Arrêtons de pêcher l’anguille, réclament des ONG, scientifiques et pêcheurs


AFP le 20/10/2025 à 16:00

La Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), ainsi que des scientifiques et des pêcheurs ont lancé lundi un « appel au secours » pour sauver l'anguille européenne, espèce « à l'agonie », par un moratoire sur la pêche en France.

« Nous lançons aujourd’hui un appel au secours car on assiste à l’agonie de l’espèce » et « l’État refuse de prendre la mesure élémentaire qui s’impose : un moratoire sur la pêche » recommandé par les scientifiques, a déclaré le président de la LPO, Allain Bougrain-Dubourg, lors d’une conférence de presse en ligne.

Les populations d’anguille européenne se sont effondrées de 90 % depuis les années 1980, et même de plus de 99 % par rapport aux années 1960, en raison de la dégradation de ses habitats naturels et de la pêche, rappelle l’association.

Depuis 2008, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) considère l’espèce comme « en danger critique d’extinction ». En 2022, le Conseil international pour l’exploration de la mer (CIEM) a recommandé l’arrêt de toute pêche à l’anguille, à tous les stades de son développement.

La France est « un des derniers pays européens à autoriser la pêche à l’anguille » et celle de ses alevins, les civelles.

Un projet d’arrêté gouvernemental, en consultation jusqu’au 24 octobre, prévoit de fixer à 55 tonnes pour 2025-2026 puis à 43 tonnes pour 2026-2027 les quotas de pêche sur l’espèce, contre 65 tonnes actuellement.

« C’est dérisoire et insuffisant », dénonce M. Bougrain-Dubourg. « 65 tonnes de civelles pêchées, cela représente 220 millions d’individus : imaginez l’impact que cela a sur une espèce déjà en danger ». « On empêche l’espèce de se reproduire. On ne peut pas continuer comme ça », abonde le biologiste français Gilles Boeuf.

« Il y a une forme d’irresponsabilité gouvernementale », estime le vice-président de la Fédération nationale de la pêche en France, Jean-Paul Doron.

La France reçoit sur ses côtes une importante partie des civelles qui parviennent en Europe, grâce au Gulf Stream, depuis la mer des Sargasses (Atlantique ouest), leur unique zone de reproduction.

Les civelles pêchées sont consommées, pour 40 % d’entre elles, tandis que 60 % sont relâchées dans d’autres zones à des fins de repeuplement. Mais sur cette partie, le taux de mortalité des alevins est très élevé, et il n’existe aucune traçabilité qui permette de voir le devenir des survivants, explique la LPO.

Et la civelle est victime d’un fort trafic illégal, le kilo pouvant se négocier de plusieurs centaines à quelques milliers d’euros, notamment en Asie.