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Agrivoltaïsme

Première mondiale, la Canopée promet énergie et bienfaits en grandes cultures


TNC le 25/09/2023 à 11:57
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Canopée TSE Agrivoltaïsme

Construite par le producteur d’énergie solaire TSE à Brouchy, dans la Somme, la structure a été officiellement inaugurée en présence de Kadri Simson, commissaire européenne à l’énergie.

« La vie, c’est du soleil… et de l’eau », sourit, en écoutant les pluies diluviennes qui s’abattent sur Brouchy, à l’est de la Somme, Mathieu Debonnet, président de TSE, producteur français indépendant d’énergie solaire. Sa société a inauguré, jeudi 21 septembre en compagnie de Kadri Simson, commissaire européenne à l’énergie, le premier site agrivoltaïque doté d’un système d’irrigation intelligent et destiné à améliorer la gestion de l’eau sur les grandes cultures. Cette première mondiale promet une économie de 30 % de la précieuse ressource. « Là, par exemple, les panneaux sont à la verticale pour laisser un passage optimal aux gouttes », pointe le dirigeant.

La Canopée, le nom de cette installation qui surplombe, à plus de 5 m de hauteur, 3 ha de maïs grain, affiche une puissance maximale de 2,9MWc, soit l’équivalent de la consommation d’électricité́ d’environ 1 650 habitants. Sa construction a pris 6 mois, entre janvier et juin 2023. Elle est couplée à un système d’irrigation bardé de sondes et capteurs, pilotable à distance, pour n’arroser que le strict nécessaire. La structure n’empiète, avec une largeur entre les poteaux de 27 m, que 0,5% de la surface de la parcelle, qui abrite une rotation de cultures légumières comme la pomme de terre et le haricot, du pois protéagineux et des céréales (maïs, blé, orge).

Une parade au changement climatique ?

« Tout est pensé pour le passage et la circulation des machines », souligne Benoit Bougler, l’exploitant agricole partenaire du projet et compagnon depuis une quinzaine d’années de TSE. « Nous avions déjà réalisé des bâtiments solaires ensemble en 2009 », confie Mathieu Debonnet. L’agriculteur s’est lancé dans cette nouvelle aventure pour trouver une parade aux « perturbations environnementales ». « Ces dernières années, mes plantes ont souffert de stress thermique et hydrique qui ont impacté les rendements, notamment en blé et pomme de terre. L’agrivoltaïsme est une des réponses possibles », espère-t-il.

Un système d’irrigation intelligent a été greffé à la Canopée. ( © Julien Bru Studio)

Car les 5 500 panneaux bifaciaux doivent apporter plusieurs bienfaits pour les cultures. « Il s’agit de lutter contre quatre problématiques en expansion, le gel tardif et la grêle avec un effet couvercle protecteur, la sécheresse et les chaleurs extrêmes en créant de l’ombre », explique Serge Zaka, docteur en agroclimatologie. Une première Canopée, achevée en juin 2022 en Haute-Saône, apporte de premiers enseignements sur une culture de soja : un stress hydrique diminué de 75 %, des épisodes de grêle moins destructeurs, une température inférieure de 1,4° sous les panneaux.

Plus de 800 capteurs météorologiques, mécaniques et agronomiques équipent la Canopée de Brouchy pour continuer et approfondir les recherches. Des expérimentations complémentaires seront menées avec la chambre d’agriculture de la Somme. Sur les cultures non irriguées, l’essai portera sur les effets bénéfiques de l’ombrage. Sur les cultures irriguées, il scrutera les économies d’eau. « La priorité numéro un, c’est de ne pas mettre en péril les cultures, sinon tout cela n’a aucun sens », assène Mathieu Debonnet.

Un débouché économique garanti

L’énergie produite, qui assure un revenu complémentaire à l’exploitant agricole, est revendue à la société française bioMérieux, l’un des leaders mondiaux du diagnostic médical. Un contrat de 20 ans, avec un prix quasi fixe pendant cette durée, a été signé. « Nous avons un débouché garanti et cette entreprise sécurise une partie de son coût d’approvisionnement en électricité renouvelable », résume Mathieu Debonnet.

La hauteur des panneaux, 5 m, et l’espace entre les poteaux, 27 m, permettent le passage des machines agricoles. ( © Julien Bru Studio)

La France raccorde aujourd’hui 2 Gigawatt d’énergie solaire par an. Pour atteindre les objectifs fixés par l’Union européenne de 42,5% d’énergies renouvelables en 2030 (20 % aujourd’hui), il faudrait multiplier ces 2 GW par « quatre ou cinq », selon TSE. « L’agriculture est victime, cause mais aussi solution en matière de changement climatique. C’est une transition impérative pour les exploitants », affirme Olivier Dauger, administrateur à la FNSEA et coprésident de France Agrivoltaïsme. « En 1973, au moment du premier choc pétrolier, les panneaux solaires c’était pour les satellites et les calculatrices. Cela n’a pas toujours été le cas mais c’est aujourd’hui une énergie très compétitive », conclut Mathieu Debonnet.