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Guerre en Ukraine

Face à la flambée des prix, constructeurs et concessionnaires appellent à l'aide


TNC le 15/04/2022 à 15:Apr
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Flambée des prix des matières premières, pénuries, allongement des délais de livraison mettent en difficulté les acteurs du machinisme agricole, des constructeurs aux agriculteurs, en passant par les distributeurs. Cette situation met en péril toute la filière. Le syndicat des constructeurs (Axema) et celui des distributeurs (Sedima) ont donc rédigé une lettre ouverte au gouvernement, demandant un soutien face à cette situation inédite.

Ils demandent que leur soit apportée en urgence une aide pour faire face aux enjeux alimentaires qui se profilent :

« Si 2021 s’est refermée sur un record de ventes de machines agricoles, en France comme dans le reste de l’Europe, cette année aura néanmoins été marquée par la flambée des prix de l’acier, la pénurie de composants, hydrauliques et électroniques notamment, et de grandes difficultés d’approvisionnement.

Les constructeurs d’agroéquipements espéraient un retour à la normale pour 2022, mais la guerre en Ukraine a stoppé net ces espoirs de normalisation de la situation post-pandémique. Les prix des matières premières sont repartis dramatiquement à la hausse dès le 24 février et désormais, les prix des métaux et de l’énergie battent tous les records. Les tôles en acier départ Europe du Nord se négociaient en janvier 2021 à 680 euros la tonne, puis à 950 euros début janvier 2022, pour atteindre désormais des cours à 1 800 euros la tonne, avec des pointes à 2 200 euros.

Les fournisseurs des industriels, eux-aussi dépendants de chaînes d’approvisionnement largement perturbées, ne sont plus en mesure de garantir prix et délais, et appliquent des hausses de prix sans préavis, à leurs clients qui sont contraints de répercuter à leur tour, en tout ou partie.

L’onde de choc secoue l’ensemble de la chaîne de valeur, et chaque maillon de cette chaîne subit cette crise sans précédent, qu’il soit fournisseur de matières premières, industriel, distributeur ou agriculteur. C’est pourtant bien cette filière dans son intégralité qui est en charge d’assurer l’autonomie alimentaire française et européenne, reconnue désormais comme stratégique.

Dans ce contexte, les industriels sont extrêmement inquiets de l’escalade des difficultés auxquelles ils doivent faire face :

  • La flambée des prix de l’énergie et de l’acier qui les contraint à de nouvelles hausses de prix, après les fortes augmentations déjà passées l’année dernière (+ 10 à + 15 % en moyenne). Cette hausse phénoménale des prix n’est toujours pas suffisante, et de nouvelles augmentations sont aujourd’hui appliquées. Nos entreprises s’interrogent sur la soutenabilité d’une telle inflation et craignent son effet récessif ;
  • La trésorerie des entreprises est mise à mal, alors que beaucoup d’entre elles n’ont pas réussi à répercuter les hausses de coûts dans leurs prix en 2021. Elles sont aujourd’hui dans une situation critique et doivent avancer des fonds pour assurer leurs approvisionnements, tout en facturant de plus en plus tard. Certaines de ces entreprises pourraient disparaître du fait de cette tension sur les liquidités, qui s’ajoute à la tension sur les marges, et alors que les remboursements des PGE sont prochainement exigibles.
  • La guerre entre la Russie et l’Ukraine privent les industriels de débouchés en forte croissance. En 2021, ils ont exporté en Russie et en Ukraine des matériels pour une valeur totale de 166 M€ (4 % des exportations françaises de matériel agricole), en hausse de + 60 % par rapport à l’année précédente, principalement des tracteurs, des charrues, des semoirs et des pulvérisateurs. Au-delà de cet impact commercial, plusieurs entreprises disposent en Ukraine et en Russie d’actifs stratégiques en danger : des hommes en premier lieu, des sites de production, des filiales commerciales, des fournisseurs-clés… ;
  • Avec ce conflit, les difficultés d’approvisionnements se sont exacerbées et les plannings de production se heurtent désormais à l’imprévisibilité des livraisons, retardées, voire annulées. En conséquence de cette désorganisation, les délais de livraison des machines agricoles se sont allongés en moyenne de 11 semaines par rapport à une situation normale (source : Enquête de conjoncture Axema, 17-31 janvier 2022). Ils sont actuellement de 19 semaines en moyenne, pour l’ensemble des entreprises adhérentes d’Axema, et montent à 30 semaines pour les tracteurs. Sur certains sites de production, des centaines, voire des milliers de machines, sont stockées dans l’attente de pièces pour un assemblage final.

Par voie de conséquence, les distributeurs et concessionnaires sont violemment affectés par cette situation :

  • Les hausses des prix d’achat des matériels si elles ne sont pas répercutées en totalité aux agriculteurs, impacteront lourdement l’équilibre financier des distributeurs ;
  • Ces augmentations détériorent aussi la relation de confiance entre distributeurs et agriculteurs, construite sur le long terme et essentielle à la bonne vie des affaires,
  • Les dates de livraison non tenues obligent les distributeurs à trouver des solutions alternatives complexes et couteuses pour fournir le cas échéant aux agriculteurs du matériel d’occasion en attente de la livraison,
  • De manière plus générale, la non-livraison des matériels commandés à la date initialement prévue peut mettre en péril la bonne exécution du travail de la saison et hypothéquer les récoltes à venir, dans un contexte de crise alimentaire liée à la guerre en Ukraine : semer, récolter, vendanger, c’est tout une récolte qui peut être compromise.
  • Par ailleurs, la valeur vénale du matériel repris à l’agriculteur dans le cadre de son achat de matériel neuf est forcément plus basse que prévu et déséquilibre la relation financière entre distributeurs et agriculteurs.

Tous ces impacts ne manqueront pas à court terme d’engendrer un fort recul des ventes et désorganisera la production agricole.

Face à cette situation inédite et grave, l’ensemble de la filière, industriels, distributeurs, et agriculteurs, souhaite alerter les responsables politiques français et européens.

Ils demandent que leur soit apporté, de façon urgente, tout le soutien nécessaire pour pouvoir faire face aux enjeux alimentaires majeurs encore renforcés par la crise en Ukraine. »

La lettre est co-signée par Frédéric Martin, président Axema, et Loic Morel, président du Sedima.

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