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[Interview] Respect de la loi Egalim

Patrick Bénézit (FNB) : « Il manque encore 10 % sur le prix pour couvrir nos coûts »


TNC le 03/10/2023 à 15:47
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Avec Cédric Mandin, Patrick Bénézit (à droite), président de la FNB, attend un soutien politique fort en faveur du modèle d'élevage français. (© TNC)

Devant le ministre de l’agriculture au Sommet de l’élevage, le président de la FNB réclame la pleine application de la loi Egalim pour que l’intégralité des coûts de production des éleveurs soient répercutés sur les prix de vente.  Avec l’ensemble de la profession, il demande aussi un soutien politique clair en faveur du modèle d’élevage à la française face à « des importations qui ne respectent aucune de nos normes ».

À l’ouverture du Sommet de l’élevage mardi 3 octobre 2023, Patrick Bénézit, le président de la FNB, a interpelé le ministre sur le « chemin qu’il reste à faire » pour une pleine application de la loi Egalim.

Qu’attendez-vous du ministre de l’agriculture, qui inaugure le Sommet de l’élevage mardi 3 octobre, et du ministre de l’économie, qui pourrait y venir en fin de semaine ?

Patrick Bénézit : Le premier point – le plus important – est que les éleveurs doivent être bien rémunérés. Et en termes de prix payés aux producteurs, nous ne sommes toujours pas au niveau des coûts de production.

En broutards, les coûts sont à 4,10 € alors que les prix ne sont montés qu’à 3,70 €, voire 4 € mais pour quelques catégories seulement. En jeunes bovins, les prix sont autour de 5,3 € alors que les charges sont plutôt à 6 €. Et pour les vaches, les prix sont à 5,50 € pour des charges à 6,10 €. Les lois Egalim vont dans le bon sens mais on n’est pas encore à l’objectif. Ce qui est certain, c’est que la pérennité de notre système d’élevage passe par la rentabilité. Nous on y croit : la décapitalisation n’est pas irréversible. S’il y a une volonté politique conforme, on peut inverser la tendance.

Pourquoi présenter un « manifeste » en faveur de l’élevage au ministre ?

À travers ce manifeste, nous demandons la reconnaissance et la mise en avant de notre modèle d’élevage. C’est important en ces temps d’inflation. On entend trop peu, dans la parole publique, que notre modèle d’élevage est vertueux et qu’il faut le défendre face à d’autres qui existent dans le monde.

En France, notre modèle d’élevage est basé sur les 13 millions d’hectares d’herbe, sur la polyculture-élevage qui permet l’autonomie grâce à une production fourragère et de céréales issue directement des exploitations. C’est un modèle qui façonne les territoires. Quand il n’y a plus d’élevage, il n’y a plus rien !

300 000 tonnes de viande importée d’Amérique latine, c’est déjà trop !

Quand on dit cela, cela signifie que nous n’avons pas besoin d’accords commerciaux supplémentaires ! Rappelons que l’Europe a importé 300 000 tonnes de viande d’Amérique du Sud dans le cadre du Mercosur. 300 000 tonnes, c’est déjà trop ! Elles ne sont pas produites dans les conditions exigées par la Commission européenne. Sans parler des hormones, il y a des activateurs de croissance – interdits chez nous – des durées de transports qui ne respectent pas nos standards et des produits utilisés pour la production de cultures fourragères qui sont eux-aussi interdits en Europe.

Vous dénoncez aussi le projet de directive sur les émissions industrielles. Pourquoi ?

P. Bénézit : Tout ce qui est autorisé chez eux est interdit chez nous. Avec le projet de directive IED, on ne comprendrait pas que des élevages français de 150 UGB soient classés « élevages industriels » et que, dans le même temps, on déroule le tapis rouge à de la viande issues de feedlots australiens ou américains de 30 000 têtes qui ne respectent aucune de nos normes. Ça n’aurait aucun sens. Il y a, il me semble, une certaine cohérence politique à avoir.