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Journée des droits des femmes

Perrine Sourice (49) : elle n’est pas née éleveuse, elle l’est devenue !


TNC le 08/03/2019 à 05:54
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Passionnée par l’élevage, Perrine Sourice gère seule un troupeau de 150 animaux limousins. « Comme n’importe quel éleveur », elle travaille beaucoup et se fait aider pour certains travaux. Du haut de ses 26 ans, la jeune éleveuse s'est installée hors cadre familial et ne regrette pas son choix, même si « être cheffe d'entreprise c'est aussi ne pas compter ses heures ».

Depuis un an, Perrine Sourice, 26 ans, pilote l’exploitation bovine de la Judonnière au Puiset-Doré dans le Maine-et-Loire. Entre les 55 vaches limousines, les génisses de renouvellement et les jeunes mâles engraissés un an avant d’être vendus, elle soigne chaque jour 150 animaux. Une responsabilité qu’elle semble assumer avec un certain naturel, bien qu’elle ne soit pas née dans une ferme.

« Mes quatre grands-parents étaient agriculteurs et mon oncle élevait des charolaises, raconte-t-elle. À quatorze ans, j’allais chez lui avec mon scooter le mercredi et le week-end. C’était d’abord pour m’occuper de sa jument, mais j’aimais bien l’aider auprès des vaches. » Attirée par les chevaux, la collégienne suit un CAP soigneur d’équidés en alternance. Elle réalise qu’il n’est pas facile de percer dans ce milieu et qu’elle aime surtout « faire naître les poulains ». Elle choisit alors un bac professionnel CGEA (conduite et gestion d’exploitation agricole) en alternance.

« Déplacer les animaux seule, simplement avec les barrières »

En trois ans, elle passe de nombreuses semaines chez un sélectionneur de la race Rouge des prés (viande AOC Maine Anjou). « Il m’a transmis sa passion pour les vaches et la génétique. Nous avons participé à des concours, des ventes de reproducteurs. Il fallait préparer les taureaux, les dresser. Ce travail en relation avec les animaux me plaisait. » La jeune femme effectue aussi des stages en élevages laitiers, avicoles et porcins, dans le berceau de la race charolaise en Saône-et-Loire, et jusque dans une manade de tourisme équestre en Camargue.

Après son BTS Acse (analyse et conduite des systèmes d’exploitation) en apprentissage, elle trouve seulement des offres d’emploi en production laitière. « Aujourd’hui je comprends : en viande bovine, il n’y a pas une paye de lait chaque mois pour rémunérer un salarié. » En travaillant à temps partiel chez plusieurs éleveurs, elle découvre la ferme de la Judonnière. « Elle m’intéressait car les bâtiments sont groupés et les 74 hectares attenants. C’est un très gros avantage : je peux déplacer les animaux seule, simplement avec un seau de farine et en ouvrant les barrières. Le cheptel inscrit au herd-book me permettait de faire de la sélection. Enfin, je savais que les bâtiments volailles étaient indispensables pour gagner ma vie. »

 « Que l’on soit homme ou femme… »

Perrine étudie la transmission avec le cédant et devient cheffe d’exploitation le 1er janvier 2018. « Seule, c’est possible mais il faut être très bien organisée et trouver des techniques pour faciliter le travail et gagner du temps. J’utilise beaucoup les barrières, ainsi qu’un couloir de contention pour tondre les veaux. Que l’on soit homme ou femme, il faut toujours rester vigilants avec des animaux. L’inscription au herd-book impose un contrôle trimestriel des performances via la pesée : j’en profite pour me faire aider du technicien pour l’écornage. Je m’efforce d’être autonome au maximum, et quand j’ai besoin d’aide, je sollicite mon conjoint : il est autoentrepreneur et peut se rendre disponible. Il est vrai que sa présence a joué dans ma décision de m’installer. »

Pour les travaux des champs, Perrine s’appuie beaucoup sur la Cuma et confie les récoltes à une entreprise de travaux agricoles. Au moment des ensilages, « il faut être nombreux comme dans n’importe quelle exploitation » et elle trouve de l’aide autour d’elle. Quant aux mises-bas, elle compte sur la rusticité et la facilité de vêlage de la race limousine, tout en surveillant autant qu’elle le peut (elle habite à 3 km), en particulier les primipares.

 « La liberté de travail est aussi une contrainte »

La jeune éleveuse vend une vingtaine de bovins mâles par an, ainsi que les vaches réformées et parfois des génisses. « Ma dernière vache, âgée de plus de neuf ans, est partie pour 3,96 €/kg. Pour la dernière génisse, c’était 4,12 €/kg. C’est compliqué de dégager un salaire » constate Perrine, qui a emprunté 240 000 euros pour s’installer, en étant simplement locataire des terres et des bâtiments. « Il faut essayer de trouver des marchés plus valorisants. En 2018, j’ai vendu trois bêtes en direct en caissettes. C’est une piste à développer. Et puis mon objectif est d’arriver à commercialiser des taureaux grâce à la sélection. »

Perrine est heureuse de son choix : travailler au grand air, au contact des animaux, vivre sa passion, être décideuse. Sans l’idéaliser. « La liberté et la souplesse de travail du chef d’entreprise, ce sont aussi des contraintes car on ne compte pas ses heures. Le week-end, j’essaie de travailler seulement le matin. Embaucher un salarié, je ne suis pas contre, mais c’est impossible aujourd’hui. »