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Retour d'expériences

La détection des chardons par drone se démocratise


TNC le 24/04/2023 à 18:25
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Les chambres d'agriculture de l'Aisne et de la Somme travaillent sur la détection des vivaces par drone pour réduire le recours aux herbicides. (©Abelio)

Après plusieurs essais en grandes parcelles, les chambres d'agriculture des Hauts-de-France proposent désormais d'accompagner les agriculteurs dans la détection de chardons par drone pour une pulvérisation ciblée. Agriculteur dans le sud de l'Aisne, Vincent Gandon met en avant aujourd'hui une économie de 68 % d'herbicides contre ces vivaces sur ses parcelles de betteraves sucrières.

En 2019, les chambres d’agriculture de l’Aisne et de la Somme ont lancé un programme expérimental concernant la détection d’adventices par drone, en lien avec l’Agence de l’eau Artois-Picardie et le Casdar. 

Si les traitements herbicides contre les chardons des champs sont généralement réalisés en localisé manuellement (voire en plein, en cas de forte infestation), l’idée est de proposer une cartographie précise, à partir d’images de drone, de la répartition de ces vivaces dans l’inter-rang pour une pulvérisation ciblée sur maïs ou betterave, nous expliquait Laurent Cardon, agriculteur à Remaucourt (Aisne) et vice-président de la CA de l’Aisne lors d’un précédent reportage. 

Réduire l’utilisation des herbicides

Après plusieurs essais sur maïs et betteraves, le service est désormais ouvert à tous les agriculteurs des Hauts-de-France. L’économie d’herbicides sur chardons varie entre 50 et 80 % par rapport à un traitement en plein, en fonction de l’infestation de la parcelle et de la répartition des adventices, présente Aymeric Lepage, responsable d’équipe agronomie, productions végétales et numérique de la CA de l’Aisne. Dans ce département par exemple, une dizaine de producteurs ont eu recours à ce service l’an dernier. Parmi eux, Vincent Gandon, installé dans le secteur du Tardenois, a démarré les tests la détection des chardons sur betteraves depuis 3 ans : il fait part « d’une économie de 68 % d’herbicides sur son exploitation en 2022 », avec 5 ha 20 traités sur une parcelle de 15 ha 90 (coupure de tronçons de 4 m).  

« Ça va dans le bon sens », témoigne l’agriculteur, qui est aussi engagé dans la démarche Haute valeur environnementale (HVE). Il met en avant les avantages de la pulvérisation localisée au niveau de la  réduction des IFT, ainsi que sur les plans environnemental et économique. «  L’économie d’herbicides réalisée la première année a permis de rentabiliser le coût de la prestation, fixé à 16 €/ha, précise-t-il. C’est aussi un confort de travail. De plus, la carte de préconisation est réutilisable plusieurs années, afin de réduire la problématique chardons » dans la ou les parcelle(s) infestée(s). C’est une solution de précision, que Vincent Gandon combine avec d’autres leviers agronomiques, dont le travail du sol. 

Comment cela fonctionne ? 

« Un drone équipé d’un capteur multispectral vient survoler les parcelles à 10 voire 20 m du sol. Après traitement des images, une cartographie précise de la répartition des adventices est générée », explique Aymeric Lepage. Pour cela, les chambres d’agriculture font appel à Abelio, choisi pour son rapport qualité/prix. C’est le prestataire qui gère le vol du drone et le traitement des images derrière. « Les équipes ont construit elles-mêmes le drone avec les bandes spectrales dont elles ont besoin, ce qui simplifie le traitement des images, indique le conseiller. Après le vol, il faut compter entre 7 et 10 jours maximum de traitement ».

C’est l’intelligence artificielle qui permet de reconnaître spécifiquement les chardons des autres adventices. La carte de préconisation doit ensuite être adaptée par les conseillers de la chambre, en fonction de la console du pulvérisateur sur laquelle elle va être utilisée, pour que l’agriculteur n’ait plus qu’à l’insérer. La chambre d’agriculture est, en effet, en appui pour vérifier le matériel car tous les pulvérisateurs ne réagissent pas de la même manière. Elle propose un accompagnement à l’insertion d’une carte « test » de frappe ciblée (tests à l’eau) la première année.  

Pourquoi le choix du drone ?

Selon les chambres d’agriculture, « c’est la technologie la plus abordable et qui s’adapte le mieux. Des robots peuvent également servir pour la détection des adventices mais sont limités par la réglementation à 1 km/h. Autres possibilités : les pulvérisateurs de haute précision comme l’Ara d’Ecorobotix ou les pulvérisateurs équipés de caméras sur leurs rampes. Leur coût reste toutefois élevé (environ 2 000 €/m)… 

Pour faire de la frappe ciblée, Vincent Gandon précise « n’avoir réalisé  aucun investissement supplémentaire. J’utilise mon pulvérisateur Evrard Meteor (2012) et une console Trimble de 2017, presque obsolète qu’on a réussi à faire fonctionner avec une petite astuce ». Il suffit, en effet, « d’un  pulvérisateur équipé d’un GPS et d’une console débloquée pour la  modulation et la  coupure de tronçons ». « Il faut aussi être à l’aise un minimum avec les nouvelles technologies, souligne l’agriculteur, même si on est accompagné par la chambre d’agriculture. »

L’offre de détection par drone est aujourd’hui proposée sur maïs et betteraves pour lutter contre les chardons, ainsi que pour les parcelles de haricots contre le datura. Des tests sont également en cours sur les cultures de lin et de pommes de terre. Affaire à suivre !