Faute de laiterie, il transforme le lait de 50 Jersiaises sur la ferme
TNC le 27/03/2024 à 08:26
En 2019, faute de solution satisfaisante pour la collecte du lait de ses 150 vaches, l’éleveur a dû trouver une solution alternative. Son option : monter un atelier de transformation et diminuer en nombre de têtes. La fromagerie valorise ainsi l’intégralité de la production des 50 Jersiaises de l’exploitation. Et l’éleveur espère encore progresser.
L’exploitation d’Istvan Kocsis est la preuve que l’industrie laitière hongroise n’est pas tendre avec les petites structures. Non issu du milieu agricole, l’ancien entrepreneur du bâtiment s’est installé en 2016 sur 700 ha de terres agricoles, dont 500 ha de pâtures. Avec 4 robots et une stabulation capable d’accueillir dans les 250 vaches, l’exploitation démarrait sur les chapeaux de roues !
Mais en Hongrie, « les éleveurs visent un niveau de production de 25 000 l par jour pour satisfaire les laiteries, soit l’équivalent d’un tank », explique Richard Kovacs, le beau-fils d’Istvan. En deçà, la logistique de collecte se complique.
Avec seulement 150 Jersiaises, l’exploitation était loin de ce standard. Rare ferme laitière dans l’un des secteurs les plus pauvres du pays, elle a subi de plein fouet la crise laitière de 2019. Entre baisse des prix, sécheresse et éloignement des industriels, les éleveurs ont été contraints de revoir leur stratégie de commercialisation. D’autant que les primes pour la qualité se faisaient maigres. « Nous avions un lait à 6,5 % de matière grasse qui n’était pas correctement valorisé », déplore Richard. Et pour tirer profit de tout ce gras, rien de mieux que le fromage !
350 000 1 de lait transformés par an sur la ferme
C’est ainsi qu’un atelier de transformation à la ferme est né au nord-est de la Hongrie. Et le choix détonne dans le paysage laitier. « Ça n’est vraiment pas une manière standard de procéder chez nous », sourit Istvan Komolosi, traducteur pour l’occasion.
Si l’industrie n’a pas été généreuse avec les agriculteurs, l’Union européenne le fut davantage… Le projet d’atelier, estimé à 1,5 million d’euros, a été subventionné pour moitié par l’UE. La fromagerie permet aujourd’hui de valoriser 350 000 l de lait par an, soit environ 1 000 l par jour sous forme de 6 fromages différents. Un fromager a également été embauché pour gérer l’atelier, ainsi que l’équipe de transformation. Le lait est transformé chaque jour de la semaine, à l’exception du week-end. Le stock de lait est alors valorisé en début de semaine.
Les éleveurs ont dû revoir leur chargement pour coller au dimensionnement de la fromagerie. De 150 vaches laitières, la ferme est passée à 50. Avec 4 robots, et une stabulation conçue pour héberger jusqu’à cinq fois plus de vaches : les Jersiaises ne sont pas à l’étroit ! Les primipares ont une production laitière de l’ordre de 12 l/j, et les multipares tournent autour de 26-28 l.
Développer le lait A2
La baisse de cheptel a été l’occasion de faire du tri dans la génétique. « Nous avons gardé essentiellement les vaches homozygotes A2A2. » Cette particularité génétique, populaire outre-atlantique, assure la production de lait riche en bêta caséine de type A2. Le lait des vaches A2A2 est, supposément, plus facile à digérer.
Côté rentabilité, difficile d’évaluer le retour sur investissement étant donné la baisse du cheptel sur l’exploitation, mais l’éleveur l’assure, « c’est plus rentable de vendre le produit transformé que le produit brut ».
Travailler l’herbe, et agrandir le cheptel laitier
À terme, les agriculteurs ont pour projet d’augmenter en nombre de têtes. L’objectif : utiliser le bâtiment à sa pleine capacité. Mais la montée en production ne pourra avoir lieu que par le développement de l’atelier de transformation.
Autre projet : augmenter la part d’herbe dans la ration. Avec 500 ha d’herbe pour 50 Jersiaises, l’exploitation ne manque pas de fourrage ! Mais l’herbe n’est pas valorisée à son potentiel. Maïs, sorgho, betteraves et carottes fermentées la complètent dans la ration des vaches, et les éleveurs ne réalisent qu’une fauche par an. « Certaines pâtures sont escarpées, et difficiles à pâturer, mais nous avons pour projet d’utiliser plus d’ensilages d’herbe dans la ration » détaille Richard.