Accéder au contenu principal
Surpêche

Un pas en avant pour protéger le thon obèse en Atlantique


AFP le 26/11/2019 à 07:25

Le secteur de la pêche a fait un premier pas lundi pour mieux protéger le thon obèse en Atlantique, menacé par la surpêche, en réduisant les prises pour deux ans, mais a échoué à s'entendre sur le requin-taupe bleu.

La population du thon obèse, ou Thunnus obesus, ou patudo, est mal en point : appréciée en conserve comme en sashimi, elle est victime de surpêche et d’une mortalité importante des thons juvéniles.

La Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA, ICCAT en anglais), qui regroupe une cinquantaine d’États, est chargée de fixer des niveaux de pêche pour plusieurs espèces de thonidés (thons, bonites, makaires, espadons) et de requins en Atlantique et en Méditerranée, dans le but d’assurer la conservation de ces espèces vivant en haute mer.

En 2018, la CICTA avait échoué à réduire les quotas de pêche du thon obèse. Cette année, au terme de huit jours de négociations très serrées à Palma de Majorque, en Espagne, ses membres se sont entendus pour un programme de reconstitution des stocks à l’horizon 2034.

Actuellement, les sept principaux pêcheurs de thons obèses – dont l’Union européenne ou encore le Japon – sont soumis à un quota annuel de 65 000 tonnes. Mais ce quota ne comprend pas d’autres pays, ce qui porte les prises totales à environ 77 000 tonnes. Le compromis adopté lundi prévoit que le quota baissera à 62 500 tonnes en 2020 puis 61 500 tonnes en 2021, mais aussi qu’un plus grand nombre de pays devront limiter leurs prises. Il a été décidé de réexaminer ensuite ces quotas.

Cette réduction « est assez modérée », a commenté Daniel Gaertner, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), chargé de l’évaluation des stocks.

En 2020, les principaux pêcheurs (plus de 10 000 tonnes) devront baisser leurs prises de 21 %, ceux qui capturent entre 10 000 et 3 500 tonnes de 17 %, entre 1 000 et 3 500 tonnes de 10 %. Les plus petits pêcheurs (moins de 1 000 tonnes) sont « encouragés à maintenir la prise et l’effort au niveau récent ».

« Ces mesures sont sévères, elles nous font mal, mais ça va dans le bon sens », a dit à l’AFP Yvon Riva, président d’Orthongel, l’organisation française des producteurs de thon surgelé.

« C’est une bonne nouvelle, mais nous sommes déçus que la surpêche continue », a réagi Grantly Galland de l’ONG Pew Charitable Trusts, qui plaidait pour un quota de 50 000 tonnes.

Pas de répit pour le requin-taupe bleu

D’autres espèces étaient au menu de la CICTA : pour le thon albacore, dont le quota de pêche à été dépassé de 26 % en 2017 et qui a fait pour la première fois l’objet d’une évaluation scientifique, il a été décidé que 110 000 tonnes annuelles seront pêchées à partir de 2020.

La CICTA a décidé de durcir le ton contre les DCP, des radeaux flottants servant d’appât pour les poissons, qui attirent beaucoup de jeunes thons. Leur nombre sera limité à 350 par bateaux en 2020 et 300 en 2021, contre 500 actuellement. Ils ne pourront pas être utilisés pendant deux mois de l’année en 2020 et trois mois en 2021 dans tout l’Atlantique, ce qui devrait réduire les prises de thons juvéniles.

Un autre enjeu de cette réunion était l’avenir du requin-taupe bleu. Requin le plus rapide au monde et en danger au niveau mondial car victime de surpêche, il a bénéficié cet été de la protection de la CITES, qui fixe les règles du commerce international de plus de 35 000 espèces sauvages. Mais la CICTA n’a pas réussi à s’entendre pour mieux le protéger. Une proposition, portée par une dizaine de pays, visant à interdire « de retenir à bord, de transborder ou de débarquer » des requins-taupes bleus de l’Atlantique Nord s’est heurtée à des contre-propositions de l’UE et des États-Unis.

« C’est une honte que des puissances de pêche comme l’UE et les USA s’opposent à une large coalition de pays et de scientifiques plaidant pour des mesures fortes contre les prises accessoires » de requins-taupes bleus, a critiqué WWF dans un communiqué.

A la fin des années 2000, la CICTA avait baissé drastiquement les quotas de pêche du thon rouge après des années de tergiversations. L’espèce était tellement mal en point que la CITES avait examiné une interdiction de son commerce international.