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Bien-être animal

La valorisation, un impératif pour investir dans le bien-être des animaux


TNC le 20/09/2021 à 14:01
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Si les attentes sociétales sont fortes en matière de bien-être animal, les éleveurs, bien disposés à aller en ce sens, ne peuvent cependant pas investir sans valorisation de leurs pratiques ni visibilité à moyen et long termes. La filière, jusqu’au consommateur, doit donc être en mesure de répercuter ces surcoûts.

De plus en plus, le bien-être des animaux d’élevage est un sujet d’attention de la part des consommateurs français. Néanmoins, les pratiques qui améliorent le confort des animaux ne sont pas toujours bien identifiées, sans label reconnu. Or, pour réaliser les aménagements nécessaires à l’amélioration du bien-être dans les élevages, « le plus gros problème ce n’est pas le coût, c’est la valorisation. On est prêts à faire tout dans la mesure où on trouve le marché », estime Thomas Guégan, producteur de porc et de viande bovine dans le Morbihan.

En amont du Space, l’Association française des journalistes agricoles (Afja) a réuni des éleveurs pour échanger sur l’amélioration du bien-être animal, le 13 septembre, à Rennes. Pour Dominique Grasset, il faut effectivement identifier un segment de marché. « Il y a un marché pour le poulet conventionnel qui a bénéficié de lumière naturelle, d’une moindre densité dans les poulaillers », souligne cet éleveur de volailles en conventionnel et bio, président de Galliance, le pôle volailles de Terrena. Cependant, le surcoût pour le consommateur ne doit pas excéder 20 %, ajoute-t-il.

Jongler avec des injonctions contradictoires

Agissant souvent en réaction aux demandes de la société, les éleveurs doivent « anticiper, d’autant que l’on sait bien que, quand des normes sont imposées, tout devient plus cher », précise Marcel Denieul, président du Space. Cependant, « pour anticiper, il faut être sûr d’être dans la bonne direction », à une époque où les attentes du consommateur évoluent bien plus vite que ne s’amortissent les investissements dans le monde agricole.

Pour autant, l’élevage doit montrer qu’il prend en compte ces problématiques, même s’il est difficile de se faire entendre face à des associations comme L214. « On manque de temps et d’argent face à des opposants qui ont les deux », regrette Thomas Guégan.  

Et les interprofessions n’ont pas davantage de poids. « On n’est pas très bons, collectivement pour communiquer, on reste assimilés à des défenseurs d’entreprises, à des gens qui veulent gagner de l’argent sur le dos des animaux. Je pense que c’est plutôt à chacun de nous, éleveur, de prendre la parole », constate Dominique Grasset.  

Concilier bien-être et revenu : l’exemple de l’abattage mobile

« On entend beaucoup parler de bien-être animal, mais les conditions de vie de l’éleveur, on s’en fout pas mal », s’insurge de son côté Émilie Jeannin. Or, « il n’y a pas de bien-être animal s’il n’y a pas de bien-être de l’éleveur, et pour ça, un revenu décent, c’est important », ajoute-t-elle.

Installée en Côte d’Or, l’éleveuse a longuement bataillé pour mettre en place son projet d’abattoir mobile à la ferme, dans « un monde de la viande où les lobbys sont puissants ». S’il lui a fallu cinq ans pour aboutir, elle a persévéré, convaincue de répondre à une forte demande des éleveurs qui souhaitent éviter à leurs animaux le stress du transport et de l’abattoir.

L’abattoir mobile est opérationnel depuis peu et se déplace, pour l’instant en Côte d’Or et en Saône-et-Loire, chez les éleveurs qui en font la demande. « Nous ne proposons pas une prestation d’abattage, nous abattons et commercialisons la viande, sous la marche le Bœuf Éthique », explique Émilie Jeannin. Malgré l’intérêt des éleveurs, le modèle économique était trop difficile à trouver pour la simple prestation d’abattage, compte tenu des déplacements (une ferme par jour) et de la faible cadence du camion (maximum six bovins par jour, quand un gros abattoir peut aller jusqu’à 300 bêtes par jour), qui auraient fortement renchéri les coûts. Or, pour Émilie, « l’objectif, c’est de réduire les intermédiaires pour une meilleure rémunération des éleveurs ». Le Bœuf Éthique se base ainsi sur les indicateurs de coûts de production fournis par Interbev. Et « le tarif doit convenir », constate Émilie Jeannin, puisque son calendrier est plein jusqu’aux vacances de décembre…