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Intrusions, arrêtés anti-phytos

Christiane Lambert: « Un jour, un agriculteur va péter un câble, c’est certain »


TNC le 05/09/2019 à 10:23
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Christiane Lambert et Jérôme Despey, lors de la conférence de presse de rentrée de la FNSEA, mercredi 4 septembre. (©TNC)

Face à la multiplication des intrusions de militants antispécistes dans les élevages ou de gens du voyage sur des terrains agricoles, d’arrêtés municipaux interdisant l’usage des produits phytos, la patronne de la FNSEA s’inquiète d’un possible dérapage « tant les agriculteurs n’en peuvent plus de ce dénigrement croissant à leur encontre ». La FNSEA veut par ailleurs dénoncer « le double discours politique » concernant l’application des traités commerciaux avec le Canada et les pays du Mercosur.

Au cours de leur traditionnelle conférence de presse de rentrée, les deux leaders de la FNSEA – Christiane Lambert et Jérôme Despey – ont longuement abordé le dossier de la multiplication des arrêtés municipaux anti-phytos, des intrusions dans les élevages, et « d’un climat de dénigrement croissant » à l’encontre des agriculteurs.

« Le climat social se dégrade », a insisté la présidente du syndicat majoritaire. Depuis le début de l’année 2019, la FNSEA a recensé « 41 intrusions illégales de militants antispécistes dans des élevages », contre « 16 intrusions en 2018 et 8 en 2017 ».

Selon Christiane Lambert, sur les 41 intrusions recensées, 30 sont à l’actif de DxE (Direct Action Everywhere), 8 à l’actif de L214, et 3 à l’actif de Boucherie abolition.

« On ne doit pas se laisser dicter la loi par des abolitionnistes qui ont des méthodes inacceptables. Nous ne nous laisserons pas insulter et dénigrer de cette façon », a-t-elle martelé.

La conférence de presse de la FNSEA du mercredi 4 septembre 2019 :

Pour les producteurs de grandes cultures, c’est la peur de représailles quand ils opèrent un traitement phytosanitaire. En mars dernier, un agriculteur de l’Ain s’était fait tabassé dans son champ parce qu’il était en train de traiter un champ.

Dans l’Essonne ce lundi 2 janvier, des gens du voyage se sont illégalement installés sur les terres d’un céréalier. Dans la soirée, alors que des agriculteurs de la FDSEA d’Ile-de-France tentaient de les déloger, « il y a eu des tirs d’armes à feu en direction des cabines de tracteurs ! »

« Un jour, un agriculteur va péter un câble, c’est certain… », regrette Christiane Lambert. Les leaders de la FNSEA devaient rencontrer Christophe Castaner, le ministre de l’intérieur, dans l’après-midi, pour faire le point sur la recrudescence de ces actes. « Je demande au ministre de renforcer la protection et la surveillance, de punir sévèrement ceux qui ont ces pratiques-là, quand ils ont été détectés, gardés à vue, qu’il puisse y avoir des sanctions dissuasives », a-t-elle expliqué.

« Expliquer pour être compris »

Aux crises économiques et climatiques que subissent de nombreux agriculteurs, c’est une profonde crise sociale qui s’est installée ces derniers mois. Une crise à toutes les strates de la société. Sur le dossier des produits phytosanitaires, c’est désormais avec les élus locaux que le combat idéologique se focalise. Depuis l’appel du maire de Langouët, dont l’arrêté anti-phytos a été suspendu par le tribunal administratif, de nombreux maires ruraux ont signé, eux-aussi, des arrêtés interdisant l’usage agricole de produits phytosanitaires à moins de 150 mètres de toute habitation.

« Nous restons attachés à l’explication et au dialogue. Nous voulons expliquer pour être compris », a insisté Christiane Lambert.

« Ces arrêtés sont des aberrations. La distance de 150 mètres représente 1,5 fois la longueur d’un terrain de foot ! Que de friches à venir. Quant à l’obligation de prévenir 12 heures avant un traitement, c’est tout simplement impossible car on ne connaît pas assez précisément la météo. »

« Tous ces arrêtés seront cassés par les tribunaux administratifs. En attendant, nous proposons le dialogue et la pédagogie. »

La FNSEA dénonce aussi les projets de décrets et d’arrêtés proposés par le Gouvernement fin juin dernier, car ils imposeraient aux agriculteurs des « zones non traitées » auprès des habitations. « Il faut que les pratiques locales et les engagements des agriculteurs sur le terrain soient la base de discussion. C’est ce que nous proposons dans le contrat de solution avec le déploiement, sur tout le territoire, de chartes de bon voisinage », a rappelé la patronne de la FNSEA.

Retrouvez la tribune du président de la FDSEA d’Ille-et-Vilaine sur ce sujet : [Tribune] Cédric Henry : « La dictature des fantasmes »

« N’importons pas l’alimentation que nous ne voulons pas chez nous »

Le syndicat entend rester « mobilisé » au sujet des accords commerciaux avec le Canada et les pays du Mercosur. « La FNSEA n’est absolument pas opposée à des accords commerciaux, a expliqué Jérôme Despey, secrétaire général du syndicat. La désinformation de l’État français sur le Ceta amène chez les agriculteurs de l’incompréhension et de la déconsidération. Il faut le dire : les conditions de production françaises, par rapport au Canada, ne sont pas les mêmes. Oui, le Canada utilise des farines animales pour nourrir ses bovins. » Rappelons que les farines animales sont interdites dans l’alimentation des bovins depuis la crise de la vache folle au début des années 2000.

La FNSEA pointe du doigt l’incohérence du Gouvernement et d’Emmanuel Macron. « On ne peut pas accepter le Ceta si on refuse de signer le Mercosur. » « Nous demandons une clarification de l’Elysée. »

Le syndicat veut « se mobiliser sur ce sujet au cours des prochaines semaines », avec une mobilisation prévue avec les Jeunes agriculteurs à partir de mi-septembre. « Ce que nous avons besoin, ce sont des garanties, pas seulement des paroles. »