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Congrès de la CGB

La betterave : de nombreux atouts, à condition de pouvoir encore la produire !


TNC le 09/12/2022 à 11:30
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Franck Sander, président de la CGB, lors de son discours de clôture du congrès, le 8 décembre (©capture d'écran @cgb)

Si la dérogation à l’interdiction des néonicotinoïdes devrait être prolongée pour 2023, les betteraviers de la CGB restent inquiets pour l’avenir, sans solution efficace à partir de 2024, et appellent à prendre conscience des multiples atouts de la betterave à sucre pour l’économie française, mais aussi pour la décarbonation.

Emploi sur les territoires, stockage de carbone, production de biocarburants… Les atouts de la betterave sucrière sont nombreux, et « il faut que les gens mesurent l’impact de notre industrie », a rappelé Olivier de Bohan, président de Cristal Union, à l’occasion du congrès de la CGB le 8 décembre. « Mais ça ne vaut que si on a des betteraves ! », ajoute-t-il.

Au-delà du contexte – entre flambée des coûts de production et tensions sur l’énergie – l’année 2022 s’est avérée décevante pour la betterave, avec des rendements inférieurs à 80 t/ha, heureusement compensés par des prix à la hauteur, au minimum 40 € la tonne. S’il sera nécessaire de maintenir des prix hauts « pour encourager nos planteurs à semer des betteraves et ainsi conserver les outils industriels qui les transforment », a rappelé le président de la CGB, Franck Sander, ce ne sera pas suffisant pour assurer la production dans les années à venir, en l’absence d’alternative efficace aux néonicotinoïdes (NNI).

Pas d’alternative aux NNI en 2024

Car les planteurs sont aujourd’hui dans le flou concernant les moyens de production qu’ils auront à disposition en 2024. Si la ré-autorisation des NNI devrait être acceptée pour 2023, comme l’a confirmé le ministre de l’agriculture dans une vidéo, la recherche n’a pour le moment pas trouvé de solutions convenables. Et si Marc Fesneau se veut rassurant, rappelant que « l’on a encore une année de recherche-innovation devant nous, qui doit permettre d’approfondir certaines pistes », les variétés résistantes à la jaunisse sont aujourd’hui trop faibles en matière de rendement pour être économiquement viables côté planteurs.

Pour Franck Sander, compte tenu du temps nécessaire à la recherche, il apparait indispensable de « prolonger les financements relatifs au PNRI (plan  national de recherche et d’innovation)en les recentrant sur les projets prometteurs au-delà de 2023 », et « continuer à construire la stratégie pour 2024 au cours des prochains mois car les décisions d’assolements seront prises à l’été 2023 ». Une stratégie qui devra prendre en compte toutes les pistes : sélection variétale, chimie, NBT, fonds de compensation…

« Même si l’agriculture a besoin de temps, les décisions politiques doivent accélérer pour compenser ce temps dont on a besoin », explique Olivier de Bohan, pour qui la chute de la production constitue un vrai risque. Avec le déclenchement de la guerre en Ukraine, le vent avait pourtant semblé tourner concernant les orientations politiques, face à l’enjeu renforcé de la souveraineté alimentaire, indique Franck Sander. « On pensait que tout allait s’accélérer, mais au final qu’est-ce qui a été accéléré ? Rien », déplore-t-il. Et même si l’état d’esprit semble évoluer à Bruxelles, comme en témoigne Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, notamment en ce qui concerne le règlement sur l’utilisation durable des pesticides, ces évolutions restent trop lentes au regard des enjeux.

« Les normes sont un coût, et le risque, c’est que les agriculteurs ne puissent plus répondre à la totalité des normes. Soit on sera hors la loi parce qu’on ne saura plus faire, soit on va favoriser l’inverse que ce qui est voulu, on poussera à la restructuration, et il n’y aura que des grosses structures qui pourront faire face », prévient le président de la CGB.

Faire évoluer le regard de la société ?

La société pourrait-elle être un atout dans ce combat ? « L’opinion peut changer très rapidement, regardez par exemple ce qui se passe en ce moment sur le nucléaire », témoigne Jérôme Fourquet, directeur du département « opinion et stratégies d’entreprise » de l’Institut français d’opinion publique (Ifop). D’après une enquête réalisée par l’Ifop pour la CGB, 82 % des Français jugent que la souveraineté alimentaire est aujourd’hui prioritaire. Une prise de conscience qui remonte à la crise Covid, explique l’analyste.

La connaissance des Français vis-à-vis de la filière semble également s’améliorer. Si 68 % des répondants disent que la culture est destinée à la production de sucre, 32 % sont également conscients qu’elle permet de produire des biocarburants, et 27 %, de l’alimentation du bétail. Quant au maintien de cette production dans les territoires, 90 % y sont favorables. Enfin, l’adhésion à la reconduction de l’autorisation d’utilisation des néonicotinoïdes ne fait évidemment pas l’unanimité, mais 46 % y seraient favorables, contre 36 % opposés (18 % des répondants ne savent pas). « Vous avez aujourd’hui dans les négociations avec les pouvoirs publics un allié qui peut être mobilisé, c’est l’opinion, c’est les Français, ils sont capables d’entendre ce discours de raison », estime ainsi Jérôme Fourquet.