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Diversification des assolements

L’alliance Linoléa vise 50 000 ha de lin oléagineux en France d’ici 2024


TNC le 16/12/2021 à 14:25
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Si la culture du lin oléagineux n’est pas compliquée, Luc Rougeaux, agriculteur, conseille toutefois « de ne pas se lancer tout seul ».  (©Nadège Petit/Semences de France)

L'alliance Linoléa réunissant le GIE Linéa, la coopérative Lin 2000 et Semence de France a collecté 30 000 ha de lin oléagineux en 2021 dans l'Hexagone. Confiante sur les atouts de la culture, l'alliance a annoncé ses ambitions pour 2024, lors d'une conférence de presse le 9 décembre dernier. Retrouvez plus de détails sur le sujet, ainsi que des témoignages de producteurs.

L’alliance Linoléa a été créée en 2008 pour développer la filière du lin oléagineux en France. Elle est composée de trois acteurs historiques, disposant chacun de leur domaine de compétences : GIE Linéa pour la sélection variétale, SCA Lin 2000 gère la multiplication et la mise en marché des semences, et Semences de France l’organisation de la production et les débouchés. Grâce à ces synergies, Linoléa garantit aujourd’hui « 100 % du débouché de la récolte par une maîtrise de la filière de la semence aux transformateurs », indique Xavier Bonnard de Semences de France. 

« Des débouchés assurés et en fort développement »

L’alliance qui compte 30 000 ha de lin oléagineux récoltés dans l’Hexagone en 2021, a pour objectif d’atteindre les 50 000 ha d’ici à 2024, soit 100 000 t. Les équipes proposent des contrats de production pour se déconnecter des fluctuations des cours mondiaux et assurer aux agriculteurs engagés « une stabilité de prix sur trois ans minimum ».

Besoins et perspectives de production Linoléa : 

Production FranceRécolte 2021 (réalisé)Récolte 2022 (en cours)Récolte 2023 (objectif)Récolte 2024 (objectif)
Volume (t)60 000 70 000 80 000100 000
Surfaces (ha)30 000 35 000 40 000 50 000 

Cela se traduit par « un tunnel de prix pluriannuel +/- 60 €/t » et le curseur est arrêté chaque année avant les semis, en fonction des cours mondiaux. Pour les semis de lin oléagineux 2021/2022, le prix annoncé est compris entre 500 et 560 €/t selon les cahiers des charges. Pour cela, « le développement des filières est la condition nécessaire ». Les équipes mettent en avant l’exemple reconnu de l’association Bleu Blanc Cœur, « qui a permis de donner une image positive de la graine de lin jusqu’aux consommateurs ».

Aujourd’hui, Semences de France travaille aussi à la création de nouvelles filières notamment sur la partie huile/margarine « Made in France », sur les tourteaux de lin pour l’alimentation du bétail mais aussi sur des créneaux plus originaux comme la plasturgie avec la création de pots décoratifs et pots de culture biosourcés ». Ce qui  permet de faire évoluer les ambitions de surface de l’alliance.

Une tête d’assolement supplémentaire 

Outre un prix et des débouchés assurés, Linoléa met aussi en avant « les atouts agronomiques et environnementaux du lin oléagineux, comme culture de diversification ». Si on peut l’introduire en type hiver ou printemps dans une large gamme d’assolements, « le lin d’hiver représente aujourd’hui 70 à 80 % des surfaces totales cultivées en lin oléagineux en France ».

Lin oléagineux d’hiver ou de printemps, chacun possède ses avantages et ses inconvénients. (©Linoléa)

Agriculteur en Meurthe-et-Moselle, David Meder, lui, s’est intéressé au lin oléagineux de printemps, il y a sept ans pour « rompre le cycle des adventices (vulpin) » sur son exploitation notamment. « En zone intermédiaire, nous sommes très dépendants du colza comme tête de rotation. Hors le lin oléagineux constitue aussi un excellent précédent pour le blé », témoigne l’agriculteur. Un atout que confirme Luc Rougeaux, installé en Eure-et-Loir et passionné par la culture depuis 1990 : il note « + 4-5 q/ha pour le blé suivant un lin oléagineux » et voit aussi un fort intérêt pour « la structure des sols. […] Le prix est rémunérateur : « ça ne casse pas des briques » mais ça a l’avantage d’être relativement stable selon les années. » 

De plus, « pas besoin de matériel spécifique pour se lancer, on utilise le même semoir et la même coupe que pour les céréales. Il suffit juste d’adapter les réglages », ajoute David Meder. 

