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À Dunkerque

Au congrès de la FNSEA, Marc Fesneau laisse encore beaucoup d’amertume


TNC le 28/03/2024 à 18:15
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Les agriculteurs FNSEA au congrès de Dunkerque face au ministre de l'agriculture (© © TNC)

Malgré moult avancées et concessions obtenues du Gouvernement et de l’Europe, de nombreux agriculteurs réunis au congrès de la FNSEA sont repartis de Dunkerque avec une certaine amertume et encore beaucoup de défiance à l’égard de l’Exécutif. Arnaud Rousseau, le leader de la FNSEA, attend « sans plus attendre » une nouvelle prise de parole d’Emmanuel Macron pour qu’il donne sa vision pour l’agriculture.

Dans le bastion du chicon, il n’y a pas que les endives qui ont de l’amertume. De très nombreux agriculteurs de la FNSEA, qui se sont réunis en congrès à Dunkerque les 27 et 28 mars, en ont aussi.

« Il y a encore beaucoup d’amertume car beaucoup d’agriculteurs n’ont encore rien vu de concret dans leur quotidien », a ainsi réagi Damien Greffin, après la séance de clôture de la grande messe annuelle du syndicat majoritaire. Si bien qu’en tant que leader syndical régional, il ne savait pas encore bien comment il allait expliquer à ses « troupes », dans les prochains jours, que le ministre de l’agriculture n’a pas officialisé de mesures nouvelles.

Sans porter de nouvelles annonces, Marc Fesneau a précisé le calendrier sur quelques points, comme une « application à l’été » du contrôle administratif unique des exploitations ou le renforcement d’un allègement fiscal sur les travailleurs saisonniers dès « le 1er mai ». Il a surtout égrené les nombreux chantiers entrepris en concertation avec les syndicats, pour répondre aux innombrables revendications portées depuis octobre dernier.

« Je sais les lenteurs », « un certain nombre de réticences » dans les systèmes administratifs nationaux et européens, a expliqué le ministre. Mais dans l’ensemble, « nous avons avancé comme jamais », a-t-il affirmé avant de détailler une nouvelle fois les différentes actions engagées.

Avant son intervention, l’animateur de la séquence conclusive du congrès avait appelé le public « à respecter la prise de parole du ministre ». Pour dialoguer plus longuement avec les représentants syndicaux, mais aussi, sans doute, pour s’assurer une séance publique la moins « tonique » possible, le ministre de l’agriculture était arrivé la veille au soir pour dîner avec les congressistes, hors caméras.

Pendant son discours, Marc Fesneau n’a pas pu compter le nombre « d’antisèches » que les congressistes lui ont brandi sous ses yeux. Parmi les messages des affichettes pouvait-on lire « plan élevage », « produire plus et vivre mieux », « liberté d’usage de nos prairies », « droits de douane pour l’Ukraine », « gestion de l’eau ». Au fond de la salle, des congressistes faisaient du bruit en tapant sur le sol.

« Je pense qu’il y a eu du respect mutuel », a estimé le ministre à l’issue du congrès. « On voit bien qu’il y a de la défiance, mais pas au point de la colère », même si le secteur reste « très à fleur de peau ».

Les agriculteurs FNSEA au congrès de Dunkerque, face au ministre de l’agriculture. (© Terre-net Média)

« Ni défiance, ni complaisance », martèle Arnaud Rousseau

Avant l’intervention du ministre, Arnaud Rousseau a appelé Emmanuel Macron à donner « sans plus attendre » sa vision pour l’agriculture. « Le président de la République semble hésiter à prendre rendez-vous, celui qu’il nous avait promis au Salon de l’agriculture, en estimant que la situation (n’est) pas mûre. » Mais « qu’en est-il de l’ambition du chef de l’État ? » s’est-il interrogé. La stratégie élyséenne d’une alimentation de meilleure qualité, plus durable et théoriquement plus rémunératrice a été percutée par l’inflation. « Le discours de Rungis sur la montée en gamme a vécu », résume Arnaud Rousseau.

Le président doit « redonner confiance aux agriculteurs » d’aujourd’hui et de demain, a poursuivi Jérôme Despey, premier vice-président de la FNSEA, après les discours.

Le syndicat attend par exemple du chef de l’État qu’il donne son feu vert à la réautorisation de pesticides interdits en France pour des raisons de santé publique ou de protection de la nature, mais utilisés ailleurs dans l’UE, comme l’insecticide acétamipride réclamé par les betteraviers.

Le leader de la FNSEA a aussi appelé le gouvernement à « reprendre la maîtrise de son administration » afin qu’elle mette plus rapidement en œuvre la soixantaine de mesures annoncées en faveur des agriculteurs.

« L’esprit et la lettre de la réforme des retraites seront respectés »

Parmi les sujets laissés en suspens, selon Arnaud Rousseau, figure l’accompagnement par l’État, jusqu’à la cessation d’activité au besoin, des « collègues dans des situations inextricables ». Sans quoi « on aura encore […] des gens qui hurlent leur colère ou qui simplement font le choix de se supprimer », a prévenu le responsable qui « assume » une revendication « pour le bien-être de l’humain ».

La FNSEA plaide aussi pour un « grand plan » pour l’agriculture méditerranéenne, qui souffre du manque d’eau.

De son côté, Marc Fesneau a évoqué le sujet des retraites agricoles, assurant que « l’esprit et la lettre » de la réforme et des engagements seraient bien tenus, avec une « prise en compte des 25 meilleures années à partir de 2026 ».

Marc Fesneau au congrès de la FNSEA, jeudi 28 mars 2024 à Dunkerque. (© Terre-net Média)

L’Europe et les chambres d’agriculture, les prochains combats

À l’approche des élections européennes, Arnaud Rousseau a aussi adressé un message ferme aux candidats. « Ayez l’ambition de redonner à l’agriculture son rôle structurant en Europe ! » En « Européens convaincus », les représentants syndicaux veulent « plus d’Europe et non pas une Europe faible ».

Il a salué les récentes avancées européennes, notamment en matière d’assouplissement des règles de la Pac, mais « il faut aller plus loin que les frémissements de ces derniers mois ».

Les élections européennes passées, il s’agira ensuite, pour la FNSEA, de mener campagne pour les élections des chambres d’agriculture. « Soyons fiers des actions menées et de notre bilan », a expliqué pour sa part Arnaud Gaillot, président de Jeunes agriculteurs. « Nous ferons liste commune FNSEA-JA, car c’est un pari gagnant-gagnant », a-t-il assuré. « Le spectaculaire ne paie pas. Ne croyons pas que le résultat est acquis d’avance. Il faudra mener campagne pour défendre notre bilan. Un bon bilan. »

Venue en « grand témoin » d’un débat sur les colères exprimées dans de nombreux pays européens, Christiane Lambert, la présidente du Copa et ancienne numéro un de la FNSEA a aussi interpellé les congressistes. « Entre des drapeaux jaunes à notre gauche (la Confédération paysanne, NDLR), des drapeaux jaunes à notre droite, qui parlent beaucoup mais qui agissent peu (la Coordination rurale, NDLR), la meilleure voie possible, celle de l’efficacité, elle se situe entre ces deux extrêmes ».