Le soja s’envole, le maïs chute, après une surprise sur les surfaces aux USA
AFP le 05/07/2023 à 21:18
Les cours du soja s'envolent depuis vendredi après la révision en nette baisse des surfaces dédiées à l'oléagineux aux Etats-Unis, au profit du maïs, tandis que le blé est peu sensible à la fin possible de l'accord sur les céréales ukrainiennes.
A la surprise générale, le ministère américain de l’Agriculture a revu en baisse de plus de 1,5 million d’hectares son estimation pour les surfaces de soja par rapport à sa première prévision en mars, avec un repli de 4,5% par rapport à l’an dernier. « Cela a vraiment changé la tonalité du marché », selon Jack Scoville, de Price Futures Group.
En une semaine, la légumineuse américaine a ainsi pris plus de 12 %, jusqu’à atteindre lundi un sommet plus vu depuis quasiment onze mois. A cela s’ajoute le raffermissement du prix du pétrole ces derniers jours, qui soutient les biocarburants, l’un des débouchés du soja.
Par ailleurs, un autre rapport de l’USDA, publié lundi, a montré une légère dégradation de la qualité des cultures sur une semaine aux Etats-Unis, avec 50 % du soja en état « correct », « mauvais » ou « très mauvais », contre 37 % seulement l’an dernier à la même époque. Même s’il a plu le week-end dernier dans les plaines et que de nouvelles précipitations sont attendues d’ici une semaine, la sécheresse « a probablement déjà réduit le potentiel de rendement » des cultures de soja à un niveau qui serait inférieur à celui de 2022, explique M. Scoville.
La contraction des surfaces consacrées au soja s’est faite au bénéfice du maïs, attendu en hausse de plus de 6 % par rapport à la campagne précédente. Cela « a été une assez grosse surprise, avec une sole supérieure à tout ce qu’on pouvait imaginer », décrypte Gautier Le Molgat, du cabinet Agritel (Argus Media France). « Il y avait vraiment un stress sur une baisse de rendements (du maïs), et le fait qu’ils aient plus de surfaces a calmé les inquiétudes. » En deux semaines, les cours du maïs américain ont dévissé de plus de 18 %, et flirtent désormais avec leur plus bas niveau depuis 20 mois. Le maïs européen a lui aussi replongé, mais dans des proportions moindres.
L’Ukraine n’inquiète pas
« Le marché va continuer à acheter du soja et vendre du maïs » à moyen terme, prévoit Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Consulting, d’autant que « le Mexique parle d’une meilleure récolte (que prévu), ce qui réduirait leurs importations » de maïs américain. Le Mexique est, en effet, le deuxième importateur mondial de grains jaunes venus des Etats-Unis.
Quant au blé américain, après avoir perdu quasiment 17 % en dix jours, il se reprenait légèrement mercredi, soutenu par une inquiétude sur les rendements alors que la récolte a débuté. « La qualité du blé de printemps est vraiment basse par rapport à ce que le marché attendait », a pointé M. Zuzolo, avec seulement 48 % des cultures en « bon » ou « très bon » état, contre 66 % l’an dernier à la même période. Le rapport mensuel de l’USDA (Wasde), attendu le 12 juillet, devrait apporter des éléments chiffrés sur cette récolte.
En Europe, le temps sec a réduit les estimations en Allemagne et Pologne. « S’il a fait très chaud, il peut y avoir de grands épis mais qui ne sont remplis qu’en bas, avec de petits grains ou pas du tout de grains », prévient Damien Vercambre du cabinet Inter-Courtage.
Après des mois de rebondissements sur le dossier des céréales ukrainiennes, le marché semble faire peu de cas de la dernière menace en date de la Russie, dont le ministère des Affaires étrangères a estimé mardi qu’il n’y avait « aucune raison » de prolonger l’accord au-delà du 17 juillet, date butoir.
L’Ukraine met les bouchées doubles pour renforcer ses capacités d’exportations par d’autres voies que la mer Noire. Quelque 12 terminaux sont notamment en cours de construction sur les rives du Danube, a indiqué au site UkrAgroConsult le vice-ministre ukrainien en charge des Infrastructures, Iouri Vaskov.
« Les opérateurs ont fait une croix sur le corridor depuis l’explosion (début juin) du pipeline (transportant de l’ammoniac de Russie vers le port ukrainien d’Odessa) », considère M. Vercambre. « S’il devait y avoir un évènement, ce serait plutôt la prolongation du corridor. »