4 étapes clés dans la conduite culturale

Si la culture du lin n’est pas compliquée, Luc Rougeaux conseille toutefois « de ne pas se lancer tout seul, cela nécessite d’être épaulé ». Et les agriculteurs engagés dans la filière peuvent notamment compter sur l’accompagnement technique de Lin 2000. Pour Denis Burlaud, responsable technique de la coopérative, il y a surtout quatre étapes majeures pour la réussite de la culture : le semis, la maîtrise du désherbage, la fertilisation, la protection fongique et contre la verse. Il détaille quelques points clés pour ces différentes étapes.

Concernant le semis, le lin oléagineux d’hiver s’adapte « à tous types de sol et au semis direct, la culture est résistante à l’hydromorphie ». Pour le lin oléagineux de printemps, mieux vaut « préférer les sols profonds (limoneux ou argilo-limoneux) à bonne réserve hydrique ».

 Lin oléagineux d’hiver (LOH)Lin oléagineux de printemps (LOP)
Date de semisÀ respecter parfaitement pour un juste développement automnal : 
– 12-17 septembre pour le Nord
– 20-25 septembre pour le Centre 
– 5-10 octobre pour le Sud
– 20 mars – 5 avril pour le Nord
– 10-25 mars pour le Centre
Dose de semis 450 grains/m² (+/- 50 grains selon les conditions : mottes, résidus, cailloux)750 grains/m² (+/- 50 grains selon les conditions : mottes, résidus, cailloux)
RavageursInsensible aux limaces et aux altisesVigilance vis-à-vis des altises

Par rapport au gel, on peut dire que le LOP résiste normalement à « des températures autour de – 6/-7 °C »  et le LOH, « – 14 /- 15°C ». Il peut néanmoins être plus sensible après la levée de sa phase d’endurcissement… 

Le lin est une plante peu couvrante. (©Nadège Petit/Semences de France)

Dans l’ensemble, « le lin oléagineux est une plante assez rustique, mais peu couvrante : les adventices peuvent donc vite prendre le dessus », note Luc Rougeaux. « Peu de produits de désherbage chimique sont disponibles aujourd’hui mais des solutions existent pour la majorité des situations », assure Denis Burlaud. De plus, «  Allié SX vient d’être homologué en septembre 2021 », ce qui est « une bonne nouvelle pour la filière ».

Solutions de désherbage chimique sur lin oléagineux. (©Linoléa)

En lien avec Terres Inovia, des essais sont également en cours concernant le désherbage mécanique. « C’est une plante assez frêle et souple, qui a la capacité de faire des racines rapidement. Elle a donc la puissance pour résister au passage d’outils de désherbage mécanique. Pour le moment, la herse étrille apparaît comme l’outil le plus adapté en termes d’efficacité », précise Denis Burlaud. Par contre, « en lin d’hiver, les fenêtre de tir possible ne sont pas larges… Dans les essais, on évalue alors l’intérêt d’un passage à l’aveugle en pré-levée ». Résultats à suivre…

Autre piste agronomique évoquée pour la gestion des adventices : « cultiver le lin oléagineux derrière un colza et non une céréale, ce qui permettrait de semer deux mêmes céréales ensuite ». Plusieurs voisins de Luc Rougeaux ont testé cette pratique et semblent être satisfaits, l’agriculteur envisage de tester à son tour prochainement. 

Vigilance face à la verse

Côté fertilisation, Denis Burlaud note des « besoins en azote limités : 4-5 u/q de graines produites, donc en moyenne 100 à 120 u/ha. Les apports se font en fonction du bilan azoté de chaque parcelle ». Ils sont recommandés : 

  • « En reprise de végétation (sortie hiver) sur lin redressé en 1 ou 2 passages (70 %/30 %) » pour le LOH ;
  • Et « au plus près du semis en un seul passage » pour le LOP.

« Les besoins en phosphore et potassium sont eux aussi limités à 80 u de P et 130 u de K. Idéalement, les apports doivent se faire à l’automne pour le LOH et en sortie hiver pour le LOP. Le lin est exigeant en zinc mais celui-ci est le plus souvent apporté directement par un pelliculage autour de la semence. »

Autres aspects de la conduite culturale : la protection contre la septoriose et la verse. Le passage d’un régulateur est fortement recommandé, surtout en lin d’hiver : « attention à ne pas intervenir trop tard. Le bon moment, c’est à la reprise de végétation (30 cm) ».

Protection du lin oléagineux contre les maladies et la verse. (©Linoléa)

L’amélioration génétique peut aussi aider sur ce point. Car bien que le lin oléagineux soit une espèce mineure, Charles-Henri Biard, responsable multiplication et développement commercial Linéa, annonce « un flux variétal dynamique pour les années à venir ». Les équipes ont aussi mis en place un réseau d’essais important, Variétolin (18 sites en France), « qui permet d’évaluer les variétés selon les différentes conditions pédoclimatiques et d’identifier les meilleures variétés par terroir ». 

Voir les  résultats d’essais lin oléagineux de Terres Inovia sur myVar