûts de productions élevés et un prix du blé qui redescend. L’organisation s’inquiète également des arbitrages à venir sur l’assurance récolte, alors que les agriculteurs ont besoin d’outils performants pour mieux surmonter les crises.

« On se rend compte que l’on a évité le pire », a expliqué Philippe Heusele, secrétaire général de l’AGPB, en présentant les dernières estimations de rendement le 8 septembre. Avec 71,6 q/ha, le blé tendre reculerait seulement de 1,4 % par rapport à la moyenne quinquennale, ce qui ne doit pas éclipser une très grande hétérogénéité entre les territoires, particulièrement dans les zones intermédiaires. Le rendement est satisfaisant en orge d’hiver (69,0 q/ha) et en orge de printemps (61,3 q/ha). En revanche, le blé dur a été plus impacté, avec un rendement de 50,7 q/ha, inférieur de 8,5 % à la moyenne quinquennale.

Au niveau qualitatif, « on a un panel de qualités qui devrait répondre à l’ensemble des débouchés » pour le blé tendre, ajoute Philippe Heusele, avec des blés secs, des bons poids spécifiques, mais des taux de protéines qui ne sont pas toujours au rendez-vous. « Le prix et la disponibilité de l’azote, qui était déjà une question au printemps, a peut-être conduit certains agriculteurs à lever le pied sur les apports en fin de cycle », indique le secrétaire général de l’AGPB.

La réforme de l’assurance, pas à la hauteur ?

Néanmoins, les aléas climatiques se sont succédés ces dernières années, et risquent de se répéter plus fréquemment à l’avenir. Pour renforcer la capacité des agriculteurs à faire face aux chocs, l’AGPB place beaucoup d’espoirs dans la réforme de l’assurance récolte, mais s’inquiète de la tournure des dernières discussions.

Aujourd’hui, le gouvernement ne semble pas disposé à abaisser le seuil de déclenchement à 20 % et à porter le taux de subvention à 70 %, comme autorisé dans le règlement européen Omnibus. Si cela constituerait possiblement un coût supplémentaire, ces paramètres seraient « encourageants pour pousser les agriculteurs à s’assurer, ce qui est vertueux aussi pour les finances de l’État», souligne Éric Thirouin, président de l’AGPB. « On attend que l’enveloppe dans la loi de finances soit à la hauteur des annonces. Sinon, l’échec sera grave pour le monde agricole pour plusieurs années », ajoute-t-il.

Forte inquiétude sur le prix et la disponibilité des engrais

D’autant que de nombreuses inquiétudes demeurent. « On va constater une amélioration du revenu des céréaliers, mais qui était vraiment nécessaire. Après huit années économiquement très mauvaises, on a besoin de reconstituer des forces pour affronter la crise des moyens de production », précise Éric Thirouin, qui évoque un revenu moyen autour de 50 000 € pour 2021, contre 6 000 €/an les années précédentes.

Cependant, la flambée des coûts de production va continuer à peser : « aujourd’hui, on nous propose 290-295 €/t, avec un prix de revient à 260 €/t, on n’est pas loin de l’effet ciseau, c’est notre inquiétude pour l’année 2023 », explique-t-il.

« Si le prix du blé a été multiplié par 1,5, celui de l’azote a été multiplié par 3 », signale Cédric Benoist, secrétaire général adjoint de l’AGPB. Pour une exploitation de 150 ha, le budget engrais peut ainsi représenter entre 85 000 et 90 000 €, contre 25 000 à 28 000 € habituellement. Avec l’augmentation du prix du GNR, « aujourd’hui les agriculteurs ne savent plus où ils en sont en matière de coût de production », explique-t-il. Les achats de morte saison ont deux mois de retard par rapport à l’année dernière, indique l’AGPB, les agriculteurs hésitant à acheter compte tenu du prix. Le Conseil de l’UE doit statuer prochainement sur une éventuelle suspension des droits de douane, ce qui pourrait faire baisser le prix d’achat.

Au-delà du prix, la question de la disponibilité se pose, avec des fabricants qui préfèrent parfois arrêter la fabrication d’engrais compte tenu du prix trop élevé du gaz. « Il y aura un effet couperet vraisemblablement au printemps, cela aura des conséquences sur la quantité mais aussi la qualité », prévient Cédric Benoist.