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Crise agricole

Derrière un Salon de l’agriculture calme, la colère n’est pas éteinte


AFP le 01/03/2024 à 15:50
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(© Emmanuelle Bordon)

A deux jours de la clôture d'un Salon de l'agriculture qui s'est « plutôt bien passé » de l'avis général des syndicats agricoles, une action surprise de la Coordination rurale vendredi matin à l'Arc de triomphe interroge sur une éventuelle reprise de la mobilisation sur fond de concurrence entre syndicats.

Après la visite chahutée du chef de l’Etat samedi, suivie d’annonces sur les prix planchers et des aides à la trésorerie, les syndicats ont rendez-vous avec Emmanuel Macron à la mi-mars, avant la présentation d’une grande loi d’orientation agricole.

L’irruption de tracteurs et ballots de paille avant l’aube au pied de l’Arc de Triomphe, lieu hautement symbolique et théâtre de violences lors de la crise des « gilets jaunes » en 2018, a rappelé la colère profonde du monde agricole.

« On ne lâchera rien », a affirmé la présidente de la Coordination rurale (CR) Véronique Le Floc’h à l’AFP. « On ne peut pas dire qu’on va aider les agriculteurs et en même temps signer des accords de libre-échange », a-t-elle ajouté, en référence à des accords commerciaux approuvés la veille par le Parlement européen avec le Chili et le Kenya.

Les forces de l’ordre ont encerclé quelques dizaines de manifestants sur un trottoir en haut des Champs Elysées, et 66 ont été interpellés, selon la préfecture de police. Parmi elles, Patrick Legras, agriculteur dans la Somme et l’une des figures de la Coordination rurale, a confirmé le syndicat.

Une fois la place évacuée, peu après 9h30, la circulation a repris et un convoi de tracteurs a pris la route du château de Versailles, où une vingtaine de tracteurs sont arrivés vers midi, escortés par la police.

« On continue le mouvement parce qu’on n’est pas entendus, on n’a rien de structurel », dit l’un des manifestants, Nicolas Bongay, 40 ans, président de la CR du Doubs.

A la FNSEA, le syndicat majoritaire et concurrent de la CR, pas question pour l’instant d’appeler à une nouvelle mobilisation nationale après le Salon, a dit à l’AFP son numéro deux, Hervé Lapie, qui privilégie le travail avec le gouvernement.

« S’il faut repartir sur des actions syndicales parce que ça bloque, on le fera. Mais je pense que notre objectif, ce n’est pas de faire de l’action syndicale pour faire de l’action syndicale, pour être visible », a-t-il dit.

« Ce qu’on veut voir, c’est la traduction concrète. Au moment où je vous parle, on n’y est pas encore », a aussi souligné le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, aux côtés du ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, après un rendez-vous au Salon. Le ministre a pris soin aussi de souligner que le blocage mené par la CR le matin était « le fait d’un syndicat minoritaire ».

Pas d’appel à manifester

A la fin du Salon, « dimanche soir, tout ne sera pas réglé et tout le monde le sait d’ailleurs », a déclaré le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, sur France Bleu Occitanie.

Plus de 400 millions d’euros de mesures d’urgence ont été annoncés par le gouvernement, qui a promis un choc de simplification, le renforcement des lois Egalim pour protéger le revenu des agriculture et qui a placé l’agriculture au rang d’un « intérêt général majeur ». L’exécutif a promis d’alléger les contraintes, notamment environnementales, au prix de concessions décriées par les ONG et des scientifiques sur les pesticides.

A la pointe de la mobilisation, au côté de la FNSEA, les Jeunes agriculteurs n’envisagent pas non plus à ce stade de retourner dans la rue. « Nous n’avons jamais rompu le dialogue, il faut continuer à travailler », dit à l’AFP leur président Arnaud Gaillot.

Alors que la Coordination rurale, deuxième syndicat né en 1991 d’une scission avec la FNSEA, multiplie les accusations de « cogestion » désastreuse à son encontre, Arnaud Gaillot déplore « un populisme sans solution ». « Remettre en cause le dialogue des syndicats majoritaires avec le gouvernement, c’est un déni de démocratie », affirme-t-il.

De son côté, la Confédération paysanne, troisième syndicat classé à gauche, ne prévoit « pas de mobilisation dans les jours à venir », mais n’appelle pas non plus à la démobilisation, a déclaré à l’AFP Stéphane Galais, un de ses secrétaires nationaux.