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Modèles agricoles

La Confédération paysanne dénonce une réindustrialisation de l’agriculture


TNC le 19/12/2019 à 16:39
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Le sénateur Joël Labbé, Nicolas Girod (porte-parole de la Confédération paysanne) et Véronique Marchesseau (secrétaire générale de la Confédération paysanne) dénoncent une industrialisation grandissante de l'agriculture. (©TNC)

La Confédération paysanne, qui combat depuis toujours l’agriculture industrielle, s’alarme d’une tendance à la réindustrialisation des projets agricoles, en lien avec le grand plan d’investissement du Gouvernement. Le syndicat, qui organisait une conférence de presse le 17 décembre avec le sénateur Joël Labbé et des organisations de la société civile, demande une réorientation des politiques publiques vers l’agriculture paysanne, gage de durabilité et de dynamique territoriale.

La Confédération paysanne, qui défend l’agriculture paysanne et ses implications positives en matière d’emploi et de dynamique de territoires, a alerté le 17 décembre sur le processus de réindustrialisation de l’agriculture qu’elle observe. « Suite au grand plan d’investissement, il y a une frénésie, en Bretagne, sur la réindustrialisation de la filière volaille notamment », a souligné Nicolas Girod, porte-parole du syndicat agricole, à l’occasion d’une conférence de presse organisée aux côtés du sénateur Joël Labbé, en présence de représentants de la FNE, du Réseau Action Climat, et du Syndicat national de l’enseignement technique agricole public (Snetap-FSU).

À travers les six thématiques de l’agriculture paysanne – autonomie, qualité des produits, transmissibilité, répartition, développement local, travail avec la nature – la Confédération paysanne a ainsi défini une grille de lecture qui permet d’analyser si une exploitation est industrielle ou non. Car pour assurer l’avenir de l’agriculture, les deux modèles ne sont pas compatibles, estime le syndicat : « cette capacité à descendre les prix en jouant sur les volumes impacte les paysans voisins », explique Nicolas Girod. Sans compter la perte de sens liée à la simplification du travail, et la difficulté à transmettre les outils quand le capital est trop important, précise-t-il.

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Revendiquer des politiques publiques mieux ciblées

Pour illustrer ces arguments, la Conf’ prend l’exemple de projets à combattre, comme le poulailler industriel de Langoëlan, dans le Morbihan, qui passe de 4 500 m2 à 9 000 m2 pour deux associés. Avec un niveau d’endettement très élevé, cette exploitation sera difficilement transmissible. Et pour Véronique Marchesseau, secrétaire générale du syndicat, la liste des conséquences négatives est longue : pas de cohérence environnementale puisque les poulets seront nourris par des céréales et du soja importés, saturation du marché intérieur, image bas de gamme du produit, pas d’autonomie (exploitation intégrée)… Surtout, ce projet est subventionné par le conseil régional et bénéficie d’une caution publique.

Or, il y a « une centaine de projets en cours qui vont dans ce sens », alerte Véronique Marchesseau, d’où la mobilisation du syndicat, notamment auprès des élus locaux, pour que les subventions publiques soient retirées.

« Il faut remettre au cœur des politiques publiques la transition vers une agriculture paysanne », défend Nicolas Girod, qui poursuit : « l’autonomie non négociable, il nous faut choisir entre agriculture industrielle et agriculture paysanne, c’est un choix de société ».

D’où l’importance de travailler avec des organisations de la société civile. Car si la vision de la Conf’ n’est pas majoritairement soutenue parmi les politiques, « on sait que c’est en travaillant avec les diverses organisations professionnelles et avec la société civile que l’on va pouvoir faire bouger les choses », soutient Joël Labbé. Il soutient, à cet égard la plateforme « Pour une autre Pac », qui répond à ces problématiques et associe largement la société civile à la réflexion. Pour le sénateur du Morbihan, la proposition de rémunérer les agriculteurs pour services environnementaux, que défend la plateforme, est exactement le type de mesure « qui permettra de réorienter l’agriculture ».

Pour Nicolas Girod, ce combat est d’autant plus important dans un contexte de critique sociétale fort. « L’industrialisation a des formes multiples, mais elle aboutit à chaque fois à une perte de sens, ne pas la dénoncer, c’est cautionner l’accaparement des subventions publiques, la disparition progressive des territoires, et des paysans ». Et c’est aussi « donner un boulevard à ceux qui fustigent l’élevage car les productions industrielles seraient allées trop loin : si on combattait ces excès, on ne prêterait pas le flanc à l’agribashing », ajoute le porte-parole de la Confédération paysanne. Pour contrebalancer les discours simplistes sur le monde agricole, il est indispensable de construire davantage de passerelles avec la société, estime-t-il.

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