Quelques conseils pour une mise à l’herbe réussie en vache allaitante
TNC le 02/04/2024 à 05:18
Pour éviter les carences à la mise à l’herbe, Jérémy Douhay, chargé d'étude en bovin viande à l’Institut de l’élevage, donne quelques astuces. En tête de liste : une transition progressive vers le tout pâturage, et une complémentation minérale adaptée, notamment en magnésium.
« La mise à l’herbe des vaches allaitantes fait partie des périodes sensibles sur le plan alimentaire », introduit Jérémy Douhay, chargé d’étude en élevage bovin allaitant pour l’Institut de l’élevage. Et pour bien piloter cette période, il donne quelques astuces.
La première : sortir les vaches avec la panse pleine. « L’herbe de printemps est riche en eau, sucres et azote soluble. Autant d’éléments qui favorisent l’accélération du transit, et peuvent nuire à l’absorption de certains macro-éléments, dont le magnésium ». Sortir des animaux avec le rumen déjà encombré de fourrage grossier permet alors de réaliser une petite transition. L’objectif : ralentir le transit et favoriser l’absorption digestive. « Cela reste plus brutal qu’en vaches laitières, où les vaches commencent la saison avec quelques heures de pâturage par jour, mais c’est mieux que rien », résume le chargé d’études.
Pour la transition, il est recommandé de proposer un fourrage grossier en complément du pâturage, dans un râtelier près du point d’abreuvement. « Il faut quelque chose de fibreux, comme de la paille ou du foin, qui favorise la rumination », ajoute Jérémy Douhay. Compter alors une dizaine de jours d’affouragement partiel pour assurer la transition.
Une complémentation minérale aux petits oignons
Parmi les points de vigilance figure également la complémentation minérale. Le risque : avoir des cas de tétanie d’herbage. « Il s’agit d’une carence en magnésium sanguin », résume le chargé d’études. En cause ? Une augmentation des besoins en Magnésium de l’animal liée à l’augmentation de son activité musculaire au pâturage, et au stress causé par le transport et le remaniement des lots. Autant d’éléments consommateurs de magnésium. Baisse d’ingestion, symptômes musculaires, démarche raide ou encore bovin couché au sol avec des contractions musculaires sont alors symptomatiques d’un déséquilibre entre les exports et les imports en Mg.
Jérémy Douhay insiste « il n’y a pas de minéral universel ». En plus du magnésium, calcium et phosphore comptent parmi les minéraux essentiels à la bonne santé des bovins. « Pour que le magnésium soit absorbé de manière optimale, il faut du calcium et du sodium. D’autant que ces éléments jouent également un rôle dans la mise à la reproduction, comme l’ovulation, l’expression des chaleurs et le maintien de la gestation. La vitamine D joue également un rôle clé dans son absorption. En bref, préférez une complémentation complète pour éviter toute carence. Mais il est également important de relever que les déséquilibres en minéraux se font plus rares chez les bovins viande, du moins chez les animaux d’élevage.
Rôles principaux |
Situations à risque |
Impact en cas de déséquilibre |
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Calcium |
Squelette, contractions musculaires, équilibre sanguin, production laitière |
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En carence, il peut engendrer des fièvres de lait ou fractures osseuses. |
Phosphore |
Squelette, métabolisme énergétique. Joue un rôle tampon pour le pH ruminal |
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En carence, il entraîne une chute de la croissance, des boiteries, une baisse de la production comme de la fertilité En excès, il peut entraîner une atonie utérine et une baisse de la fertilité. Excrété dans les bouses, il peut également entraîner une pollution. |
Magnésium |
Métabolisme énergétique et musculaire |
Mise à l’herbe |
En carence, il peut entraîner des tétanies, des non-délivrances et retentions placentaires, ainsi qu’un ralentissement de la croissance. |
Sodium |
Influx nerveux, contractions musculaires et équilibre sanguin |
Apport en sel insuffisant |
En carence, perte d’appétit. Combiné avec une carence en potassium, il peut entraîner une acidose. |
Potassium |
Influx nerveux, contractions musculaires et équilibre sanguin |
Excès de fourrages riches dans la ration |
En excès, il accélère le transit et la mobilisation des graisses. Il augmente aussi le risque de carence en sodium. Au tarissement, il augmente le risque d’œdème mammaire. |
Soufre |
Synthèse protéique dans le rumen |
Excès d’azote non protéique |
Il entraîne une baisse de la consommation de fourrage, et de la synthèse des protéines dans le rumen. |
Rôle et principaux signes d’alertes pour les minéraux, d’après l’Institut de l’élevage
Un bolus pour bien démarrer la saison ?
Seaux à lécher, bolus, poudre… Toutes les modalités d’administration sont possibles. « Les granulés et poudres permettent de gérer individuellement les apports mais supposent que la ration soit distribuée à l’auge ». Le bolus assure également une complémentation plus ciblée, mais suppose une contention pour l’administrer. Le seau à lécher est peut-être la solution la plus facile d’utilisation, mais sans maitrise de l’ingestion.
La complémentation est également à moduler au regard des variations climatiques. « Avec les sécheresses, lorsque l’offre en herbe diminue dans les pâtures, la teneur en vitamine diminue » résume Jérémy Douhay. D’autant que cette période coïncide généralement avec la préparation au vêlage pour les vêlages d’automne. « Le sec arrive souvent en juin-juillet, les vaches en vêlage d’automne sont dans leur dernier tiers de gestation. Administrer un bolus sur cette période peut permettre de faire d’une pierre deux coups ». En bref, une manière de pallier les déséquilibres alimentaires liés au pâturage et d’aider à la préparation au vêlage.
Selon les besoins, un traitement antiparasitaire est un plus. Mais tout dépend de l’état du troupeau. « A ferm’Inov, on mise surtout sur la prévention avec des coproscopies et une utilisation raisonnée des traitements antiparasitaires ». Le pâturage tournant permet alors de rompre le cycle des parasites. « L’essentiel, c’est de ne pas faire des traitements dans le vide s’il n’y a pas de problème ».