Fermeture de l’export de bovins : « les acheteurs vont en profiter pour faire baisser les prix »
TNC le 17/10/2025 à 15:55
Suite à la découverte de nouveaux cas de dermatose nodulaire contagieuse, le ministère de l’agriculture a pris le pari de suspendre l’export de vif pour 15 jours et de fermer certaines places de marché. Pour Laurent Chupin, analyste de marché pour ActiOuest, cette décision augure une baisse des prix pour toutes les catégories de bovins, et particulièrement les jeunes veaux.
En milieu de semaine, Laurent Chupin évoquait déjà de la baisse du cours du broutard à Châteaubriant. « Les transactions sont longues avec des invendus », lançait l’analyste le 15 octobre. La fermeture de l’export de vif pour deux semaines, annoncé par le ministère de l’agriculture afin de freiner le développement de la dermatose bovine risque d’amplifier la tendance. Les analystes sont unanimes : les restrictions pourraient bien sonner la fin de la récré sur les cours. « Il y en a qui vont essayer de profiter de la fermeture des frontières pour faire baisse les prix », augure Laurent Chupin pour ActiOuest.
L’export fermé au moins pour 15 jours
Les marchands de bestiaux français ont jusqu’à ce soir pour effectuer leurs dernières transactions vers l’étranger, voire entre les fermes pour les structures implantées en Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté. Dans le meilleur des cas, ils devront ensuite patienter 15 jours pour reprendre leurs activités.
Denis Tarteret, marchand de bestiaux et exportateur dans l’Yonne, se retrouve ainsi avec 2 500 bovins sur les bras. « Je prépare les broutards sur ma structure. Ils sont allotés, vaccinés… Mais en général, ils ne font que passer », résume l’exportateur, contraint d’affourager ces animaux au moins pour deux semaines.
Difficile de prédire quel sera l’impact sur les prix. « Arrêter les flux, ça n’est jamais bon pour le commerce », tranche Denis Tarteret. Malgré le contexte sanitaire, les Italiens restent intéressés par nos broutards. « Nous sommes bloqués avec nos animaux, et eux ont des places d’engraissement à remplir ». La demande marque toutefois quelques signes de faiblesse de l’autre côté des Alpes. « Les capitaux à sortir pour les mises en places sont de plus en plus importants. En Italie, le maigre est cher par rapport au prix du produit fini, et comme ailleurs, il est difficile de répercuter l’intégralité des hausses sur le consommateur », poursuit l’exportateur.
Mieux vaut fermer 15 jours que s’empêtrer dans la crise de la DNC
Mais tout n’est pas perdu : « les fondamentaux du marché restent les mêmes », rappelle Laurent Chupin. En d’autres termes, la baisse du cheptel français porte les cours. Le contexte sanitaire génère simplement quelques remous. Tout l’enjeu pour les éleveurs est d’être en capacité de retenir ses broutards quelques semaines de plus pour passer après la vague.
Reste ensuite à voir quand l’export reprendra. « Si cela dure 15 jours, et que cela permet de résoudre les problématiques sanitaires, c’est peut-être un mal pour un bien. Le froid arrive… Mieux vaut fermer 15 jours que s’empêtrer dans la DNC », ajoute Denis Tarteret. Dans tous les cas, l’implantation de la dermatose bovine dans l’Hexagone ne présagerait rien de bon pour les marchés. Reste à voir combien de temps seront confinés les animaux, et « dans quelles conditions reprendront les échanges », ajoute Laurent Chupin.
Des craintes pour le marché du veau
La situation semble plus tendue sur le marché du veau. « On risque d’avoir une grosse dégringolade », poursuit l’analyste. Si les mouvements sur le marché intérieur restent possibles, les engraisseurs ne pourront pas absorber l’intégralité du marché. « Il y a 7 à 10 000 veaux qui partent chaque semaine à l’export. Certains vont devoir rester en ferme ». D’autant que les contraintes sanitaires imposées en Espagne du fait du développement de la dermatose bovine pesaient déjà sur les cours.
Avec la fermeture des places de marché dans le centre de la France, il sera également difficile d’étayer les cotations. Sans le Massif central, le cours du broutard perdra en représentativité, de même que le marché des gros bovins. La situation n’est pour autant pas inédite. « Nous avons déjà connu ça en 1996 avec la vache folle et par la suite, avec la fièvre aphteuse par exemple », précise Denis Tarteret.