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Sécurité routière

« En vieillissant, on devient plus prudent au volant »


TNC le 06/05/2024 à 05:05
TEmoinConduiteTracteur

Chaque agriculteur a un rapport différent à la conduite. (© Adobe Stock)

Nicolas Viel, installé dans l’Eure, et Grégor Lamirault, dans l’Eure-et-Loir, sont deux céréaliers passionnés de machines et expérimentés. Ils nous racontent leur rapport à la conduite.

« Un permis, cela va bloquer les reconversions »

Nicolas Viel, céréalier dans l’Eure : « Je suis né dans un tracteur ! Ma génération passait sa journée dedans. Aujourd’hui, je ne sais pas si on progresse beaucoup devant Farming Simulator… Mon père m’a toujours laissé faire ce que je voulais. Il m’expliquait et je regardais. On apprend beaucoup en regardant.

Si vous mettez un permis pour réglementer tout ça, vous allez tout bloquer, notamment les reconversions vers le monde agricole, alors qu’on manque déjà de main-d’œuvre. Après, pour la sécurité, ce serait peut-être bien… Mais bon, ça reste un permis. Je fais du TP aussi, il existe le Cases (Certificat d’aptitude à la conduite en sécurité). C’est limite trop court comme formation. Les gars y vont juste pour l’avoir, pour avoir le tampon, pas pour apprendre. Ce qui compte, c’est d’avoir le papier. Quand on rentre dans un système de permis, on ne sait jamais où cela s’arrête. Le Certiphyto, c’est l’exemple typique. À la base, ce n’est pas une mauvaise idée. Mais ça prend de telles proportions après !

Quand un salarié arrive, je me renseigne où il a été avant et je fais confiance. De toute façon, je n’ai pas le choix, je ne vais pas les surveiller toute la journée. L’âge, ça ne veut rien dire. L’important, c’est la responsabilité. Mon fils a 16 ans et demi, je reconnais que c’est bien pratique pour aider. Et même si j’ai toujours eu horreur du risque, c’est quand même vrai qu’on devient plus prudent au volant en vieillissant ! »

« Une benne trois essieux, ce n’est pas évident du premier coup »

Grégor Lamirault, céréalier dans l’Eure-et-Loir : « Où est-ce que j’ai appris à conduire un tracteur ? Sur les genoux de mon père ! Aujourd’hui, c’est plus facile, avec les ponts avant suspendus, les cabines suspendues, le freinage amélioré… Mais c’est aussi trompeur. Le confort fait que l’on ne ressent pas le risque.

J’ai un Valtra de 2018 sur lequel on peut régler le profil de conduite. Je vais le limiter à 25 km/h pour mon apprenti à la moisson. C’est à la fois protéger la machine, l’utilisateur et les gens autour. Sur mon Deutz, ce réglage n’est pas possible, alors il n’y touchera pas. À 16 ans, on peut conduire un ensemble qui fait 40 tonnes sur la route, ce n’est pas rien, il faut faire attention. Pour autant, je ne suis pas favorable à la limitation à 25 km/h des ensembles avec attelage. Je trouve que le différentiel avec les autres usagers est trop important. Cela crée au final plus de danger que cela n’en évite.

Le permis, pour les agriculteurs en exercice, ce n’est pas possible. Mais, sans parler nécessairement de permis, on pourrait intégrer une formation plus poussée lors du cursus scolaire, au moins quelques heures, pour appréhender le poids, le gabarit, le volume… Une benne trois essieux, ce n’est pas évident du premier coup. À mon époque, j’ai eu droit au 10 de Conduite. On était tous fils d’agriculteurs et on montrait aux CRS comment conduire les tracteurs ! »