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Consommation de viande bovine

Les Français consomment de plus en plus de viande bovine importée


TNC le 11/06/2024 à 15:00
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Les imports de viande bovine sont surtout prégnants en restauration hors-domicile. Les burgers, souvent fabriqués avec de la viande française, résistent à cette tendance. (© weyo, Adobestock)

L’inflation de 2022 et 2023 a provoqué un retour en force du critère « prix » dans les choix d’achat des consommateurs français de produits animaux. Si la demande en viande bovine reste présente, elle se tourne de plus en plus vers la viande transformée et la RHD, ouvrant un peu plus la porte aux origines d’import.

Où en est la consommation française de produits animaux et notamment bovins ? Dans un webinaire du bureau d’étude Abcis sur le thème « production animales, déclassement ou sursaut ? », l’agroéconomiste Mathieu Désolé a souligné un maintien des volumes consommés en 2023, mais une baisse en gamme.

Côté consommation individuelle, toutes viandes confondues, « on note depuis 2019 une forme de stabilisation autour de 85 kéc/habitant/an » après une baisse pendant une vingtaine d’années. Les dynamiques de production varient cependant selon les productions.

En 2023, les Français ont ainsi consommé 21,3 kéc de viande bovine en moyenne chacun, une baisse de 4 % sur un an, tandis que le poulet prenait l’avantage avec 23,7 kéc/hab./an (+ 3,6 %) et que le porc continuait de caracoler en tête, à 30,6 kéc/hab./an (- 4 %).

En dix ans, la consommation de viande bovine par habitant a baissé de 9 % et celle de produits laitiers de 4 %, tandis qu’on assiste à un bond de 16 % pour la viande de volaille et les œufs. (© Abcis d’après Agreste, SSP, douanes)

Des choix de consommation impactés par l’inflation record

Bien que le pic d’inflation de 2022 (+ 7 % en France) s’éloigne, les effets de la hausse brutale des prix restent « conséquents et durables dans le temps » et ont affecté les choix des consommateurs.

Avec la hausse des prix des matières premières, « tous les produits ont subi l’inflation, y compris la viande de volaille réputée moins chère », reprend Mathieu Désolé. Qui pointe des disparités en viandes bovines : « les pièces déjà très chères ont subi l’inflation de façon moins forte que les pièces à bouillir ou à braiser, qui ont pris 11 % pour le bœuf ».

Les pièces de viande bovine à bouillir ont connu une plus forte inflation que les pièces à griller en 2023, mais leur prix restait inférieur. (© Abcis, d’après Kantar)

Il souligne en parallèle une envolée de la transformation de viande bovine en France par rapport à la forme piécée : « en 2022, la part de la transformation était significative pour la plupart des catégories, y compris pour les races à viande – 52 % pour les vaches et 43 % pour les génisses mais seulement 24 % pour les jeunes bovins mâles français, plutôt destinés à l’export ».

La viande bovine d’import gagne du terrain, portée par la RHD

Et « cet essor de la transformation de viande, c’est aussi un appel d’air pour la viande d’import », analyse l’économiste. Si la consommation française globale de gros bovins s’est stabilisée ces dernières années autour 1,3 Mtéc, son origine évolue : 23,2 % de ce volume étaient importés en 2022 contre 21,7 % en 2017, « et cette part risque d’augmenter » à l’avenir.

Ces imports sont surtout portés pas les femelles de réforme laitières et mixtes, pourvoyeuses de viande hachée. Ils sont surtout prégnants en restauration hors-domicile (RHD) — 55 % de son approvisionnement -, mais aussi dans les plats préparés vendus en grandes et moyennes surfaces (GMS).

La RHD est d’ailleurs le premier débouché des importations de viandes bovines étrangères : 63 % des volumes importés lui sont destinés, 8 % des volumes importés vont vers la boucherie, 11 % vers les GMS et 18 % vers les plats préparés industriels.

Cette orientation de la RHD vers les viandes d’import est surtout portée par la restauration commerciale, la réglementation (loi Egalim, loi antigaspillage) poussant davantage la restauration collective à se tourner vers l’origine France.

Valeur forte de la restauration, au-delà du fast-food, « le burger amène une forme de résistance à cette tendance de la RHD à fortement importer », nuance Mathieu Désolé, car « pour des raisons sanitaires et d’image », il fait appel à de la viande hachée souvent fraîche et française.

Une moindre consommation de produits laitiers sous signes officiels de qualité

Du côté des produits laitiers, on assiste aussi à une stabilité de la consommation française globale depuis 2010, mais une baisse à l’échelle individuelle due à l’accroissement de la population, baisse surtout visible pour les produits « leaders » (produits liquides conditionnés, yaourts, desserts frais).

Alors que le prix des produits laitiers en GMS a grimpé de 8 % en 2022 puis de 14,8 % en 2023, on peut aussi noter un effet de l’inflation sur la consommation : « les produits des marques nationales sont un peu boudés par rapport aux marques de distributeurs », qui ont progressé sur quasi tous les segments en 2023.

Cet « effet inflation » a au contraire fait reculer la consommation de produits issus du lait bio en 2022 puis en 2023 : la part de marché du lait liquide bio vendue aux ménages est par exemple passée de 12,4 % à 10,7 % en deux ans.

Constat similaire sur les fromages de lait de vache AOP, qui connaissent une « baisse nette » de la consommation ces deux dernières années, « malgré la fidélisation des consommateurs ».