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Homéopathie en vaches allaitantes

Yves Morel, éleveur, a divisé ses frais vétérinaires par cinq


Alimentation et fourrages le 09/02/2018 à 07:25
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Yves Morel, éleveur dans le Pas-de-Calais, soigne ses vaches allaitantes à l'homéopathie. Intégré à un groupe d'éleveurs, il a suivi plusieurs formations et s'est constitué « une pharmacie pour les 50 ou 100 ans à venir ».

Installé depuis 1987 avec son épouse à Bécourt (62), Yves Morel est à la tête d’une centaine de bêtes à viande dont 25 mères croisées Normande x Parthenais. Il produit également 200 veaux de boucherie de façon intégrée et cultive 45 ha.

Depuis 2014, Yves s’est joint à une quinzaine d’éleveurs autour d’une même volonté : s’orienter vers les « médecines alternatives » pour réduire les charges et améliorer l’état général de leurs troupeaux. Porté par la Chambre d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais, le groupe est devenu GIEE (groupement d’intérêt économique et environnemental) en 2016 suite à un programme de formation, de suivi et d’accompagnement technique. Après trois ans de pratique en homéopathie, l’éleveur a ouvert les portes de son élevage le 24 janvier pour faire son retour d’expérience.

L’éleveur a débuté l’homéopathie sur des problèmes de vêlages (non dilatation de la vulve, col qui ne s’ouvrait pas, vache qui ne pousse pas, etc.). Aujourd’hui, il a recours à l’homéopathie pour toutes les pathologies qu’il rencontre.

Il existe trois manières de pratiquer l’homéopathie : de façon uniciste (en n’utilisant qu’un seul remède pour une pathologie), pluraliste (en utilisant plusieurs remèdes complémentaires les uns des autres dans le temps) ou complexiste (en utilisant une préparation composée de plusieurs remèdes mélangés). Ça vous semble déjà compliqué ? C’est pour cette raison qu’une formation s’avère souvent indispensable afin de mieux appréhender la pratique.

Yves est plutôt uniciste : il préfère utiliser un seul remède. Cependant, trouver le bon n’est pas forcément facile ! « Le plus important est d’abord de bien connaître ses animaux, explique-t-il. Il faut longtemps les observer pour ensuite reconnaître les comportements anormaux lors d’une pathologie. Les symptômes sont les clés de détermination du bon remède. » Pour rappel, l’homéopathie est régie par la loi des semblables : « toute substance susceptible expérimentalement de provoquer chez un individu sain et sensible une série de symptômes est capable cliniquement de guérir un malade présentant les mêmes symptômes » (d’après le Civam 53).

« Il faut être patient pour pratiquer l’homéopathie », affirme l’éleveur. D’abord parce qu’il faut constamment se plonger dans un livre pour trouver le ou les remède(s) qui s’associe(nt) aux différents symptômes relevés, la « Bible » comme il l’appelle. Il faut aussi être prêt à essayer un autre remède si le premier employé ne fonctionne pas : « pour certaines pathologies, j’administre un traitement toutes les cinq minutes. Si au bout de 20 minutes je ne vois pas de différence, je change de remède tout en vérifiant que celui-ci n’est pas antagoniste du précédent.

L’éleveur a fait le choix de n’utiliser les granules d’homéopathie qu’en dilution, plutôt que d’administrer directement les graines dans la gueule des animaux. « Il faut que le remède soit en contact avec les muqueuses (bouche, vulve ou muqueuse nasale), affirme Yves. Pour ma part, je trouve que c’est plus facile de travailler en liquide en pulvérisant le remède sur le nez de l’animal qui se léchera ensuite plutôt que devoir l’attraper et lui ouvrir la gueule pour y déposer la graine, au risque de se prendre un coup de tête. »

Après avoir acheté les remèdes indispensables (soit une cinquantaine de tubes d’homéopathie), il s’est constitué une véritable pharmacie ambulante. Pour chaque tube d’homéopathie, Yves a prélevé deux granules qu’il a diluées dans des flacons en verre (1/3 d’alcool pour la conservation et 2/3 d’eau). Ces flacons servent ensuite de base pour chaque traitement : dès qu’il a besoin d’un remède, il prélève deux gouttes de la dilution initiale qu’il dilue une fois encore dans de l’eau distillée et pulvérise le tout sur l’animal. « En fait, je n’ai eu besoin que de deux granules de chaque tube. Ensuite, ce n’est que le remède dilué que j’utilise. Et par deux gouttes à la fois, ma pharmacie pour les 50 ou 100 prochaines années est faite » se félicite l’éleveur.

Yves met cependant en garde ceux qui souhaiteraient employer la même méthode : « Attention à toujours bien utiliser le même contenant pour chaque remède car certains sont antagonistes. De la même manière, il vaut mieux éviter de mettre le remède dans le bac à eau des animaux car celui-ci restera toujours présent et pourra causer des pathologies aux animaux sains (loi des semblables : on soigne le mal par le mal). Vous pouvez cependant pulvériser la ration à l’auge. »

Il y a trois ans, les frais vétérinaires annuels de l’exploitation s’élevaient à 2 600 €. Aujourd’hui, trois ans après l’initiation à l’homéopathie, les chiffres ont bien diminué puisque la facture s’élève aujourd’hui à 500 €/an. L’éleveur n’achète d’ailleurs plus aucun antibiotique. « Ce n’est pas le prix qui peut freiner un éleveur à s’orienter vers l’homéopathie mais le temps à y accorder, affirme Yves. À 2 € le tube de granules, ça ne ruine pas la ferme. On peut même acheter les tubes à plusieurs et se partager les granules puisqu’il n’en faut que deux pour faire la dilution. »

Au total, l’éleveur estime avoir dépensé une centaine d’euros dans les tubes et 200 € en flacons. « Il y en a pour plus cher en contenant qu’en contenu, ironise-t-il. » Il faut également compter le coût d’une formation puis l’achat de quelques livres.

Il conseille aux « débutants » de se focaliser sur une seule pathologie au départ en administrant quelques granules à l’animal malade (sans faire tout le protocole de dilution) afin de facilement vérifier les résultats et pouvoir être convaincu avant de se lancer sur d’autres pathologies.