Accéder au contenu principal
Changement climatique

L’élevage, particulièrement exposé au réchauffement de la planète


AFP le 17/06/2022 à 17:55
cow-g8c209526a_1280

(©Pixabay)

Avec des bovins qui sortent de leur zone de confort thermique à 22 degrés et des porcs à 25 degrés, les températures caniculaires comme celles de ces derniers jours confrontent les élevages à des problématiques de santé animale, mais aussi de rentabilité économique.

Entretien avec David Renaudeau, spécialiste des impacts de la chaleur de longue durée sur les animaux d’élevage à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae).

Les vagues de chaleur ont-elles des effets sur les animaux d’élevage ? 

« Les travaux montrent de plus en plus que ces vagues de chaleur, qui peuvent durer quelques jours, peuvent avoir des répercussions négatives sur la suite de la carrière de l’animal.

Des travaux montrent que les animaux ne récupèrent pas très rapidement et que ces vagues de chaleur perturbent leur capacité à consommer de l’aliment, à produire du muscle ou du gras. Ils vont aussi avoir des perturbations dans leur cycle de reproduction, ça a été assez bien documenté chez les jeunes vaches laitières.

On a un effet un peu « retard » qui commence à être mis en évidence et qui peut avoir des répercussions économiques importantes pour l’éleveur ».

Comment le réchauffement climatique va impacter l’élevage ?

« Le premier impact, et sans doute le plus important pour l’élevage, est la disponibilité et la qualité des ressources alimentaires pour nourrir les animaux. On s’attend globalement à des rendements de matières premières destinées à l’alimentation animale qui vont stagner, voire réduire, dans les années à venir.

Sur la valeur, on s’attend à des compositions des ressources qui vont changer et qui vont être moins intéressantes pour l’animal. On peut notamment avoir des problèmes de mycotoxines, qui sont des toxines qui se développent principalement sur les céréales, dont certaines peuvent entraîner des problèmes de reproduction et des maladies.

C’est clairement lié au changement du climat parce qu’il va faire chaud et humide pendant le développement du grain par exemple, ce qui entraîne des augmentations de risque de développement de moisissures et donc de production de ces mycotoxines.

Parallèlement, on a une augmentation de la population mondiale qui, d’une certaine manière, entre en compétition avec l’alimentation animale pour ces matières premières. Tout cela va se traduire par une augmentation très forte du prix des matières premières qui vont être rendues moins accessibles pour l’élevage compte tenu de leurs coûts ».

Des pistes sont-elles à l’essai pour contrer les effets du réchauffement climatique ?

« La sélection génétique est un levier important pour l’avenir. L’idée est de sélectionner des individus qui, au sein d’une population donnée, tolèrent mieux les effets de la chaleur.

A l’heure actuelle la sélection est un enjeu important mais ça reste de la science-fiction. On sait qu’on va pouvoir y arriver mais on ne sait pas quand.

Enfin, on construit des modèles mathématiques qui vont permettre de reproduire la situation actuelle et de simuler la situation future d’un élevage en utilisation des séries climatiques qui nous sont données par les prédictions du Giec, prédisant l’évolution du climat futur.

(…) Ces outils ont aussi pour vocation de faire prendre conscience à l’éleveur qu’il doit assez rapidement prendre des dispositions pour adapter son élevage au changement climatique… Avec un constat on sera capable d’expliquer à l’éleveur le temps qui lui sera nécessaire pour amortir ses équipements et comment va évoluer sa rentabilité économique ».