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Reportage au Gaec Vaudron (27)

« En acupuncture, on actionne les interrupteurs de l’énergie »


TNC le 11/01/2019 à 05:58
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Anita Vaudron, éleveuse laitière de l'Eure, pratique l'acupuncture sur son troupeau depuis 2016. Adepte des médecines complémentaires, elle ne quitte que rarement sa boite d'aiguille et son schéma. Selon l'éleveuse, la base c'est le « triangle de l'immunité » et tout le monde y passe ! « Stimuler ces trois points permet de relancer la machine en rééquilibrant l’énergie générale », explique Anita. Elle parvient également à soigner d'autres pathologies comme les mammites, les métrites et les diarrhées des veaux et a de ce fait réduit de près de 30 % ses frais vétérinaires.

Dans le pays d’Auge, à La Chapelle Gauthier (Eure), le troupeau laitier du Gaec Vaudron ne semble pas perturbé par ces premières fortes gelées hivernales. Dans la stabulation, c’est le calme complet. Seuls les bruits du cornadis et du robot de traite résonnent.

Anita Vaudron, installée avec son mari depuis 2003 fait le tour de ses vaches pour vérifier qu’elles vont bien. L’une d’entre elles l’attend d’ailleurs dans un parc à l’écart. « Elle a été orientée dans cette aire d’attente en sortie de robot car je ne la trouve pas en grande forme depuis quelques temps », explique l’éleveuse. En effet, elle est en retard dans l’expression de ses chaleurs. Anita sort alors ses précieuses aiguilles d’acupuncture pour résoudre le problème.

Refaire circuler les énergies

Après s’être formée à l’homéopathie, Anita s’est tournée vers l’acupuncture en 2016. « Je consulte moi-même un acupuncteur et les médecines complémentaires m’ont toujours intéressé. J’ai alors suivi une formation par le biais de la chambre d’agriculture de Normandie. C’est la vétérinaire Nayla Cherino Parra qui animait le groupe. » L’éleveuse se rappelle alors : « La formation s’est déroulée en deux séquences : une première cession « débutant » de deux jours à un mois d’intervalle chacun puis un perfectionnement un mois après. En rentrant de la première journée, j’ai tenté de mettre en application ce que j’avais déjà appris. Au début on n’est pas forcément à l’aise et les animaux le ressentent. J’ai vite compris qu’il ne fallait pas être stressée, l’état moral de l’éleveur joue beaucoup sur la réussite de l’intervention. »

Anita ne manque jamais d’aiguilles. Elle les utilise au quotidien. « L’acupuncture vise à refaire circuler les énergies de l’organisme. Pour cela, on stimule certains points sur les méridiens (le réseau de circulation des énergies qui relie les organes entre eux). En formation, on nous montre une vingtaine de points sur l’animal ; il faut alors en stimuler certains pour agir sur tel ou tel organe et rétablir l’équilibre. En fait, après avoir appris où ils se situent, on ne fait qu’appuyer sur des interrupteurs. »

Le triangle de l’immunité : trois points préventifs

« La base, c’est le triangle de l’immunité ; il s’agit de trois points sur le flanc : le point rein, le point rate et le point foie. Stimuler ces trois points permet de relancer la machine en rééquilibrant l’énergie générale. Je le fais sur tous mes animaux de façon préventive : chaque veau y passe à la naissance, les vaches y ont droit au tarissement et je le refais trois semaines avant le vêlage car je trouve que ça améliore la qualité du colostrum. »

Anita stimule d’autres points selon les symptômes observés. Elle garde précieusement son schéma de vache près d’elle au cas où elle aurait un trou de mémoire. En effet, avec plus de 20 points aux noms complexes à retenir (V60, E36, VG2bis, etc.), il y a de quoi s’emmêler les pinceaux ! En revanche, aucun risque en cas d’erreur : « Si on place l’aiguille au mauvais endroit, on ne peut pas faire pire. Rien ne se produira. Avec l’expérience, je parviens aujourd’hui à soigner des mammites, des métrites, de la toux et des diarrhées chez les veaux. L’essentiel est d’intervenir tôt. C’est ce que me permet le robot de traite grâce aux données qu’il me transmet de façon instantanée. »

« Il faut du temps pour pratiquer l’acupuncture. L’heure que je ne passe plus à traire, je la passe aux côtés de mes animaux. J’interviens sur mes vaches en sortie de robot en les coinçant au cornadis ou dans la cage de contention. Je pose les aiguilles, les laisse agir 20 à 30 minutes puis je laisse sortir la vache. Les aiguilles tombent toutes seules lorsqu’elles ont suffisamment agi, ça peut être dans l’heure qui suit. Il n’y a aucun risque pour l’animal, elles ne sont que très peu enfoncées. Une seule application peut suffire mais il faudra parfois recommencer. »

Moins 30 % de frais vétérinaires

Anita enregistre consciencieusement chaque intervention, soit en acupuncture ou en homéopathie, dans un petit carnet. En regardant son registre sanitaire, elle constate : « Avant, on était assez élevé en frais vétos. On vaccinait les vaches en gestation contre les diarrhées des veaux puis on vaccinait les veaux contre la toux et enfin, on vaccinait contre les mammites à Staph… Aujourd’hui, on ne fait plus aucun vaccin. On ne perd pas plus de veaux et on n’a pas plus de vaches à cellules. On estime avoir réduit la facture de 20 à 30 % sur l’année. »

Adepte de l’acupuncture et de l’homéopathie, l’éleveuse avertit cependant : « Cela reste des médecines complémentaires. Ça n’empêche pas d’appeler le vétérinaire mais ça peut être une solution d’urgence et soulager l’animal en l’attendant. On a réduit nos frais vétérinaires, tant mieux, mais il ne faut pas que cet aspect soit la principale motivation pour s’y mettre. Il faut vraiment avoir la fibre éleveur, être proche de ses animaux et surtout avoir du temps. » De plus, cette économie est réinvestie : les éleveurs font passer l’ostéopathe toutes les six semaines au cas par cas sur le troupeau.