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Crise du fipronil, poules en cage...

La filière œuf a su dépasser les crises qui couvaient


AFP le 10/10/2019 à 10:35

Crise du fipronil, poules élevées en cages, massacre des poussins mâles... Touchée ces dernières années par différentes polémiques, la filière œuf a amélioré certaines pratiques alors que, dans l'assiette, l'œuf a toujours la cote.

« L’œuf est un produit peu onéreux et cher à nos cœurs qui est consommé dans le monde entier », résume Philippe Juven, le président de l’interprofession CNPO, alors qu’a lieu vendredi et dans 40 pays la 24e édition de la journée mondiale de l’œuf.

L’occasion de montrer comment la filière a géré certains scandales, dont celui à l’été 2017 de la contamination d’œufs en Europe du Nord et de l’Est par du fipronil, un anti-parasite interdit dans la chaîne alimentaire, qui a provoqué des abattages massifs de volailles.

« On a montré qu’il n’y avait pas de produit illicite en France », se félicite Philippe Juven. « Cela montre toute l’importance des démarches de traçabilité ».

Dans ses cartons, le Comité national pour la promotion de l’œuf avait un projet et cette crise a incité l’organisation « à mettre en place le plus rapidement possible » le label « Œufs de France », au printemps 2018.

Indissociables de l’œuf, poules et poussins défraient également la chronique en raison de leurs conditions de vie et d’élevage. « La filière a pris l’engagement d’avoir une poule sur deux en élevage alternatif d’ici 2022. On est en avance, l’objectif sera atteint en 2021 », claironne ainsi Loïc Coulombel, vice-président du CNPO. L’enjeu consiste à délaisser les cages dans lesquelles les poules sont le plus souvent parquées pour un cadre de vie plus épanoui. La part des poules d’élevages français dits alternatifs a ainsi doublé en dix ans pour s’établir à 42 % en 2018, assure le CNPO. Lors des cinq dernières années, les effectifs en cages ont, eux, reculé de 3,7 %, au bénéfice du bio (+ 27 % de pondeuses au premier semestre).

« On ne peut pas nier, les choses avancent », reconnaît Hélène Gauche, chargée de relations agroalimentaires chez L214.

L’enjeu des poussins mâles

« Il existe un mouvement de sortie des cages. Mais tous les producteurs n’ont pas pris d’engagements… Nous leur demandons de prendre celui d’abandonner complètement les cages d’ici 2025. En juin, le groupe Avril a fait bouger les lignes en s’engageant en ce sens », poursuit-elle.

Car l’œuf, universel et multiple (bio, label rouge, élevage au sol, ovo-produits…), reste l’un des ingrédients plébiscités des Français dont le prix de vente oscille entre 10 (entrée de gamme)et 40 centimes (œuf bio) pièce.

En 2018, les ventes ont encore progressé de 1,9 %. Le marché français, qui représente 46 millions de poules et 14,3 milliards d’œufs disséminés dans 2 300 élevages, pèse même 12,3 % de la production européenne, selon le CNPO.

Cette activité provoque néanmoins des victimes collatérales, en particulier les poussins mâles, considérés comme inutiles et jusqu’ici systématiquement éliminés à la naissance. « C’est inacceptable, critique encore Hélène Gauche, et le « sexage » (la connaissance depuis l’œuf du sexe du futur poussin), est un enjeu énorme pour la filière ». « On attendait une législation qui n’est pas venue. Si cela traîne, on pourrait devenir plus actif car il n’y a aucune raison que la filière n’agisse pas rapidement », prévient-elle.

L’industrie s’est emparée du sujet, notamment en Allemagne via un prélèvement intrusif dans l’œuf pour déterminer génétiquement le sexe et en France via une méthode optique « in ovo » développée par l’entreprise Tronico, mais aucune technique n’est actuellement commercialisée à grande échelle. « On ne peut pas parler de balbutiements mais on est encore loin d’atteindre les objectifs fixés », déplore Maxime Chaumet, le secrétaire général du CNPO. D’ici peu, la technologie pourrait pourtant mettre fin à ces « génocides » traumatisants.

Restera ensuite à régler la question « des becs que l’on coupe, des problèmes de densité, d’absence de lumière naturelle ou encore la fin de vie des poules pondeuses », poursuit la militante de L214. Pour ces dernières, aujourd’hui tuées à 18 mois quand leur fertilité décroît, le petit producteur d’œufs Poulehouse propose une initiative marginale : il offre à ses poules pondeuses, logées et nourries jusqu’à leur mort naturelle, une retraite bien méritée.