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Vidéo L214

Un élevage « insalubre » de canards, l’État ordonne la fermeture d’un bâtiment


AFP le 21/08/2020 à 09:45

La préfecture des Pyrénées-Atlantiques a ordonné jeudi la fermeture d'un bâtiment insalubre d'un élevage de canards du département, mis en cause par l'association L214 dans une vidéo, et a prononcé une « interdiction totale et immédiate » de l'exploiter « jusqu'à sa remise aux normes ».

« Le pire élevage » vu depuis plus de dix ans : l’association L214 avait diffusé jeudi des images d’un élevage de canards de Lichos, déposant plainte pour cruauté et demandant sa fermeture urgente, tandis que la copropriétaire de l’exploitation dénonçait de son côté une vidéo « fausse et mensongère ».

Bâtiment « totalement insalubre », cadavres de canards « décomposés » et « non ramassés », cages « en train de s’effondrer », épais « flot d’excréments » qui « déborde à l’extérieur », asticots, rats qui « prolifèrent » : pour L214, l’un des bâtiments, abritant des canards mâles, de l’élevage-couvoir de Lichos, à 50 km de Pau, atteint « des sommets dans l’horreur », des canards vivants, environ 150, se trouvent au milieu d’autant de morts.

« Les canards sont évacués dès maintenant de leur bâtiment pour les mettre à l’abri », a indiqué jeudi soir une porte-parole du ministère de l’agriculture, après inspection, dès mercredi, des services vétérinaires départementaux et de la gendarmerie sur le site du « Couvoir du Saison » de Lichos.

Selon L214, les photos et vidéos mises en ligne sur leur site ont été prises « il y a quelques jours » en août, après signalement par un « lanceur d’alerte ». Elles dépeignent « le pire élevage que nous ayons eu l’occasion de voir depuis les débuts de L214 » en 2008, a affirmé Sébastien Arsac, directeur des enquêtes de l’association.

Jeudi, une copropriétaire du Couvoir du Saison, une exploitation « familiale » a affirmé à l’AFP que la vidéo de L214 était « fausse, mensongère et malhonnête ».

« Sur la partie extérieure, le lisier qui se déverse, c’est la vérité », a concédé Aurore Vidal, « des images de certains animaux en cage, c’est notre exploitation, mais tout ce qui est cadavres, asticots et tout le reste, c’est faux », a-t-elle ajouté, « ce n’est pas notre exploitation ». Mme Vidal, dénonçant la « malveillance », notamment d’un « ancien intérimaire », a annoncé une plainte pour « diffamation et entrée par effraction » contre L214.

L’avocate de L214 a pour sa part déposé mercredi une plainte pour « cruauté envers les animaux », « abandon », et « atteinte à l’environnement », en raison des risques encourus par le Saison, un proche cours d’eau. Le parquet de Pau a confirmé jeudi l’ouverture d’une enquête.

Dérives « isolées » mais « inacceptables »

Les effluents et lisiers devront être évacués dans les plus brefs délais par une entreprise compétente, a ajouté jeudi le ministère. Toutefois, une équipe de la police de l’eau et des agents de l’0ffice français de la biodiversité, rendus sur place, ont qualifié mercredi soir les risques de pollution « d’inexistants » en première analyse, a précisé le ministère.

L214, association de défense des animaux hostile à l’élevage, à la consommation de tous produits d’origine animale, milite pour la fermeture des abattoirs, et a déjà ciblé des élevages de la filière foie gras en Dordogne.

À la lumière de ces exemples, L214 s’interroge sur les inspections dans la filière foie gras et demande au ministre de l’agriculture Julien Denormandie « de diligenter un audit de l’ensemble des élevages de canards reproducteurs et couvoirs de la filière foie gras ».

Le ministère, dans un communiqué, a indiqué que ce « cas isolé » ne saurait être généralisé ». « Nous multiplions les contrôles (…) afin que ces dérives inacceptables, mais isolées et individuelles, ne jettent le discrédit sur toute une profession à laquelle j’assure mon soutien et ma confiance », a répondu le ministre, cité dans le communiqué.

Une porte-parole du ministère rappelle que 315 contrôles ont été effectués dans le département en trois ans sur la filière volaille-canards, dont 69 en 2019 sur les 667 du département. Une inspection et des prélèvements sur cette exploitation lors d’un épisode d’influenza aviaire en septembre 2019 n’avait « rien révélé ».

Le Cifog, qui représente la filière foie gras, a « fermement condamné les conditions décrites par cette vidéo qui ne reflètent en rien les méthodes de travail des éleveurs de la filière ».

Pour sa directrice Marie-Pierre Pé, « la stratégie de lynchage de L214 n’a pas d’autre objectif que de développer un monde végétarien. On utilise des procédés spectaculaires pour faire disparaître le monde de l’élevage », a-t-elle dit à l’AFP. « La situation évoquée par L214 n’est pas le reflet du monde de l’élevage aujourd’hui. C’est une caricature », a-t-elle insisté.