En Equateur, les producteurs de cacao se frottent les mains
AFP le 24/06/2025 à 09:00
L'envol des prix du cacao sur le marché international profite aux producteurs équatoriens qui avaient misé sur la fève plutôt que sur la banane, dont le pays est le premier exportateur mondial, les revenus générés dépassant même ceux de l'exploitation minière.
Sur la côte pacifique de l’Equateur, la vie a changé pour les agriculteurs qui avaient parié sur la culture de cacaoyers.
Autrefois, le prix du cacao « était très bas et on avait juste assez (d’argent) pour entretenir la ferme », mais aujourd’hui « j’envisage de faire des économies, de décrocher un crédit et d’acheter un autre terrain » pour étendre les cultures, s’enthousiasme Cergio Lema, 50 ans, interrogé par l’AFP.
Dans sa ferme située à Milagro, près de Guayaquil (sud-ouest), les fèves de cacao sont séchées sur le sol puis conditionnées dans des sacs pour l’exportation.
Le quintal (100 kilos) vendu à un grossiste lui rapporte aujourd’hui 350 dollars, contre une centaine avant l’envol des cours en raison des sécheresses et des ravages de parasites sur les plantations de Côte d’Ivoire et du Ghana, les principaux producteurs mondiaux.
La tonne de cacao est cotée à 9 000 dollars sur le marché international. En octobre 2024, elle a atteint un plus haut à 12 000 dollars.
Arriba
L’augmentation des prix depuis fin 2023 profite à la balance commerciale de l’Equateur, dont l’économie dépend largement de l’exploitation des ressources naturelles.
En 2024, le cacao équatorien a généré 3,6 milliards de dollars de revenus, soit 600 millions de plus que l’exploitation minière.
Entre septembre et mars, les exportations de cacao (2,9 milliards de dollars) ont même dépassé en valeur le secteur de la banane, une première en soixante ans, selon la Banque centrale. La banane a ensuite relevé la tête, mais le cacao la suit de près.
L’Equateur est le principal exportateur de cacao dit « fin et aromatique », très prisé en cuisine. La variété Arriba, une des plus reconnues et appréciées à travers le monde, est originaire de ce pays sud-américain. Son goût raffiné aux notes fleuries de jasmin, de violette ou de lavande présente une teneur en amertume modérée pour plus de finesse et de subtilité.
En Equateur, 90 % de la production de cacao est issue d’une variété génétique, le CCN-51, un clone créé dans les années 80 pour résister aux ravageurs.
« La prospérité actuelle n’est pas une coïncidence, nous récoltons les fruits de nombreuses années d’investissement privé et de recherche dans une variété résistante », affirme Ivan Ontaneda, président de l’Association nationale des exportateurs et industriels de cacao de l’Equateur (Anecacao).
Extorsion et déforestation
Benjamin Rosales, administrateur d’une exploitation de 100 hectares de cacao, se réjouit de prix « compétitifs » qui lui permettent « d’investir ».
Marco Vasquez, 42 ans, a lui modernisé sa ferme dans la province de Los Rios, dans le sud-ouest du pays. « Avec les prix d’avant, il n’était pas possible d’investir », dit-il. Là, j’ai racheté des semences, j’ai construit un petit pont pour traverser l’estuaire qui inondait auparavant les plantations ».
Anecacao estime qu’environ 400 000 producteurs et exportateurs ont bénéficié de la hausse des prix. Mais, revers de la médaille, ils sont désormais la cible d’extorsions dont le nombre de cas recensés a, selon le gouvernement, presque quadruplé entre 2022 et 2024.
L’attrait pour la culture de cacao alimente également la déforestation, ont alerté en 2024 plusieurs ONG.
La Commission européenne n’a cependant pas classé l’Equateur dans sa première liste des pays à risque pour la production de matières premières potentiellement liées à la déforestation et à la dégradation des forêts, publiée fin mai.