Accéder au contenu principal
Pilotage de l'atelier laitier

Les marges sur coûts alimentaires en lait battent des records en Normandie


TNC le 15/01/2024 à 08:31
Capture

Des coûts alimentaires en hausse mais des prix du lait exceptionnels ont permis une augmentation des marges sur coûts alimentaires au cours des deux dernières campagnes. (©Emmanuelle Bordon)

Le calcul des marges sur coûts alimentaires permet un pilotage de l’atelier lait au jour le jour. Littoral Normand a analysé celles de ses adhérents sur les deux dernières campagnes et montre que, même si les coûts alimentaires ont connu une progression exceptionnelle ces deux dernières années, la hausse sans précédent des prix du lait a permis des marges elle aussi en forte hausse.

Des coûts alimentaires en augmentation mais un prix du lait qui a quand même permis des marges élevées. C’est le bilan établi sur les campagnes laitières 2021-2022 et 2022-2023 par Littoral Normand, société de conseil en élevage, d’après l’étude des chiffres de ses adhérents (3500 élevages, 290 000 vaches laitières).

La marge sur coûts alimentaires (MCA) est calculée de la manière suivante : production – coûts alimentaires

(© Littoral Normand)

La production correspond à l’addition du lait vendu (à la laiterie et en vente directe), du lait donné aux veaux et du lait jeté.

Les coûts sont les suivants :

– Les semences ;

– Les engrais et les traitements ;

– Les frais de récolte (y compris les bâches, les ficelles, etc.) ;

– Eventuellement les fourrages achetés ;

– Les concentrés ;

– Les compléments minéraux et vitaminiques.

Hausse des prix des matières premières…

Fabien Bregeault, référent technico-économique chez Littoral Normand, a calculé les MCA de ses adhérents pour les deux dernières campagnes : 2021/22 et 2022/23. Les chiffres montrent, sur ces deux années, une augmentation importante des coûts de production.

Le prix des engrais a en effet fortement fluctué et augmenté. L’ammonitrate 33.5, qui sert de référence, coûtait en moyenne 260 €/t au cours de la campagne 2021/2022 et 590 € pendant la suivante. La plus grande partie des achats a été réalisée aux alentours de 200 € en 2020 (pour la campagne suivante) et 400 € l’année d’après. Mais au vu des fluctuations, il apparaît que certains exploitants ont acheté de l’ammonitrate au prix de 800, voire parfois 1 000 € la tonne.

Le tourteau de soja a lui aussi connu une forte hausse de son prix. Vendu 440 €/t en moyenne pendant la campagne 2021/2022, il coûtait en moyenne 560 € pendant la suivante. Il a également connu un pic au printemps 2022, en raison du conflit en Ukraine.

Le tourteau de colza a quant à lui connu une augmentation de 60 €/t. Au printemps 2022, il a atteint 560 €/t, ce que Fabien Bregeault qualifie de « prix jamais vu ».

Enfin, le prix du blé a aussi augmenté : de 260 €/t au début de la période étudiée à 330 € au printemps 2022. « Et même si les prix ont baissé à la fin de la période, la plus grande partie des achats réalisés par les fabricants d’aliments l’a été au prix fort », souligne le spécialiste.

Résultat : une augmentation des coûts alimentaires en général et des coûts de concentrés en particulier. Ces derniers ont, par exemple, fait un bond de 61 € à 81 €/1 000 l entre les deux campagnes étudiées.

Le coût des prairies a lui aussi augmenté, de 112 € par hectare à 162 € par hectare, d’une campagne à l’autre.

…mais augmentation du prix du lait

À ces effets de conjoncture s’ajoutent ceux de la météo : en 2022, la sécheresse a fortement pénalisé les rendements du maïs. Alors qu’ils se situaient généralement entre 13 et 15 tonnes de matière sèche à l’hectare, ils n’ont été que de 12 tonnes en moyenne.

De tels chiffres pourraient être inquiétants. Ils doivent cependant être mis en rapport avec ceux du lait. Le prix de base du lait standard a atteint 349 €/1 000 l sur la campagne 2021/22 et 429 €/1 000 l sur la campagne 2022/23. « Une augmentation rarissime », commente Fabien Bregeault.

Par conséquent, le calcul de la MCA moyenne montre qu’elle est de 303 €/1 000 l durant la campagne 2021/2022 et de 364 € au cours de la campagne 2022/23. « Alors que ce chiffre tourne généralement autour de 280 € pour 1 000 l, il s’agit d’un niveau de marge exceptionnellement haut », pointe Fabien Bregeault.

Le même calcul par vache et par jour donne quant à lui un chiffre de 5,95 € en 2021/22 et 7,06 € en 2022/23.

Le calcul montre des MCA moyennes exceptionnelles sur les deux dernières campagnes laitières. (© Littoral Normand)

« L’étude des MCA montre donc que malgré l’augmentation des coûts, la période était favorable, commente Fabien Bregeault. Il n’y avait donc pas lieu de diminuer les quantités de concentrés distribués, par exemple ».

Les MCA, un outil de pilotage en temps réel

La marge sur coût alimentaire est un outil phare du pilotage d’un troupeau laitier. Elle permet d’aller au-delà de la simple observation des coûts, pour calculer exactement la rentabilité d’un atelier à un moment défini.

Même si cette approche est partielle et ne préjuge pas du revenu, puisqu’elle ne tient pas compte des charges de structure, elle constitue un outil qui peut être mis en œuvre facilement, à chaque fois que c’est nécessaire. Simple et rapide, elle permet d’être réactif puisqu’elle peut être calculée en temps réel. Fabien Bregeault recommande des points d’étape réguliers (trimestriel, annuel…) et de se comparer aux autres, par exemple dans les groupes de travail.