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Stockage du carbone dans les sols

Au menu d’une réunion des ministres européens


AFP le 07/02/2022 à 10:31
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Ne pas laisser les sols nus, en développant les cultures dites intermédiaires entre deux récoltes, fait partie des solutions pour séquestrer le carbone dans les terres agricoles. (©TNC)

Amplifier le stockage du carbone dans les sols pour atteindre l'objectif de neutralité en 2050 : les ministres de l'agriculture de l'UE se retrouvent lundi et mardi à Strasbourg pour des discussions informelles sur leurs pratiques et les pistes à privilégier.

Le diagnostic est partagé mais les modalités restent à préciser, alors que « l’agriculture bas-carbone » fait l’objet d’un projet législatif de la Commission attendu fin 2022. La France, qui a fait de la question climatique une priorité de sa présidence de l’Union européenne, veut concilier l’objectif environnemental de séquestration de CO2 dans les sols et celui de valorisation économique, avec l’émission de crédits carbone agricoles.

Réunis autour du ministre français de l’agriculture, Julien Denormandie, les représentants des Vingt-sept vont alterner visites de terrain et discussions, pour « nourrir la réflexion » en amont de la mise en œuvre d’un cadre réglementaire pour la certification des absorptions de carbone.

L’agriculture représente environ 10 % des émissions européennes de gaz à effet de serre (19 % en France, premier producteur agricole de l’UE). Elle-même victime du dérèglement climatique, elle offre aussi des solutions : après les océans, les sols sont les principaux puits de carbone de la planète.

« Structurer un marché en expansion »

Comment séquestrer le carbone dans les sols agricoles ? Les solutions sont connues : ne pas laisser les sols nus, en développant les prairies ou les cultures dites intermédiaires entre deux récoltes (le couvert végétal retourne au sol sous forme de biomasse), planter des haies autour des champs, utiliser les fumiers issus de l’élevage, éviter les labours qui alimentent l’érosion, diversifier les cultures au profit de légumineuses (pois, lentilles) qui vont enrichir les sols…

Mais il reste à s’accorder sur des critères de certification pour aboutir à « un consensus », une « vision partagée » : c’est l’objet de la rencontre de Strasbourg au cours de laquelle Julien Denormandie veut « poursuivre les efforts de structuration du marché des crédits carbone générés par les agriculteurs ».

Le gouvernement français fait deux constats : d’une part, « le marché de la compensation volontaire de carbone est en pleine expansion » et la demande mondiale pourrait être « multipliée par 15 d’ici 2030 », d’autre part, la marge de croissance se situe dans le secteur agricole, qui représente aujourd’hui « moins de 0,1 % des crédits carbone mondiaux ».

En France : 168 projets labellisés, 1 000 agriculteurs engagés, 406 000 t de CO2 économisées

À Paris, Julien Denormandie a récemment invité secteurs privé comme public à investir dans des crédits carbone générés par des agriculteurs français, plaidant pour « une démarche proactive et pas seulement comptable », alors que la tonne de carbone est aujourd’hui cinq à dix fois plus chère en Europe qu’en Amérique latine ou en Asie.

À Strasbourg, il va plaider pour un cadre de certification européen clair et transparent qui garantisse un impact vérifiable, de nature à rassurer les investisseurs, et vanter le « Label bas-carbone » français, qui s’appuie sur une dizaine de méthodes couvrant les différents secteurs (forêt, viticulture, élevage, grandes cultures). Plusieurs pays européens ont développé des labels, parfois bien plus tôt que la France – l’Autriche dès 2007 – mais le plus souvent au niveau local ou dédié à un seul secteur, comme l’Italie ou l’Espagne pour la forêt.

« L’avantage du Label bas-carbone français est qu’il est national, couvre tous les secteurs et est connecté au marché du carbone agricole », souligne-t-on au ministère français de l’agriculture. En France, un millier d’agriculteurs sont engagés dans une démarche bas-carbone : 168 projets ont été labellisés, pour plus de 406 000 tonnes de carbone économisées. Plus d’une quarantaine de grandes entreprises sont partenaires du label ou vont le rejoindre.