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Témoignages d'agriculteurs

« Faire parler le sol pour affiner la prise de décision »


TNC le 07/05/2021 à 10:05
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« Je pensais avoir une ferme homogène et que l’ajustement des doses devait se raisonner globalement, en fonction du potentiel de production recherché. J’ai dû revoir ma copie ! », témoigne Julien Baduraux, installé en Meurthe-et-Moselle. Avec l'aide d'outils « faisant parler le sol », « la règle "le bon produit, à la bonne dose et au bon endroit" » est, pour l'agriculteur, « plus que jamais d'actualité ».

« Que ce soit pour fertiliser ou protéger les cultures, je suis convaincu qu’un sol en bonne santé, riche en matières organiques et en azote, constitue le socle des itinéraires agroécologiques performants. Les plantes, bien nourries, sont plus résilientes et demandent moins de traitements », indique Julien Baduraux, agriculteur à Villers-le-Rond (Meurthe-et-Moselle), qui fait partie depuis cinq ans du réseau Dephy Fermes 30000.

« En lien avec ma coopérative EMC2, je viens de rejoindre le pôle expérimental de la ferme 112 dédié au secteur du numérique et géré par l’association Terrasolis, témoigne-t-il. Être en prise directe avec les innovations est toujours enrichissant, néanmoins mon rôle est de rappeler qu’au-delà de la performance des outils, l’agriculteur doit obtenir un retour sur investissement significatif. Pour ma part, l’enveloppe réservée à un OAD doit se situer entre 15 et 20 €/ha et par an ». Installé depuis 2004 sur 120 ha, l’agriculteur a déjà utilisé « de nombreux services fondés sur la télédétection de la biomasse par satellite ou par drone pour piloter la fertilisation, ou sur la climatologie pour suivre la pression maladie. J’ai même expérimenté des pièges connectés pour être alerté sur les dépassements de seuil des insectes du colza ».

« Je trouve que les outils faisant parler le sol sont ceux qui conviennent le mieux à mon exploitation. Avec mon conseiller de coopérative, j’ai donc choisi cette campagne le module Défisol d’InVivo qui gère à la fois la fertilisation azotée et la fumure de fond. Le diagnostic préalable de mes parcelles fondé sur l’analyse physico-chimique de mes sols a complètement changé ma perception. Je pensais avoir une ferme homogène et que l’ajustement des doses devait se raisonner globalement, en fonction du potentiel de production recherché. J’ai dû revoir ma copie ! » 

À titre d’exemple, « un premier profil pédologique a révélé une réserve utile de 260 mm. Dans un deuxième profil, effectué 150 m plus loin, elle est cinq fois moins importante ! Cela veut dire que sur cette zone, je vais moins produire avec en plus un risque de lessivage accru, sur un sol plus filtrant. La règle « le bon produit, à la bonne dose, au bon endroit » est plus que jamais d’actualité ! En conséquence, j’ai programmé un apport d’engrais de fond P et K en accentuant la dose de potasse sur les zones les moins fertiles. Quant à l’azote, c’est aussi raisonné en fonction des besoins de la plante, là encore en modulant les doses intraparcellaires dans le cadre de cinq passages sur blé, dont un apport organique à l’automne. Et si on veut réduire l’utilisation des engrais azotés, nous devons non seulement repenser notre manière de fertiliser, mais aussi s’intéresser aux mécanismes de nutrition des plantes avec l’aide de biostimulants et d’oligo-éléments ».

« La modulation intraparcellaire, la clé pour mieux positionner mes intrants »

De son côté, Florian Boyard, installé près de Nogent-sur-Seine, gère plus de 600 ha cette année, en comptant la surface de son exploitation, celle de son père et celles de ses clients. « Je viens, en effet, de doubler la superficie avec un contrat de gestion d’une ferme de 360 ha », explique-t-il. Pour l’agriculteur, l’objectif est de mettre à profit l’expertise qu’il a acquis depuis cinq ans pour piloter la fertilisation. « Je m’appuie sur la modulation intraparcellaire que je pratique depuis un an à l’aide du capteur frontal Crop Sensor attelé à l’avant de mon tracteur Claas ».

« Premier élément de recul sur la modulation de dose, laquelle est calculée en temps réel par l’outil selon le volume de biomasse : je positionne mieux mon engrais à partir des 3e et 4e apports d’azote. Je peux homogénéiser le taux de protéines à la parcelle en fonction d’un objectif de commercialisation des lots de blés et obtenir un gain de rendement dans les zones de mauvaise terre. Je n’ai pas baissé le volume total d’engrais. On ne peut pas faire l’économie d’une analyse de sol pour évaluer les besoins en fumure de fond et oligoéléments. Sur mes propres terres, j’envisage de moduler aussi les apports de potassium. En complément, les cartes de rendement que j’édite depuis cinq ans me servent de référence pour analyser mes pratiques. Quant aux OAD dédiés à la protection des cultures que je n’utilisais pas jusqu’à présent, je compte m’en servir pour raisonner la protection à la parcelle et non de façon globale. Je n’ai pas encore arrêté mon choix en blé. Pour le mildiou de la pomme de terre, je vais m’abonner à Mileos d’Arvalis. Je souhaite aussi moduler les doses de fongicide en fonction de la biomasse. »