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Entretien

Des moucherons et des vaches : la reprise des cas de MHE attendue « à l’été »


AFP le 07/05/2024 à 15:01

Paris, 7 mai 2024 (AFP) - La maladie hémorragique épizootique (MHE), apparue pour la première fois en France en septembre 2023, est en dormance dans les élevages bovins mais se réveillera très probablement « à l'été », explique un chercheur dans un entretien avec l'AFP.

En quelques mois, le pays a enregistré près de 4 300 foyers, concentrés dans le Sud-Ouest, de cette maladie nouvellement apparue sur le continent européen.

Non transmissible aux humains, elle passe d’une vache à l’autre via des moucherons piqueurs actuellement à l’état « d’œufs ou de larves », décrit Stéphan Zientara, directeur du laboratoire de santé animale de l’agence sanitaire Anses.

Question (Q) : Il n’y a quasiment plus de cas de MHE recensés dans les élevages français. Le virus est-il encore présent sur le territoire et va-t-il se réactiver ?

Réponse (R) : L’hypothèse la plus probable, c’est que le virus est encore présent chez des bovins, des moutons ou des cervidés infectés, qui restent virémiques assez longtemps [sans présenter de symptômes, NDR]. Quand ces hôtes seront piqués par des moucherons culicoïdes, cela fera repartir le cycle.

Ces moucherons ne sont pas actifs quand il fait froid. Ils sont actuellement sous forme d’œufs ou de larves. Pour qu’ils éclosent, il faut en gros des températures supérieures à dix degrés plusieurs jours de suite. La population de moucherons va tout doucement se mettre à augmenter. Il faut aussi que le virus se multiplie dans ces populations. Toute une dynamique d’amplification est nécessaire avant les infections de mammifères et les premières manifestations cliniques [fièvre, lésions buccales, boiteries…].

On s’attend à voir les premiers cas à l’été parce qu’il faut plusieurs semaines pour que tout le système se mette en marche. Et on s’attend à ce que ça reparte à partir du cœur de l’endroit le plus infecté, donc le Sud-Ouest, et que ça continue à s’étendre dans le pays.

Q : Qu’avez-vous appris sur la maladie depuis les premiers cas français ?

R : Personne n’avait jamais imaginé avoir la situation qu’on vit aujourd’hui, que cette infection – qu’on trouve plutôt dans les pays chauds – pouvait se disséminer en Europe d’une part, de façon aussi rapide et intense d’autre part. Cela a pris tout le monde de court.

Avec le réchauffement climatique, on a des conditions favorables à l’augmentation des populations de moucherons mais aussi à l’augmentation du virus au sein de ces populations de vecteurs.

Les conséquences ne sont pas uniformes d’un foyer à l’autre. Cela dépend de la proportion d’animaux qui ont été piqués par ces moucherons. Certains sont restés asymptomatiques. Chez les autres, il y a eu des atteintes sévères : les animaux ne mangeaient plus, ne produisaient plus de lait.

La mortalité a été relativement faible. Moins de 1 % des animaux infectés sont décédés. La plupart du temps, les animaux recouvraient un état général satisfaisant après quelques semaines. Ce qui est surprenant, c’est qu’on a eu peu de cas chez les cervidés.

Q : Où en est la recherche d’un vaccin ?

R : Un vaccin contre le sérotype 2 du virus existe au Japon mais il ne fonctionne pas sur le sérotype 8 qui est présent en Europe. Des laboratoires en Espagne, en France, en Italie travaillent sur des candidats vaccins. Un tas d’étapes sont nécessaires avant d’avoir un produit commercialisé. Il faut évaluer leur innocuité et leur efficacité. Une mise sur le marché dans l’année est possible.

Propos recueillis par Myriam Lemetayer.