Génétique et précision pour des vaches à 13 500 kg de lait au Gaec Dynamilk (62)
TNC le 06/06/2025 à 05:24
Situé dans le Pas-de-Calais sur la Côte d'Opale, le Gaec Dynamilk (62) c'est un couple passionné par la Prim'holstein, un haut niveau génétique, des résultats en concours et une belle reconnaissance par la vente d'animaux. Rencontre avec Mélanie et Matthieu Bodin, deux jeunes éleveurs motivés par le lait.
« C’était la ferme de mes parents, explique Mélanie Bodin. Ils y faisaient du lait et des cochons. J’ai repris l’atelier lait en 2010, avec les terres d’une autre structure à 12 km et mon mari Matthieu s’est installé à son tour en 2018 en reprenant des terres à 4 km d’ici. Comme on ne voulait pas s’associer pour préserver l’entente familiale, mon frère a de son côté repris l’atelier porcs et les cultures historiques avec mes parents. »
En 15 ans, l’élevage a bien évolué au Gaec Dynamilk, situé à Neufchatel-Hardelot, à 3 km des fameuses plages de la Côte d’Opale… « Mon père trayait encore une vingtaine de vaches en 2006. Il a monté progressivement jusqu’à atteindre 70 animaux à mon installation en 2010 et aujourd’hui on en trait 110 ! »

Ici c’est une ferme d’élevage : tout est tourné vers le lait (le couple réfléchit même à déléguer les travaux de plaine). Il a donc fallu faire évoluer la structure pour l’adapter à l’agrandissement du cheptel et aux exigences des éleveurs : « Le système était vieillissant. Les dernières modifications dataient des années 2000 avec une mise aux normes pensée pour 25 vaches. L’augmentation de troupeau s’est faite dans ces conditions, mais on voulait plus de confort. En 2010, on a commencé par refaire les silos. On a ensuite agrandi la stabulation en réintégrant la fumière. On a refait la salle de traite pour passer en 2×11 postes. Et en 2015 on a cassé les logettes paillées pour passer en logettes creuses sur sable. » Et enfin récemment, les éleveurs se sont équipés d’une mélangeuse automotrice et ont installé des tapis sur les bétons usés du bâtiment.

Et ces trentenaires bien dynamiques ne comptent pas s’arrêter là : « On va sûement agrandir encore un peu la stabulation car on n’a que 96 places en logettes et 70 places à l’auge pour les 110 vaches traites. C’est surtout les cornadis qui sont limitants, on aimerait en ajouter 20 mètres de plus et quelques logettes par la même occasion ». L’agrandissement sera peut-être aussi l’occasion de réfléchir à un projet robot de traite. Les éleveurs qui y étaient fermés jusque-là commencent à se renseigner. Acutellement ils traient 2x1h30 chaque jour à 2.
Des vaches à 13 500 kg de lait
Le troupeau est en 100 % Prim’holstein, avec une belle proportion de Red : « On en avait que quelques-unes au départ, puis on a eu pas mal de filles et aujourd’hui on a un bon rameau de Rouges avec notamment Icone, Sia (qui a participé au Space l’an dernier), sa mère Nina (meilleure mamelle adulte au dernier concours départemental), et un prix de famille pour ces dernières.
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« Mon père avait fait un gros travail génétique sur son troupeau, explique Mélanie. Dans les années 80, il achetait déjà des embryons. Il m’a transmis sa passion. Matthieu est lui aussi issu d’une famille d’éleveurs donc on est tous les 2 plutôt très passionnés », reconnaît-elle. Ils inséminent et réalisent les échographies eux-mêmes. « On met de la semence sexée sur toutes les bonnes familles (soit environ 60 % des IA sexées au total), et parfois jusqu’à 3 doses sexées sur les meilleures, avoue le couple. C’était surtout notre stratégie quand les veaux mâles ne valaient rien, mais on y revient un peu car on a eu vraiment beaucoup de femelles ces dernières années. Aujourd’hui on trie un peu plus sur le papier et si on a déjà des filles ou des soeurs d’une bonne souche dans le troupeau, on n’insiste plus autant. Tant que le rameau reste, on peut faire un peu de croisement terminal. » Ainsi, les veaux mâles et les croisés (principalement Blanc Bleu) sont vendus à 15 jours. Il y a aussi un peu de collecte et transfert d’embryons sur la ferme (environ 3 par an).
« Pour le choix des taureaux, on regarde surtout le critère lait, la mamelle et les pattes. Maintenant, on se fait aussi un peu plaisir parfois sur de la morpho. » Pas de taureau de prédilection en revanche car « ça change trop vite avec la génomie ». Pour autant, les éleveurs ont arrêté le génotypage de leurs animaux car ils étaient déçus du résultat.

