Faux champagne : prison ferme et lourds dommages et intérêts pour un viticulteur
AFP le 02/09/2025 à 16:43
Quatre ans de prison dont 18 mois ferme, et plusieurs millions d'euros de dommages et intérêts : un vigneron champenois a été lourdement condamné pour avoir produit du faux champagne à partir de vins d'Espagne et d'Ardèche, d'arômes et de gaz carbonique.
Didier Chopin, 56 ans, jugé coupable d’escroquerie, usurpation d’appellation d’origine et abus de biens sociaux a également été condamné à une interdiction définitive de gérer une société, et une interdiction d’exercer une profession en rapport avec le champagne pendant 5 ans.
Son épouse, jugée à ses côtés, a été condamnée à deux ans de prison avec sursis, et aux mêmes interdictions. Le tribunal, qui est resté proche des réquisitions du parquet, a également décidé d’une amende de 100 000 euros chacun et de 300 000 pour la SAS Chopin.
Parmi les victimes et parties civiles, la Scapest, centrale d’achat de Leclerc s’est vue octroyer 1,5 millions d’euros de dommages et intérêts, et le Comité interprofessionnel du vin de Champagne 500 000 euros.
« Nous saluons ce jugement qui condamne très sévèrement une atteinte grave au patrimoine commun des vignerons et des maisons de Champagne », s’est félicité le Comité Champagne, confirmant s’être vu octroyer 500 000 euros de dommages et intérêts.
« Le champagne doit être protégé de toute contrefaçon »
« Cette décision exemplaire exprime un message clair : le champagne est un vin unique et exceptionnel, qui doit être protégé de toute contrefaçon, » estime Charles Goemaere, directeur général du Comité cité dans le communiqué.
Au total, les dommages et intérêts s’élèvent à plus de 3,2 millions d’euros, alloués notamment à des entreprises comme la SAS GM Distribution (100 000 euros) et le spécialiste du déstockage de vins Distrilot (4 400 euros), ainsi que la CGT (5 000 euros).
La fraude, qui s’est déroulée entre 2022 et 2023, aurait porté sur des centaines de milliers de bouteilles, pour un préjudice estimé à plusieurs millions d’euros.
La holding du vigneron comptabilisait une centaine de marques en plus de celle commercialisée sous le nom de « Champagne Didier Chopin », avait assuré lors du procès l’avocate du Comité Champagne, Me Diane De Valbray, citant par exemple la marque Stesson vendue aux Pays-Bas.
« On n’arrivera pas à savoir, hélas, le nombre exact » de bouteilles vendues en France et à l’étranger, en raison d’« une comptabilité totalement frauduleuse », avait-elle déploré.
Le volet douanier de l’affaire – concernant les exportations de son faux champagne – sera jugé le 3 février 2026. L’affaire avait éclaté à l’été 2023 après des signalements de la responsable d’un site de production secondaire du vigneron dans l’Aisne.
Violences sexuelles
La quadragénaire a obtenu « une immense victoire puisque c’est elle qui a dénoncé les faits, elle n’était pas crue, elle a même été intimidée et aujourd’hui le résultat est là : les condamnations sont très lourdes tant sur le plan de la prison que sur le plan des dommages et intérêts » a souligné son avocat, Me Emmanuel Ludot.
« C’est un succès [pour elle] et aussi un succès pour le monde du champagne », estime-t-il. Didier Chopin et son épouse étaient absents mardi. « C’est une triste conclusion. J’ai fait une erreur, je suis ruiné et je n’ai rien d’autre à ajouter », avait-il réagi à l’issue du procès en juin, lors duquel il avait tenté de minimiser les volumes de faux champagne produits.
Après la révélation des faits mi 2023, l’entrepreneur avait fui au Maroc et tenté de se relancer là-bas en créant notamment une société de maraîchage. Mais il avait fini par être arrêté, condamné et incarcéré dans ce pays pour une affaire de chèques sans provision.
Le vigneron fait aussi face à une autre procédure judiciaire pour des accusations de violences sexuelles portées par plusieurs de ses ex-employées, dont cinq ont porté plainte.