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Pâturage

Des plantes à valeur santé mises à disposition des vaches


TNC le 29/10/2021 à 06:03
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Sur chaque parcelle, les vaches en accès à la haie de vivaces centrale et à une bande de prairie pharmacie. (©Eilyps)

Des vaches qui se soignent d'elles-mêmes grâce aux plantes : vous y croyez ? L'exploitation du lycée agricole de la Baie du Mont Saint-Michel tente l'expérience après avoir implanté des espèces à valeur santé dans ses prairies. L'objectif est maintenant d'évaluer le comportement de son troupeau pour vérifier sa capacité d'automédication.

Dans la Manche, l’exploitation du lycée agricole de la Baie du Mont Saint-Michel a introduit en 2020 de nouvelles espèces dans ses prairies. Dans le cadre d’un projet d’expérimentation Casdar, elle a implanté des plantes dites « à valeur santé » dans ses 15 ha de pâtures accessibles conduits en pâturage tournant dynamique.

Pauline Woehrle, responsable de l’agriculture biologique chez Eilyps (partenaire du projet), a notamment coordonné la mise en place des haies bocagères et des bandes de prairies pharmacie le long des clôtures. Elle explique : « Les espèces choisies diffèrent entre la haie et la bande enherbée mais elles se complètent en ayant toutes un intérêt nutritionnel et métabolique. Elles sont également favorables au développement de la biodiversité. »

La haie bocagère est composée de vivaces, comme l’origan, l’hysope, la mélisse, le romarin, le thym, le serpolet, le framboisier, le cassissier, la menthe, l’échinacée… Pour la bande semée de part et d’autre de la haie, il s’agit du mélange « Prairie pharmacie » commercialisé par Eilyps (chicorée, lotier, plantain, achillée millefeuille, primprenelle, centaurée noire…).

L’automédication chez les vaches laitières

L’objectif de l’essai est de cerner le comportement des vaches vis-à-vis de ces plantes. Pauline explique notamment : « Est-ce que toutes seront consommées ? Y aura-t-il une affinité spécifique pour certaines selon la période, le stade de lactation des vaches, ou encore leurs pathologies. » En d’autres termes : existe-t-il un lien entre le statut de l’animal et la consommation des espèces ?

Des mesures seront faites sur le troupeau : « On regardera si ces plantes ont un réel effet d’appétence et d’automédication pour les vaches. Est-ce qu’elles vont spontanément pâturer ces espèces et trouver des effets bénéfiques pour leur santé. » L’experte complète : « On a déjà remarqué que certaines espèces étaient plus pâturées que d’autres. L’hysope par exemple a été la plante la moins consommée, ce qui semble logique car elle apporte principalement un soutien respiratoire (et est donc moins utile au printemps notamment). »

Comprendre pourquoi telle vache a consommé telle espèce : s’agit-il d’automédication ? L’étude devrait pouvoir donner quelques éléments de réponse d’ici 1 an. (©Eilyps)

« On a pu voir également que les vaches commençaient par consommer la bande de prairie pharmacie le matin à leur sortie, pour ensuite se rabattre sur le reste de la prairie. Elles se tournaient vers la haie de vivaces plutôt l’après-midi, après ou pendant la rumination, soit de façon individuelle ou par groupe de 2 ou 3, mais on ne sait pas encore si elles les picoraient en fonction de leur affinité ou de leurs besoins. » Si les observations sur 2020 on été perturbées par le confinement, elles devraient reprendre cet automne et sur le printemps 2022.

En élevage, diversifier l’écosystème

S’il s’agit là d’une expérimentation, Pauline Woehrlé accompagne aussi des éleveurs ayant semé le mélange de prairie pharmacie : « L’idéal est de la semer en bandes ou sur une parcelle tampon dans laquelle les vaches passent régulièrement, comme un paddock qui distribue le reste des parcelles. » Pour les vivaces par contre, elle recommande de les implanter le long des chemins d’accès.

« Pour l’éleveur, l’intérêt est double : en implantant ces nouvelles espèces, il diversifie l’écosystème de son exploitation et augmente la diversité alimentaire du troupeau. Et sur ce point, c’est prouvé : plus celle-ci est importante, plus la consommation des vaches sera stimulée. Quant à l’impact réel sur leur santé, on manque encore de mesures. »