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Relocalisation, néo-agriculteurs

Des modes alternatifs d’accès au foncier encore marginaux


TNC le 21/07/2021 à 14:46
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Dans un contexte où la relocalisation de l’alimentation est remise en avant, le développement des circuits courts permet également l’émergence de formes nouvelles de propriété et d’accès au foncier.

Dans une analyse parue en mai dernier via le Centre d’études et de prospective du ministère de l’agriculture, Adrien Baysse-Lainé (CNRS – UMR Pacte) résume les résultats de sa thèse consacrée à l’émergence de modes de gestion du foncier alternatifs, en lien avec le développement des circuits courts et les aspirations à une relocalisation de l’alimentation. Sur trois zones géographiques (l’Amiénois, le Lyonnais et le sud-est de l’Aveyron), l’étude établit notamment une comparaison entre l’accès à la terre des hors cadre familiaux et ceux qui sont issus d’une famille agricole, les premiers devant davantage composer avec la disponibilité du foncier.  

S’ils ne représentent pas la majorité des exploitants engagés en circuits courts, ce sont en effet ceux qui s’y engagent le plus : « les actions mises en œuvre pour faciliter leur accès au foncier agricole peuvent donc être considérées comme un vecteur d’accélération de la relocalisation », explique ainsi Adrien Baysse-Lainé.

Réseaux, collectivités locales : de nouveaux leviers d’accès à la terre

« Les outils de contrôle des marchés fonciers issus de l’époque de la « modernisation agricole » sont devenus, au fil du temps, partiellement inopérants, notamment face à l’essor du phénomène sociétaire, et ils réussissent peu à soutenir les installations atypiques, notamment en circuits courts de proximité. Néanmoins, leurs réussites en matière de limitation des prix fonciers et de concentration facilitent le déploiement des initiatives présentées ci-dessous, par comparaison avec d’autres pays d’Europe de l’ouest », explique l’auteur. Le chercheur distingue plusieurs stratégies alternatives d’accès à la terre.

Premièrement, la mise en réseau de personnes, une stratégie conduite en général « par les organisations proches de la gauche paysanne », comme l’Adear (association pour le développement de l’emploi agricole et rural). L’objectif est de favoriser l’ancrage professionnel de nouveaux agriculteurs, par exemple via les espaces-tests. Une deuxième stratégie, dite « domaniale », correspond à la mise à disposition de propriétés foncières de domaines, de plus en plus souvent par les acteurs publics locaux, et par l’association Terres de liens. Des modes de gestion du foncier qui s’expriment par « une grande diversité et une inventivité contractuelle », souligne Adrien Baysse-Lainé.

Si l’objectif de ces collectivités est ainsi d’ouvrir l’accès au foncier à des profils minoritaires d’agriculteurs, orientés vers la relocalisation, elles parviennent rarement « à mettre en œuvre une véritable politique d’intervention et d’allocation », note l’auteur. Par ailleurs, ces actions foncières ciblent principalement les néo-agriculteurs, et particulièrement les maraîchers en agriculture biologique, qui ont des besoins en surfaces et en investissements plus limités. Ce ciblage restreint donc la portée de la relocalisation.

Des évolutions qui restent marginales

Cependant, même si les surfaces accordées sont peu importantes, ces actions « ont un impact positif en matière d’équité dans la distribution du foncier », constate l’auteur. Les bénéficiaires peuvent par ce biais accéder à des terres, ou à des parcelles de meilleure qualité. En revanche, elles se concentrent sur une population bien spécifique. « Presque tous les acteurs se passent d’appels à candidature pour choisir les bénéficiaires de leurs allocations foncières. On a donc plutôt affaire à des logiques de compagnonnage », note Adrien Baysse-Lainé.

Une solution pour la relocalisation de l’alimentation ?

Au final, ces voies d’accès au foncier pour installer des nouveaux agriculteurs ne seront pas suffisantes pour combler les demandes croissantes de relocalisation alimentaire. En 2016, 23,3 % des exploitations étaient engagées dans un circuit court (c’est-à-dire en vente directe ou comportant un intermédiaire au maximum), ce circuit représentant, pour 42,1 % d’entre elles, plus de la moitié de leur chiffre d’affaires (données Agreste).