Mélanie et Matthieu misent beaucoup sur le confort afin de faire vieillir leurs animaux au maximum. Ici, pas de vaches à moins de 3 lactations, on est plutôt à 4, 5 ou 6 lactations pour la grande majorité (la doyenne du troupeau étant à sa 7e lactation). « Les logettes en sable y sont pour beaucoup, estime Mélanie. On a aussi bien réduit en mammites : on en soigne moins de 5 par an. » Les éleveurs ont opté pour une ration complète en compact feeding distribuée 2 fois par jour.
Une bonne génétique et une conduite du troupeau milimétrée qui portent leurs fruits puisque le niveau d’étable est de 13 500 kg de lait de moyenne avec une marge sur coût alimentaire de 13,5 €/VL/j et un EBE de 240 000 €.
Tout miser sur le tarissement et l’élevage des génisses
« Ce qui nous a fait beaucoup monter en lait, c’est l’élevage des taries. C’est le point primordial pour nous. » Et en effet, cette phase de 2 mois est très protocolaire au Gaec :
– les vaches reçoivent 1 ou 2 bolus de la marque AHV dédiés au tarissement, « c’est très efficace, même sur les vaches hautes productrices. On n’utilise plus d’obturateur et quasiment plus d’antibiotique (à peine 10 par an) » ;
– suivi du pH urinaire et de la température des animaux ;
– les vaches à vêler sont isolées dans un box et suivies par caméra (« on essaie d’être présent à chaque vêlage, même si on n’intervient pas ») ;
– sitôt la vache vêlée, elle est traite pour distribuer le colostrum au veau ;
– à partir du 3e veau (ou pour un vêlage difficile), la vache est drenchée après le vêlage pour la réhydrater.

Les veaux aussi sont suivis de près : « On mesure systématiquement le colostrum et on le distribue seulement s’il dépasse les 22 % de Brix. Sinon on en décongèle un autre de meilleure qualité, détaille Mélanie. Pour cette première buvée, le veau est drenché avec 4 litres de colostrum. Il n’aura donc qu’un repas le premier jour, et on garde le reste du colostrum au frais. Le lendemain on lui donne au biberon 1 litre de colostrum avec 1,5 litre de poudre de lait et on étale la distribution du colostrum restant tout le restant de la semaine. » La quantité de lait distribuée augmente progressivement jusqu’à atteindre 4 litres matin et soir puis elle commence à diminuer à partir de 9 semaines.
Les génisses ont du mash à disposition dans la nurserie dès leur plus jeune âge. « À 10 semaines, elles ne boivent plus que 3 litres le matin. À 3 mois, elles passent en lots et on les sèvre quelques jours après ce changement de bâtiment pour que ça se fasse en douceur. »
La ration des génisses est progressivement introduite pour les petites génisses, puis elles changent de bâtiment (à quelques mètres de celui-ci) pour laisser la place aux plus jeunes et reviennent auprès des vaches pour vêler à 22-24 mois.
Des concours et une soixantaine d’animaux vendus chaque année
L’amour des belles vaches, c’est en Mélanie depuis son plus jeune âge : « J’ai toujours aimé les concours, j’ai même reçu une génisse en cadeau pour mon bac [Rosette de Fastre (Gibson x Skychief), NDLR]. Malheureusement par manque de temps et avec le projet d’agrandissement, on avait un peu abandonné mais depuis 2020 on s’y est remis. » C’est d’autant plus plaisant que ses 2 filles, de 7 et 9 ans, prennent aussi beaucoup de plaisir autour du ring.
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« L’an dernier on a participé pour la première fois au Space avec deux vaches, deux cousines, une Noire et une Rouge, qui ont toutes les deux fait un cinquième prix de section. On était très contents car le concours est vraiment professionnel. On était dans le noyau de la Holstein, il y avait un sacré niveau… » Le couple espère y présenter des animaux cette année encore.
Le Gaec Dynamilk est plutôt reconnu dans la région. Et avec d’aussi bons résultats, il y a des acheteurs. « On a une bonne production et des vaches qui vieillissent bien donc un besoin de renouvellement pas si important que ça, mais comme on avait beaucoup de femelles jusque-là, on en vendait un peu. L’an dernier, on a vendu 40 génisses et 20 vaches en lait. » Et les éleveurs choisissent avec soin leurs destinations !