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Gaec d’Outheran, Entremont-le-Vieux

À 1 200 mètres d’altitude, une production tout à l’herbe


TNC le 21/06/2024 à 05:01
MickaelPerrinGaecdeL_Outheran

(© Emmanuelle Bordon)

À Entremont-le-Vieux (Savoie), Mickaël et Laurent Perrin élèvent 55 vaches de race Abondance et leur suite, pour une production annuelle de 230 000 litres. Un travail dans des conditions de relief et de climat qui dictent des méthodes spécifiques.

La montagne suppose des contraintes particulières. L’altitude, la neige en hiver, la pente, les parcelles souvent petites… influencent les techniques de travail des exploitants. À Entremont-le-Vieux (Savoie), Mickaël Perrin a repris l’exploitation familiale avec Laurent, son frère. Ils élèvent 55 vaches de race Abondance et produisent 230 000 litres de lait par an. L’exploitation se trouve à 1 200 mètres d’altitude, dans le massif de la Chartreuse, à la frontière entre l’Isère et la Savoie.

100 % herbe et ration sèche en hiver

L’altitude et les conditions climatiques déterminent deux grandes périodes d’environ six mois dans l’année. Durant l’été, les vaches sont entièrement nourries à l’herbe. Elles sont dehors jour et nuit et traites à l’extérieur. En 2021, Mickaël et Laurent se sont équipés d’une machine à traire extérieure mobile, une deux fois six postes entièrement en inox.

« Un investissement de 150 000 euros que nous ne regrettons pas, tant elle facilite notre travail », commente Mickaël. Ils disposent de trois emplacements équipés en eau et en électricité, sur lesquels ils l’installent en alternance, selon la pousse de l’herbe. Le pâturage est complété par deux kilos de VL par jour, distribués automatiquement au cours de la traite.

Le Gaec d’Outheran en chiffres :

  • 2 associés
  • 120 hectares dont 55 mécanisables
  • 55 vaches de race Abondance
  • Niveau d’étable moyen : 4 500 litres
  • Production moyenne annuelle : 230 000 litres
  • Prix du lait : 570 € / 1000 litres
  • EBE moyen : 80 000 €

Durant l’hiver, les vaches ne peuvent pas sortir à cause de la neige. Le bâtiment est un modèle traditionnel de montagne, dans lequel les vaches sont à l’attache, y compris pendant la traite. Les éleveurs sont équipés de huit poste de traite et d’un transfert, système de pipeline qui emmène automatiquement le lait vers le tank.

Au cours de cette période, les vaches reçoivent une ration sèche : 17 kilos de foin et de regain, ainsi que, si besoin, de la luzerne achetée à l’extérieur. Cette ration de base est complémentée avec quatre kilos de VL 16. Parce que le lait est transformé en différents fromages, dont des pâtes pressées cuites, les fourrages fermentés sont interdits.

Une vache parfaite pour la montagne

Le niveau d’étable de l’exploitation est en moyenne de 4 500 litres. Un chiffre qui peut sembler bas mais qui est en réalité choisi.

Côté race, l’Abondance affiche en général un niveau de production moyen de 5 500 à 6 000 litres par an. Si ce chiffre est modeste, cette race bovine a en revanche des qualités intéressantes pour un élevage de montagne : le pied sûr et peu sensible aux pathologies, qui lui permet de valoriser des pâtures en pente, une forte résistance aux maladies et une longévité exceptionnelle. « Nous avons, en outre, fait le choix d’une agriculture simple, souligne Mickaël. Une exploitation en 100 % herbe, peu d’achats de concentrés, peu de transport et de stockage ».

Ce choix a été fait aussi parce que pendant l’hiver, Mickaël et Laurent sont double actifs : éleveurs et moniteurs de ski. Les journées sont donc longues. Elles commencent à la traite, continuent sur les pistes entre 9h et 17h et se terminent à la traite. Ils n’ont donc pas intérêt à multiplier les opérations. « La distribution d’un concentré supplémentaire, ce serait 10 à 15 minutes de plus à chaque traite », pointe Mickaël.

Ce système suppose en revanche de soigner la réalisation des fourrages. Dans un massif comme la Chartreuse, qui est un des plus humides de France, l’opération n’est pas si simple. « Mais faire du foin de qualité, ça s’apprend », affirme Mickaël. Faucher à une certaine hauteur pour éviter les butyriques, gérer les prairies en fonction de leur caractère séchant ou non et ne pas surpâturer. L’objectif est de conserver une flore la plus diverse possible et un système de bactéries important dans le sol, pour avoir des prairies résilientes.

Prendre en compte les changements du climat

« En montagne, les pâtures grillent plus vite qu’en bas », observe Mickaël. En outre, dans un contexte de changements rapides du climat, les évolutions arrivent encore plus rapidement et plus fortement en altitude qu’en plaine. L’éleveur a donc matière à s’en inquiéter. « Nous sommes sur des calcaires drainants, du rocher qui est desséchant parce qu’il chauffe. Et si les printemps sont en général pluvieux, les été sont secs et les hivers très variables, avec une forte diversité de températures. Il est donc indispensable d’être encore plus vigilant et plus réactif devant les aléas de la météo ». En outre, la présence de la neige en hiver devient plus incertaine avec les années et contraint les double actifs à une réflexion sur leurs activités. « Si notre revenu extérieur dépend de la météo, il doit devenir un bonus », conclut Mickaël.

La coopérative, un acteur fondamental de la vie locale

« Une belle boutique qui pèse son poids ». C’est ainsi que Mickaël Perrin résume la coopérative des Entremonts, à laquelle il livre son lait, avec 16 autres élevages du secteur. Cette structure, qui date de 1935, est couplée à une Sica qui gère la commercialisation des fromages et du beurre qu’elle produit.

Entre 1995 et 2000, un fromager de la coopérative a revu toutes les recettes. Grâce à ce travail, elle produit aujourd’hui dix fromages différents, dont certains sont saisonniers et d’autres pérennes. Pâte pressée cuite (type Comté), tommes de montagne (type tomme de Savoie), Délice de Chartreuse (type Reblochon), tomme au foin, au marc, sanglée… La coopérative produit aussi un fromage sous IGP : la raclette de Savoie.

« Dix références, c’est une richesse pour notre coopérative mais aussi une difficulté dans l’organisation de la transformation », commente Mickaël Perrin. Le lait est ramassé tous les jours et transformé le lendemain. La coopérative ne travaille que le lait cru, un produit fragile. Des prélèvements sont réalisés tous les jours pour contrôler la qualité. Du côté des éleveurs, cela suppose une vigilance quotidienne, travailler proprement sans être aseptisé, être réactif. « Nous sommes au démarrage de la chaîne », conclut-il.

La coopérative des Entremonts en chiffres

Création : 1935

17 élevages coopérateurs

4,3 millions de litres traités par an

35 salariés (transformation et vente)

Chiffre d’affaires annuel : 4,5 millions d’euro