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Salariat

Employeurs, la « revalorisation » des postes de l’exploitation est obligatoire


Muriel Giot, juriste du pôle social du cabinet BSF, membre d’AGIRAGRI le 17/02/2021 à 08:15

A compter des payes d’avril 2021, une nouvelle classification des emplois s’impose aux employeurs agricoles et aux Cuma. N’attendez pas le dernier moment pour vous mettre en conformité.

Une convention collective nationale régira le secteur agricole* à partir du 1er avril 2021. Elle crée notamment une nouvelle classification des emplois qui fixe un certain nombre de dispositifs dont les minima de rémunération. L’employeur doit les respecter, mais a toute latitude pour définir sa politique de rémunération, à condition qu’elle soit plus favorable que celle de la convention collective et qu’elle respecte l’égalité de traitement (principes de non-discrimination et d’égalité entre hommes et femmes).

Des minima à respecter

C’est bien l’emploi qu’il s’agit de « valoriser », et non pas la personne, rappellent les syndicats signataires de la convention. Ainsi il peut y avoir éventuellement plusieurs salariés occupant le même emploi, dont le minima doit être identique, car pour la même valorisation il y a la même rémunération minimale. Pour autant, la rémunération effective de ces différents salariés peut être différente en raison de critères professionnels liés à la personne, comme par exemple le niveau de formation initiale et continue, l’ancienneté ou l’expérience.

La convention ne peut être cause pour aucun salarié, pour un travail équivalent, d’une réduction de l’ensemble de la rémunération, y compris les primes de toute nature et tous avantages en nature et en espèces acquis antérieurement. Il en va de même pour les régimes de retraite complémentaire et de prévoyance. Lors de la mise en œuvre de la nouvelle classification, les salariés bénéficient du maintien de leur affiliation tant qu’ils occupent les mêmes fonctions dans l’exploitation ou l’entreprise agricole.

Cette classification s’applique à l’ensemble des contrats de droit privé à durée indéterminée (CDI) ou à durée déterminée (CDD), y compris aux contrats saisonniers.

La valorisation des postes

La nouvelle classification des emplois abandonne complètement le système ancien. Les nouveaux paliers (au nombre de 12) qui déterminent le taux horaire minimal applicable ne correspondent en aucune manière aux anciens niveaux (souvent 8) et échelons (souvent 2). Dorénavant, la grille se fonde sur de nouveaux critères « modernes » (la technicité, l’autonomie, la responsabilité, le management et le relationnel) et crée de nouveaux échelons (technicien, agent de maîtrise et cadre). Il est ainsi impossible de proposer une conversion mécanique d’un ancien positionnement vers la nouvelle valorisation des emplois. Il faut aussi résister à l’envie de trouver le palier ou le coefficient de l’emploi en partant de la rémunération réelle du salarié car la classification se prononce sur les minima et non les rémunérations réelles.

Le fonctionnement de la classification

La convention détermine cinq critères de valorisation des emplois :

1 – La technicité : dans chaque emploi, qu’il s’agisse de la production, de la maintenance, de la vente ou de de l’administratif, il convient d’apprécier la nature des tâches/missions confiées, le degré de simplicité ou de complexité de l’emploi, l’étendue des activités (nombreuses, évolutives) et le temps nécessaire d’appropriation.
2 – Autonomie : il s’agit d’apprécier la nature des instructions (consignes précises, directives générales) et les conditions de surveillance, de contrôle.
3 – Responsabilité : ce critère porte sur les responsabilités inhérentes à l’emploi en matière de risques potentiels et de contribution au développement de l’entreprise. Elle porte sur les exigences de l’emploi dans deux domaines, formulé en deux sous-critères : l’importance du respect des normes (par exemple les normes liées à la qualité, l’hygiène, la sécurité, l’environnement, etc.) dans le cadre de l’emploi, et l’enjeu économique dans le sens de la contribution aux objectifs de l’entreprise.
4 – Management : il s’agit de valoriser la nature du management (animation, encadrement) et la nature des personnes visées par l’animation ou l’encadrement (degré d’autonomie de ces personnes : temporaires, saisonnières, permanentes ; personnes animant ou encadrant elle-même d’autres personnes ; etc.).
5 – Relationnel : ce critère permet d’apprécier la complexité des échanges induits par l’emploi (simple information, conviction, négociation…) et la nature des interlocuteurs (collègues et encadrement interne à l’entreprise, prestataires, fournisseurs, clients, partenaires institutionnels, relations internationales…).

Chaque critère comprend plusieurs « degrés ». Il s’agit pour chaque emploi de choisir pour chaque critère le degré qui correspond le mieux aux exigences requises. Chaque emploi doit être valorisé sur l’ensemble de ces critères, y compris chacun des deux sous-critères du critère responsabilité.

Un nombre de points est attaché à chaque degré de chaque sous-critère. L’addition des points atteints dans chaque critère permet de déterminer un nombre total de points pour l’emploi. Il est dénommé coefficient de l’emploi. Ce coefficient sert ensuite à l’identification de la rémunération minimale. La classification comprend 12 paliers, chacun d’entre eux correspondant à une rémunération minimale (taux horaire brut).

Tout ceci peut paraître complexe. Et ça l’est ! Pour aider les employeurs à anticiper ce dispositif et le mettre en œuvre sur leurs exploitations, les cabinets membres du groupement AGIRAGRI ont créé une solution adaptée : CLIC & CLAASS, une application qui permet en quelques clics d’établir la bonne classification de chaque emploi agricole. Très simple et très rapide d’utilisation, elle est accessible gratuitement en se connectant sur https://clicetclaass.agiragri.com/

Retrouvez ci-dessous une présentation en vidéo de cette application :

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Anticiper et informer les salariés

Sur les autres points traités par la convention (représentation syndicale, formation professionnelle, rémunération, protection sociale complémentaire, principe de non-discrimination, égalité entre hommes et femmes, mentions obligatoires dans le contrat de travail, emploi des jeunes et des étrangers, durée du travail, rupture du contrat de travail, ou encore conditions de travail), il conviendra de comparer les nouvelles dispositions avec celles des conventions départementales, interdépartementales ou sectorielles qui perdurent en parallèle et appliquer la solution la plus favorable au salarié. Alors ne vous y prenez pas au dernier moment !

A noter enfin que l’employeur doit tenir à la disposition du personnel un exemplaire à jour de la nouvelle convention collective sur le lieu de travail. Il doit préciser où les textes sont tenus à la disposition ainsi que les modalités leur permettant de les consulter pendant leur temps de présence. Ils doivent aussi évidemment être informés de leur nouvelle classification.

* Signée le 15/09/2020 – étendue le 10 janvier 2021 ; sont concernées toutes les activités agricoles à l’exception des centres équestres, des entraîneurs de chevaux de courses, des champs de courses, des parcs zoologiques et de la conchyliculture. Les ETA ont leur propre convention, applicable courant 2021 après la publication de son arrêté d’extension.

AGIRAGRI rassemble des cabinets d’expertise comptable et d’avocats indépendants, présents sur toute la France avec plus de 3000 collaborateurs dont près des 2/3 spécialisés en agriculture et viticulture. Leur objectif : accompagner les chefs d’exploitation dans leur stratégie d’entreprise. Pour les y aider, le groupement propose les meilleures compétences réunies, des outils inédits et des partenariats innovants.