Accéder au contenu principal
Décapitalisation bovine

Si l’on ne fait rien, la France perdra 1,3 million de vaches d’ici 2030


TNC le 10/10/2023 à 05:01
Stabulationvide

Interbev craint que la décapitalisation bovine dégrade notre souveraineté alimentaire. (© TNC) (© TNC)

À l’occasion du Sommet de l’élevage, Interbev est revenu sur les perspectives pour la filière bovin viande. Si rien n’est fait, la ferme France pourrait passer de 7 à 5 millions de têtes de bovins d’ici 2035. Pour préserver l’autonomie alimentaire nationale, l’interprofession mise sur une atténuation de la décapitalisation, ainsi que sur une augmentation des engraissements en France.

La décapitalisation est une mécanique contre-intuitive. Depuis 2015, le nombre de têtes dans l’hexagone diminue, mais la baisse de la production de viande ne se fait sentir que depuis la fin 2021. Pendant près de 5 ans, les cessations ont alimenté l’activité des abattoirs. Car un éleveur qui arrête les vaches, c’est de la viande en plus pour la filière ! Du moins à court terme…

1,3 million de bovins en moins en 2030

Mais aujourd’hui, les chiffres donnent le tournis. La France a perdu 910 000 bovins en 7 ans, et si rien n’est fait pour arrêter la décapitalisation, « on passera de 7 millions de bovins en 2023 à 5 en 2035 », décrit Matthieu Repplinger, analyste de marché pour Interbev. La France perdrait alors 1,1 million de vaches allaitantes, et 800 000 vaches laitières sur 12 ans.

Le cheptel allaitant pourrait avoisiner les 2,5 millions de têtes en 2035. (© Interbev)

Face à l’ampleur de la baisse des cheptels, Interbev commence à questionner la notion de souveraineté alimentaire nationale. La production française de viande bovine couvre aujourd’hui 90 % de nos besoins. Si rien n’est fait, la France sera autosuffisante à hauteur de 67 % en 2035. « C’est la porte ouverte à l’importation », déplore l’analyste.

Deux scénarios pour enrayer la décapitalisation

Pour préserver la souveraineté alimentaire nationale, Interbev a travaillé sur deux scénarios. Un premier basé sur la poursuite de la baisse des cheptels, mais avec une relocalisation de l’engraissement, et un second tablant sur une stabilisation du cheptel allaitant à son niveau de 2023. Sans répondre à la question de l’autosuffisance alimentaire, ces scénarios permettraient de limiter la casse.

« Faire une croix sur l’export peut être une solution de court terme pour maintenir le niveau de production » détaille Matthieu Repplinger. Engraisser la totalité de la suite du troupeau allaitant en France permettrait d’atteindre un niveau d’autosuffisance de 88 % sur la viande bovine. « Mais le stock d’animaux n’est pas infini. Il sera tôt ou tard rattrapé par la décapitalisation », poursuit l’expert.

la France a perdu 551 000 vaches allaitantes en 7 ans. (© Interbev)

L’option de la stabilisation du nombre de mères allaitantes apparaît plus pérenne, mais suppose davantage d’efforts à court terme. « Cela se traduirait par une baisse rapide de la production sur les deux années qui viennent. Il faudrait abattre moins de génisses, et garder des vaches étant donné que la baisse des cheptels alimente actuellement le marché. »

Manque de rémunération

Mais l’interprofession du bétail et de la viande en est consciente, le manque de rentabilité sur la filière allaitante ne pousse pas à l’installation en bovin viande. Sur ce sujet, Emmanuel Bernard, président de la section bovine d’Interbev, se répète « La contractualisation des vaches, c’est notre capacité à produire de la viande demain ! ».

La conférence d’Interbev au Sommet de l’élevage aura donc été l’occasion de présenter les premiers chiffres de l’observatoire de la contractualisation mis en place par l’interprofession. Au 30 juin 2023, 17 % des volumes abattus en France faisaient l’objet d’un contrat. « On progresse », note Annick Jentzer, « on voit qu’il est possible de contractualiser, dans une filière où la tradition orale était la norme jusqu’à présent ».

17 % des bovins abattus faisaient l’objet de contrat au 30 juin 2023. (© Interbev)