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Escroquerie à la viande chevaline

La responsabilité de vétérinaires examinée au procès


AFP le 10/06/2022 à 09:19

(©GettyImages)

Le rôle de certains vétérinaires au sein d'une vaste escroquerie européenne à la viande chevaline a été examiné jeudi devant le tribunal correctionnel de Marseille à travers le cas d'un praticien belge qui travaillait avec plusieurs fournisseurs de bêtes.

Luc Rappe, vétérinaire belge de 62 ans, est soupçonné d’avoir antidaté des feuillets de traitements médicamenteux et remis 154 documents vierges à des fournisseurs français qui alimentaient le principal mis en cause dans la procédure, Jean-Marc Decker, un important négociant belge de chevaux. Objectif : permettre d’abattre ces animaux et faire entrer leur viande, normalement impropre à la consommation, dans le circuit commercial.

Lors de l’instruction, M. Decker s’était notamment défendu en se retranchant derrière les contrôles vétérinaires effectués à différents stades du parcours des chevaux.

A compter du 1er janvier 2010, selon une réglementation européenne du début des années 2000, la présentation d’un feuillet en règle était devenue nécessaire pour abattre un équidé destiné à la consommation.

« On n’a jamais été prévenu », a protesté le vétérinaire à la barre, accusant les haras nationaux d’avoir également attribué des tels documents, « sans aucune connaissance du cheval ou de son passé médical », avant l’entrée en vigueur de la règle en 2010.

Le Dr. Rappe, l’un des 18 prévenus à ce procès, dont quatre ressortissants belges et deux Néerlandais, est poursuivi pour complicité de tromperie entraînant un danger pour la santé de l’homme et complicité d’escroquerie en bande organisée, ainsi que de falsification de documents et de complicité de faux.

« En France, je ne les antidatais pas et les animaux passaient à l’abattoir », s’est défendu le vétérinaire, en évoquant les faits qui lui sont reprochés entre 2010 et 2013. Il a cependant reconnu avoir antidaté les feuillets d’animaux à destination de la Belgique.

« Je ne vois pas pourquoi, s’ils n’étaient pas dangereux en France, ils seraient plus dangereux en Belgique, juste parce qu’ils ont été plus rapides pour appliquer une loi », a-t-il ajouté, soulignant l’application inégale selon les pays de la réglementation européenne.

« Ça n’avait pas d’importance parce que ce n’était pas appliqué ? », a donc lancé la présidente du tribunal, au cours d’un interrogatoire agité. « En gros oui », a répondu le vétérinaire : « Pendant deux ans j’ai inséré des feuillets comme ça et aucun cheval n’a été saisi ». « On ne peut pas toujours reporter la responsabilité sur autrui », a fait observer la magistrate, « on peut aussi assumer la sienne ».

Le négociant Jean-Marc Decker et son principal partenaire commercial belge doivent être entendus à la reprise de la séance lundi, dans un procès qui doit durer jusqu’au 24 juin.