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Réchauffement climatique

Quels impacts sur la ressource en eau et les cultures en France ?


TNC le 06/02/2019 à 18:06
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« Le réchauffement climatique est bien là », précise Olivier Deudon, responsable agrométéorologique chez Arvalis-Institut du végétal. D'après les données collectées, le spécialiste peut prédire les effets du réchauffement climatique sur plusieurs dizaines d'année en France et leurs possibles conséquences sur la ressource en eau et les cultures.

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Responsable agrométéorologique chez Arvalis-Institut du végétal, Olivier Deudon s’intéresse aux données agrométéorologiques. Ces dernières lui permettent de prévoir les tendances sur plusieurs dizaines d’années en France. Dans cette interview, il présente les principaux effets du réchauffement climatique et leurs conséquences sur les cultures.

« Quels éléments prouvent que le réchauffement climatique est là ?

Olivier Deudon (OD) : Quelques exemples le démontrent, comme 2017 : deuxième année la plus chaude au niveau mondial, à égalité avec 2015. 2016 restant la numéro une sur le podium. Et aussi, 17 des 18 années les plus chaudes ont eu lieu depuis 2000. Pour finir d’illustrer, je peux également parler de la concentration en dioxyde de carbone, très corrélée aux températures. Cette concentration a atteint en 2016 le seuil de 400 ppm, à comparer avec le seuil pré-industriel (à peine 280 ppm).

On imagine ce qui va se passer demain à partir d’hier. Que peut-on dire à propos des températures des années passées en France ?

OD : Sur les années passées, le changement climatique se caractérise par une augmentation des températures avec une certaine variabilité temporelle et une accélération du phénomène depuis les années 90. À cela, s’ajoute aussi une variabilité spatiale. Le réchauffement climatique n’est pas uniforme. Du côté des températures moyennes, on observe par exemple un accroissement des températures sur une ligne Sud-Ouest/Nord-Est.

En ce qui concerne la pluviométrie, y’a-t-il une évolution aussi notable ?

OD : Pour la pluviométrie, le signal est plus compliqué à cerner que pour les températures. Néanmoins en rythme annuel, on peut dire que l’on a davantage de précipitations sur le nord de la France et moins de précipitations sur le Sud. Au niveau saisonnier, on a aussi une certaine disparité avec une augmentation des précipitations sur le printemps et l’automne. Concernant l’hiver et l’été, le signal est là également, c’est beaucoup plus difficile à interpréter. On peut dire que les régions méridionales subissent une baisse des précipitations.

Est-ce que cela accentue les phénomènes extrêmes ?

OD : Oui, le réchauffement climatique s’accompagne d’une augmentation des phénomènes extrêmes. Deux exemples : les quatre vagues de chaleur les plus chaudes et les plus longues ont toutes eu lieu après 1981. À l’opposé, les trois vagues de froid les plus longues et les plus intenses sont toutes postérieures à 1981.

Quel va être l’impact sur la ressource en eau ?

OD : D’après les résultats du projet Climsec (qui a permis de comparer l’évolution des sécheresses météorologiques et agronomiques tout au long du 21e siècle), à l’échéance 2050, on note une amplification des sécheresses agricoles malgré une faible évolution du régime des précipitations. Et les principales régions qui devraient être touchées à cette période là sont surtout les zones de montagne, avec une aggravation plus notable pendant la période printanière.

Et pour les années 2080, on se projette un petit peu plus ? Les tendances sont-elles les mêmes ?

OD : Les tendances se confirment pour ces années avec une amplification des sécheresses météorologiques, qui devraient être présentes sur l’intégralité du territoire, en particulier sur la période été et automne. Autre point marquant également : c’est surtout le sud-ouest qui devrait être impacté par ces sécheresses pendant la période hivernale. Alors qu’à l’automne, ce serait surtout la façade ouest qui pourrait être pénalisée. À prévoir aussi : une amplification très très forte des sécheresses agricoles à cette échéance pour toutes les régions, en particulier sur la période estivale.

Est-ce que tous ces changements vont se faire de manière linéaire ?

OD : Il y a deux notions importantes à avoir dans ces simulations : la prépondérance des sécheresses agricoles par rapport aux sécheresses météorologiques, du fait justement d’une augmentation de l’évaporation (compte-tenu de l’augmentation des températures). Et l’aspect non-linéaire de cette augmentation des températures, en particulier à partir de 2050. Une explosion du nombre de sécheresses pourrait survenir en France.

Cela va-t-il avoir un impact sur la ressource hydrologique ?

OD : Oui, le réchauffement climatique va impacter cette ressource. Sur le bassin de la Garonne notamment, on considère qu’on devrait réduire de moitié le débit naturel d’étiage avec des conséquences importantes sur le débit de toutes les grandes rivières du Sud (de – 20 à – 40 %, voire – 50 % en période estivale).

Quel impact alors sur les cultures ?

OD : Pour les cultures d’été, cela devrait engendrer une diminution du cycle végétatif et une précocification des stades, pouvant pénaliser le rendement et entraîner des besoins en irrigation plus importants. Du côté des cultures d’hiver, on a peu près le même constat avec néanmoins quelques avantages. Le blé pourrait éviter certains stress thermiques notamment. Par contre, le confort hydrique risque de diminuer pour la culture et le risque échaudage d’augmenter dans les années à venir (plutôt vers la fin du siècle). Les sécheresses de fin d’été pourraient aussi pénaliser les semis de colza, qui vont certainement être décalés dans le temps (pénalité sur les rendements). Le recours à l’irrigation starter pour ce type de cultures sera alors certainement à prévoir ».